Si le cinéaste a fait de son Ethan Hunt un personnage culte du cinéma d’action, dans les coulisses, les choses n’ont pas toujours été roses.
Association couronnée de succès entre un acteur mégastar et un auteur orfèvre en son domaine, Mission : Impossible reste aujourd’hui un blockbuster emblématique de sa génération, qui a inspiré par la suite nombre de fils spirituels. Son histoire n’est pourtant pas celle d’un long fleuve tranquille, tant les deux forts caractères qui ont contribué à faire du film ce qu’il est ont pu se frictionner dans les coulisses.
Brian de Palma, un choix de Tom Cruise
Avant de devenir une franchise emblématique du cinéma, Mission : Impossible était une série télévisée, et pas n’importe laquelle. Alors lorsque Tom Cruise, qui vient de fonder son propre studio, envisage de l’adapter et d’en endosser le rôle-titre, quelques dents grincent du côté de Hollywood. Et ce d’autant plus que le film prévoit de réécrire en partie la mythologie de la série, et notamment le personnage de Jim Phelps, ce qui provoque le mécontentement de Peter Graves, qui refuse de reprendre son rôle sur grand écran, remplacé par Jon Voight.
Tom Cruise le sait, il lui faut un auteur, un grand nom derrière la caméra pour convaincre. Dans un premier temps, il doit s’agir de Sidney Pollack, pour lequel l’acteur a déjà tourné La firme. Mais le cinéaste se retire du projet, plus intéressé par son projet de remake du Sabrina de Billy Wilder. Il lui vint alors l’idée de démarcher Brian de Palma, qu’il a rencontré par l’intermédiaire de Steven Spielberg.
À l’époque, le cinéaste traverse une période délicate. Bien que considéré aujourd’hui comme un classique, L’impasse a été un relatif échec commercial, doublé de critiques parfois mitigées. Il vient par ailleurs de sortir de deux énormes flop en salles : Outrages et Le bûcher des vanités. De Palma a besoin de se relancer, notamment par un film de commande. Ce film, ce sera donc Mission : Impossible.
Une atmosphère tendue sur le plateau
Quand on auteur et réalisateur du calibre de Brian de Palma fait tourner devant sa caméra une star de celui de Tom Cruise, autant dire que le succès est assuré d’avance. Pourtant, lorsque débute la promotion du film avant sa sortie, un invité brille par son absence : De Palma lui même. Quasiment invisible sur les tapis rouges, il annule même certaines interviews à la dernière minute. Dans les coulisses (notamment à travers un article du TIME Magazine publié au moment de la sortie du film), il se dit que l’atmosphère serait tendue entre les deux hommes.
Parmi les témoins de ces tensions sur le plateau, Jean Reno a livré une anecdote à propos du tournage au micro de l’émission Échange public de Vincent Perrot sur RTL il y a quelques semaines. Gardant de cette expérience une opinion plus que fraîche de Tom Cruise (« l’échange que j’ai eu avec lui, c’est plutôt une absence d’échange »), l’acteur français relatait une journée où son partenaire a fait entièrement suspendre le tournage par sa volonté.
« Un jour, je suis venu pour tourner le scène avec le rat dans le circuit d’air conditionné, où le couteau tombe. On répète, on répète. Et puis, [Tom Cruise] regarde Brian de Palma et lui dit : ‘Brian, on va pas tourner aujourd’hui, je le sens pas’. Et il est parti. Résultat, on a passé la journée à regarder Wimbledon à la télévision. En fait, il était en discussion avec Stanley Kubrick pour Eyes Wide Shut. C’est plutôt ça, Tom Cruise, un acteur-homme d’affaires ».
Une querelle d’influence
Malgré la grande liberté dont le réalisateur jouit sur le tournage, les tensions culminent lors de ce qui reste encore aujourd’hui LA scène iconique de Mission : Impossible, à savoir la séquence d’infiltration dans le bâtiment de la CIA dans laquelle Tom Cruise se laisse descendre par des câbles dans une salle remplie de lasers. Scène aussi sophistiquée que complexe, elle nécessita plus d’une quinzaine de prises à Brian de Palma, ce qui ne fut pas suffisant pour l’acteur qui réclama d’en tourner une quinzaine supplémentaire. La situation dégénéra et nécessita l’intervention de Paula Wagner, associée de l’acteur et coproductrice de M:I.
En réalité, comme l’avoua De Palma des années plus tard, les deux hommes s’affrontaient en permanence pour que chacun garde le contrôle du film et de l’écriture de l’intrigue. Entre l’acteur et producteur du film d’un côté et son réalisateur de l’autre, la situation aboutit à un conflit d’ego. Malgré les rumeurs (notamment celle selon laquelle Tom Cruise fit remonter le film de manière plus linéaire sans consulter De Palma), le film n’en pâtit en rien puisqu’il connut un succès colossal en salles (450 millions de dollars de recettes). Les différends qui ont pu opposer les deux hommes sur le tournage n’ont pourtant empêché Tom Cruise de proposer à De Palma de réaliser la suite de Mission : Impossible, bien conscient du potentiel commercial aussi bien de la franchise que de leur association commune. Dans des propos rapportés par le Telegraph, la réponse du cinéaste fut la suivante : « Tu te fous de ma gueule ? Pourquoi quelqu’un accepterait de refaire un jour un truc dans ce genre ? ». Perfectionnistes et ambitieux, ils ont au final, même de façon conflictuelle par moments, laissé chacun leur empreinte sur ce classique qui fête cette année ses vingt ans sans avoir pris une ride.
L’histoire de Mission : Impossible : Les membres d’un commando de la CIA sont envoyés à Prague avec pour mission d’appréhender un espion ennemi qui s’apprête à dérober une disquette contenant la liste secrète des agents américains en Europe centrale, qui se trouve dans l’ambassade américaine. Seulement ils ignorent que la CIA, persuadée que le commando est infiltré par une taupe, a envoyé une seconde équipe sur place.