À l’approche de l’Aïd Al-Adha, célébré demain vendredi, une phrase résonne douloureusement dans le cœur des enfants du secteur de Ghaza « Ô Aïd, dans quelle situation reviens-tu ? » Cette question reflète la détresse et la souffrance d’une jeunesse qui accueille la fête sacrée dans un contexte tragique de famine et de guerre.
Depuis 20 mois, le secteur de Ghaza subit une guerre d’extermination menée par l’armée israélienne, causant plus de 179 000 morts et blessés, dont une majorité d’enfants et de femmes, ainsi que plus de 11 000 disparus. Des centaines de milliers de personnes ont été déplacées, et la famine s’est installée, emportant la vie de nombreux enfants. Contrairement aux trois fêtes précédentes, cet Aïd survient au milieu d’une famine sans précédent. Depuis le 2 mars, les autorités israéliennes ont fermé les points de passage, empêchant l’arrivée des aides humanitaires et alimentaires. Les enfants racontent s’endormir chaque nuit le ventre vide, faute du moindre morceau de pain dans leurs foyers. Le sens même de l’Aïd a été dérobé aux enfants par la guerre qui leur a ôté leurs proches, tués ou disparus. Ils vivent dans une peur constante des explosions causées par les bombardements violents de l’occupant. L’absence de logement sûr, de vêtements neufs et propres a également brisé la joie que cette fête devrait leur apporter. Ils survivent dans des tentes délabrées, infestées d’insectes et de rongeurs, aggravant leur misère. Cette guerre a privé ces enfants de leur enfance, de leurs droits fondamentaux tels que l’éducation, la sécurité, le jeu, les réduisant à assumer des responsabilités bien au-delà de leur âge, comme faire la queue pendant des heures pour obtenir de la nourriture et de l’eau.
Une joie perdue
Ritaj Shamia, 11 ans, confie qu’elle ne ressent plus la joie de l’Aïd à cause de la dure réalité à Ghaza. « Je ne ressens pas l’Aïd, nous n’avons ni vêtements neufs ni argent », explique-t-elle, soulignant que la guerre, le manque d’eau et d’hygiène ont transformé la vie des enfants. Farah Maqbal, 16 ans, récemment déplacée de son domicile à Jabalia, au nord de Ghaza, témoigne que la vie est devenue plus difficile avec l’intensification de l’extermination. «Avant cette guerre, l’Aïd était rempli de joie, mais aujourd’hui, avec ces conditions inhumaines, il n’y a ni bonheur ni ambiance festive. » Elle ajoute avec tristesse : « À l’Aïd précédent, nous allions rendre visite à la famille de mon grand-père, mais aujourd’hui, ils sont tous martyrs. Qui irons-nous voir ? » Farah décrit un Aïd marqué par le sang, la peur, les bombardements, et les morts qui les entourent. Elle exprime l’espoir que le prochain Aïd puisse se dérouler sous un cessez-le-feu mettant fin à l’extermination et aux déplacements forcés, appelant la communauté arabe à briser son silence et à les soutenir.
Peur et faim
Adel Maqbal, un autre enfant, raconte à l’agence Anadolu que la guerre lui a volé plus d’un an et demi de sa vie. Il ne ressent pas l’arrivée de l’Aïd en l’absence de sacrifices rituels et de la joie collective. «Ces jours-ci, il y a une tristesse profonde et une peur constante. Je m’endors en ayant peur à cause des raids israéliens quotidiens. Je passe aussi mes journées affamé à cause du manque de nourriture, notamment de farine». Il confie : «Chaque nuit, je m’endors le ventre vide». Selon l’ONU, l’occupant a délibérément imposé cette famine en fermant les passages aux aides humanitaires, notamment alimentaires, poussant les Palestiniens vers la famine. Michael Fakhri, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, a déclaré que Ghaza se trouvait à « l’étape la plus dangereuse de la famine », dénonçant une « extermination, une famine, un crime contre l’humanité et une violation grave des droits humains ». Adel affirme que la guerre israélienne leur a volé les droits les plus élémentaires, comme le jeu et l’éducation. Privés d’école, d’apprentissage et de lecture, ils ont également été privés de l’Aïd. Il demande l’arrêt immédiat de cette guerre d’extermination et l’ouverture des aides, suppliant la nation arabe de se lever à leurs côtés. Il déplore le manque de nourriture, de fruits et de légumes, et la qualité mauvaise de l’eau potable, souvent salée. Depuis le 7 octobre 2023, 60 enfants palestiniens sont morts de malnutrition liée au siège israélien, selon le dernier bilan du ministère de la Santé.
Des responsabilités trop lourdes
Adel explique qu’il doit désormais assumer de lourdes responsabilités, perdant ainsi son enfance à cause de la guerre. Chaque jour, dès son réveil, il part chercher de l’eau dans un lieu éloigné pour la ramener à sa famille déplacée.
Il va aussi aux distributions de nourriture gratuite, mais souvent il repart bredouille, parfois même blessé. Son rêve est de devenir médecin pour soigner les blessés victimes des crimes israéliens. L’Aïd survient alors que la population lutte chaque jour pour survivre, sous des bombardements incessants, dans des décombres, sans revenus ni aides humanitaires. Depuis le 7 octobre 2023, Israël mène une guerre d’extermination à Ghaza, marquée par les assassinats, la famine, la destruction et le déplacement forcé, ignorant les appels internationaux et les injonctions de la Cour internationale de justice à y mettre fin.
M. Seghilani