Pour la Pasionaria algérienne, cette élection, dont nous amorcerons la dernière ligne droite dans quelques heures, à peine une fois que sera rendu le verdict du Conseil constitutionnel, aura pour effet, soit de renforcer la stabilité de l’Algérie et son immunité contre les ingérences étrangères, soit de la précipiter dans le chaos si toutes les précautions ne sont pas prises pour fermer la porte face aux aventuriers de tout poil et de tout acabit.
C’est en raison d’un thème que l’on pourrait qualifier d’anecdotique qu’une conférence de presse a été convoquée, hier, dans l’urgence par les membres de la direction du PT. La veille, un journal arabophone, au demeurant connu pour son soutien indéfectible à Benflis, avait commis un véritable brûlot à l’adresse de la secrétaire générale de ce parti, Louisa Hanoune. Anecdotique, disons-nous, car l’article en question, personne (ou presque) n’en avait entendu parler avant cette rencontre avec la presse, venue en quelque sorte pour en faire en quelque sorte la «promotion», fusse-t-elle indirecte. Le ton utilisé par les deux premiers conférenciers, Ramdane Taâzibt et Djelloul Djoudi, membres de la direction du PT, dénote en tout cas le fait que les propos tenus à l’adresse de Louisa Hanoune, un véritable tissu de mensonge, soit dit en passant, ont gravement touché tous les cadres, élus et militants de ce parti. Le PT, au reste, est un des rares partis en Algérie où le militantisme, le vrai, revêt encore son sens, plein et entier. Impossible donc de répondre à cette basse et sournoise attaque par le silence méprisant, ou bien une plainte en justice, doublée d’une mise au point. Cela paraissait l’être d’autant plus, étant entendu qu’une confrontation entre Louisa Hanoune et cette personne aurait consisté à rééditer l’opposition du pot de fer contre le pot de terre, qu’il semble bien que l’attaque dont a fait l’objet la Pasionaria algérienne semble être le fait du clan qui se trouve derrière. D’où la gravité de la chose et, partant, la nécessité de convoquer une conférence de presse urgente dans le but de clarifier les choses. Aux yeux de Louisa Hanoune, en effet, «cette attaque, qui représente en soi une grave dérive, est certainement le prélude à des dérives encore plus gravissimes lorsque la campagne électorale commencera». C’est dire que «cette élection est très particulière». Aux yeux de la conférencière, comme le pensent du reste tous les observateurs de la scène politique nationale, «il ne s’agit rien moins que d’une élection charnière à la suite de laquelle l’Algérie sera immunisée définitivement contre toute tentative d’ingérence étrangère en renforçant sa stabilité interne, ou bien basculera dans le chaos».
Savoir raison garder…
Voilà pourquoi, nous apprend encore Louisa Hanoune, que lors d’une rencontre qu’elle a récemment eue avec le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, elle a fortement insisté sur la nécessité de faire en sorte que ce scrutin se déroule dans une totale régularité et transparence, afin de ne donner le moindre prétexte aux partisans de l’ingérence étrangère. Dans le même ordre d’idées, la conférencière rappelle que «le président Bouteflika, en sa qualité de premier magistrat du pays, est pleinement responsable de la régularité de ce scrutin, cela jusqu’à la fin du dépouillement et la proclamation officielle des résultats». Aux yeux de la conférencière, qui rappelle au passage que des troubles enferrent l’Algérie de toutes parts, «l’idée d’aller vers une bipolarisation factice, censée opposer Bouteflika à Benflis, est particulièrement dangereuse pour l’Algérie». À ses yeux, en effet, «elle peut être le prélude à une ingérence étrangère, comme cela s’est produit au Kenya, lorsque le président s’est trouvé confronté à son ancien Premier ministre. Et pour forcer le gagnant aux élections à abdiquer, on n’hésite pas non plus à brandir la menace du TPI». Très curieusement, même pour l’Algérie, on évoque avec insistance depuis quelques jours des plaintes, supposées ou non, qui auraient été déposées contre de hauts responsables, actuels ou passés, au niveau de ce même TPI. Louisa Hanoune, quoique plus pondérée que les deux autres conférenciers, ne laissera quand même pas de planter quelques banderilles sur les flancs d’un Ali Benflis, dont elle ne citera que rarement le nom. C’est en effet du temps où il était au pouvoir que des lois réprimant les libertés ont été «pondues». Pour Louisa Hanoune, en outre, il est «étrange» que d’anciens du système se mettent à appeler aujourd’hui à changer ce même système. «On ne peut pas faire du neuf avec du vieux», s’exclame-t-elle. De même qu’il n’est pas permis de s’acheter une virginité, même bon marché, en tentant de s’inventer des faits d’armes passés. Ceux qui se trouvent derrière la démocratisation de l’Algérie sont parfaitement connus.
Louisa Hanoune, qui a subi le joug de la prison du temps du parti unique, en fait indéniablement partie. Ceux qui ont pris le train en marche dans le sillage de la révolution d’Octobre-88 ne peuvent incontestablement pas réécrire l’histoire à leur convenance. En réponse à une question sur la descente effectuée par la gendarmerie nationale au niveau de la chaîne privée «Atlas», la conférencière restera énigmatique, pour ne pas dire évasive. Tout en rappelant son attachement indéfectible à la liberté de la presse, et donc au droit d’existence des chaînes privées, elle dira simplement qu’elle a eu vent de cette descente au moment de quitter sa maison. Ne maîtrisant donc pas les tenants et aboutissants de cette affaire, elle ne peut raisonnablement pas donner son avis. Cela ne l’empêche pas de rappeler au passage que pour tout métier il y a des lignes rouges à ne pas franchir, et que des rumeurs, lues dans plusieurs médias d’ailleurs, avancent le nom du propriétaire de cette chaîne. No comment…
Au moment de mettre sous presse, hier, nous apprenons que les gendarmes, en tenue officielle cette fois-ci, sont revenus à bord de deux fourgons et d’une Patrol. Cette fois-ci, nous indiquent les mêmes sources, ils ont procédé à la saisie des tables de montage, alors que la veille ils s’étaient juste contentés de n’emporter que les caméras. Ce nouveau rebondissement semble indiquer que cette affaire est particulièrement sérieuse. Pour finir, Louisa Hanoune a formellement démenti cette rumeur, parue tout d’abord sur Internet, avant d’être reprise par plusieurs journaux avides de faits sensationnels, mais même pas vérifiés, selon laquelle une rencontre au sommet aurait eu lieu afin de négocier le retrait de Bouteflika au profit de Benflis. En conclusion, cette conférence confirme la thèse selon laquelle l’Algérie traverse une phase critique et dangereuse de sa courte histoire démocratique. Aussi, vigilance et pondération doivent-ils demeurer les maîtres-mots. En clair, et pour paraphraser Louisa Hanoune, il faut savoir raison garder !
Ali Oussi