C’est officiel, la Compagnie nationale des hydrocarbures Sonatrach va contester avec vigueur l’action en justice intentée par le groupe pétrolier français Total contre l’Algérie.
L’affaire suscite désormais un intérêt particulier de la part de l’opinion publique internationale. Après de longues journées d’attente, le Groupe pétrolier a enfin réagi à la procédure d’arbitrage que Total et Repsol ont engagée pour réclamer un dédommagement du fait de l’application de taxe sur les profits exceptionnels. Et la décision n’est pas des moindres. En effet, selon un communiqué de presse rendu public avant-hier, par la Compagnie nationale des hydrocarbures, cette dernière affirme s’être mobilisée pour protéger ses intérêts. Même si elle garde ouverte la porte d’un règlement à l’amiable du conflit.
Commentant la décision politiquement et économiquement très sensible pour le pays, le groupe Sonatrach affirme avoir mobilisé tous les moyens légaux, étant convaincu de son droit légitime pour protéger les intérêts du pays et de la compagnie. Sonatrach, qui n’a pas fermé la porte à une solution à l’amiable, a néanmoins déclaré qu’elle restait toujours ouverte à la recherche de solutions acceptables de ce différend commercial. En sus, dans ledit communiqué Sonatrach a noté qu’«elle prend acte de la voie contentieuse empruntée par Total et Repsol, consistant à réclamer, auprès des instances arbitrales internationales, un dédommagement du fait de l’application de la loi par Sonatrach concernant la mise en œuvre de la taxe sur les profits exceptionnels instaurée en 2006».
Dans cette réplique de Sonatrach, il est donc suggéré à ses deux partenaires, Total et Repsol en l’occurrence, de choisir l’une des deux voies de règlement possible : soit une relance des discussions afin qu’un terrain d’entente puisse être trouvé ou bien seules les juridictions pourront statuer sur le différend. La balle est désormais dans le camp des partenaires de Sonatrach, signale ledit communiqué. D’autre part, Sonatrach n’hésite pas à avancer quelques-uns de ses arguments. En effet, le groupe a indiqué que «Repsol est engagée dans deux associations en phase de développement, à savoir Tin Fouyé Tebenkort (TFT) et Reggane Nord, ainsi que dans deux permis de recherche et d’exploration situés dans le bassin de Berkine et dans la région de Boughezoul ».
Allant jusqu’à rappeler le faible engagement des deux compagnies en Algérie, Repsol et Total en l’occurrence, elle relève que «Total a renoncé à plusieurs projets en Algérie au cours de la dernière décennie» contrairement à l’attitude de plusieurs compagnies qui ont renforcé leur implantation et investissements en Algérie durant la même période.
Pour rappel, le groupe français Total et son homologue espagnol Repsol ont engagé une procédure en contentieux contre Sonatrach auprès de la Cour internationale de Genève (Suisse) sur l’application de la taxe sur les profits exceptionnels prévue par la loi sur les hydrocarbures de 2006.
Il convient de rappeler que, il y a quelques jours, le patron du groupe pétrolier français a annoncé la décision de son entreprise de recourir aux juridictions internationales afin de contester la «taxe sur les profits exceptionnels». Aussi, le P-DG de Total, Patrick Pouyanné, avait indiqué que toutes les voies de recours ont été épuisées, s’entêtant à croire que seul l’arbitrage international s’offre en solution, évinçant ainsi les chances d’un accord à l’amiable auquel appelle Sonatrach.
«On a essayé de se mettre d’accord à l’amiable, on n’y arrive pas. Alors, on va en arbitrage», a déclaré le P-DG, dont les propos ont été relayés par l’AFP. Pour rappel, la taxe sur les profits exceptionnels a été instituée en 2006, appliquée aux investisseurs réalisant d’importantes découvertes et/ou bénéfices, au moment où les cours du brut culminaient à plus de 100 dollars le baril.
Cette taxe prévoit d’imposer entre 5 et 50 % sur la valeur de la production quotidienne moyenne, pendant chaque mois durant lequel le prix du baril de brut dépasse les 30 dollars. En 2015, la production algérienne du groupe français a atteint 25 000 barils équivalents pétrole par jour, contre 20 000 en 2014 et 21 000 en 2013. Le groupe indique avoir payé 305 millions de dollars en impôts, taxes et droits à la production en paiements en Algérie. Dans un autre sillage, il est à souligner que Total compte tirer profit de ce marchandage à connotation politique, pour sous-tirer de la Sonatrach la coquette somme de 180 millions d’euros.
Cette affaire remet ainsi sur le tapis les différents litiges commerciaux de Sonatrach avec certains de ses partenaires étrangers.
La Sonatrach avait récemment annoncé que plusieurs compagnies pétrolières internationales telles que l’ENI, BHP-Billiton, Cepsa et Pertamina avaient d’ores et déjà abandonné l’option de recourir à l’arbitrage. Reste à savoir quelle tournure prendra cette affaire qui fait, d’ores et déjà, couler beaucoup d’encre.
Lamia Boufassa