Près de 80% des pauvres dans le monde, soit près de 900 millions de personnes, sont en plus directement exposés à des aléas climatiques renforcés par le réchauffement de la planète, un « double fardeau », alerte l’ONU vendredi. Canicule, sécheresses, inondations…
« Personne n’est épargné par les impacts de plus en plus forts et fréquents du changement climatique (…), mais les plus pauvres d’entre nous sont le plus durement touchés », commente Haoliang Xu, directeur par intérim du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Le PNUD et le centre de recherche Initiative d’Oxford sur la pauvreté et le développement humain (OPHI) publient chaque année l’Indice mondial de pauvreté multidimensionnelle, qui brasse désormais des données de 109 pays où vivent 6,3 milliards de personnes. Selon leurs conclusions, 1,1 milliard de personnes vivaient en 2024 dans une pauvreté multidimensionnelle « aiguë », dont la moitié sont des mineurs. Un chiffre similaire à celui de l’année précédente.
Deux régions sont particulièrement touchées: l’Afrique sub-saharienne (565 millions de pauvres) et l’Asie du Sud (390 millions), en outre très vulnérables aux impacts du changement climatique. Résultat, 78,8% de ces populations pauvres (887 millions de personnes) sont exposés directement à au moins une de ces menaces, la chaleur extrême arrivant en tête (608 millions), devant la pollution (577), les inondations (465) et la sécheresse (207). 651 millions sont exposés à au moins deux des risques, 309 millions à trois ou quatre risques, et 11 millions de pauvres ont même déjà subi les quatre en une seule année. « La concomitance de la pauvreté et des aléas climatiques est clairement un problème mondial », insiste le rapport. Inversement, la multiplication des événements climatiques extrêmes menace les progrès de développement. L’Asie du Sud a prouvé son « succès » en matière de lutte contre la pauvreté, mais 99,1 % de sa population pauvre est exposée à au moins un aléa climatique. La région « doit une fois encore tracer un nouveau chemin, en équilibrant réduction déterminée de la pauvreté et action climatique innovante ». Alors que le climat s’est déjà réchauffé d’environ 1,4 °C par rapport au XIXe siècle, la situation risque de s’aggraver et les projections disent, par exemple, que les pays les plus pauvres aujourd’hui sont ceux qui seront le plus frappés par l’augmentation des températures. « Face à ces pressions qui se chevauchent, il faut donner la priorité à la fois aux populations et à la planète, et surtout passer de la description à l’action rapide », plaide le rapport, qui ajoute : « Aligner réduction de la pauvreté, baisse des émissions [de gaz à effet de serre], adaptation aux impacts et restauration des écosystèmes permet l’émergence et le développement de communautés résilientes, sans laisser personne au bord de la route, en particulier ceux en première ligne dans un monde qui se réchauffe. »
R. I.