Alors qu’on s’approche de la fin de la troisième décennie internationale 2011-2020 de l’élimination du colonialisme, les forces armées de l’occupant marocain au Sahara occidental, stationnées au Mur de la honte, séparant les territoires sahraouis encore colonisés par Rabat de ceux libérés, ont ouvert le feu sur des nomades sahraouis, à Gueltet-Zemmour, dans les territoires libérés, tuant l’un d’eux, Choummad Bad Jouli. Qualifié par le Front Polisario de crime de guerre, car en violation des Conventions de Genève IV, signées sous les auspices des Nations unies (ONU), par les deux parties en conflit sur le Sahara occidental, le Front Polisario et les autorités coloniales marocaines. Crime de guerre, car cet assassinat par les soldats marocains d’un Sahraoui dans de telles circonstances est en violation de l’Accord du cessez-le-feu, paraphé par les deux parties précitées, sous l’égide de l’ONU, en 1991, pour la tenue d’un référendum, lequel document stipule «que l’assassinat de civils dans de telles circonstances constitue un crime de guerre», a rappelé le coordonnateur du Front Polisario avec la Mission de l’ONU (Minurso) pour l’organisation du référendum au Sahara occidental, M’hamed Khedad. Alors que le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, préparait sa mission de se rendre au Sahara ccidental, lequel territoire est une question de décolonisation inscrite à l’ONU, et ce, en prévision du rapport que le SG de l’ONU doit soumettre au Conseil de Sécurité avril prochain, la monarchie marocaine s’en est allée, usant de tous les moyens, notamment en sollicitant ses soutiens dans sa colonisation du Sahara occidental, principalement la France, pour faire échec à la Mission en question de Ban Ki-moon. Avec l’arrivée, aujourd’hui, du SG de l’ONU, aux camps des réfugiés sahraouis, pour se rendre ensuite, dans le cadre de sa mission, dans les territoires sahraouis libérés, précisément à Bir-Lehlou, le Maroc doit s’en mordre les doigts. Outre que cette visite du premier responsable de l’ONU rappelle pertinemment la nature fondamentale du conflit opposant le Front Polisario aux autorités coloniales marocaines, à savoir une question de décolonisation, son déplacement à Bir-Lehlou en est aussi un rappel à l’ordre pour le Maroc. En se rendant dans les territoires sahraouis libérés, précisément à Bir-Lehlou, là où, le 27 février 1976, le peuple sahraoui et son représentant unique et légitime, le Front Polisario, ont proclamé la République arabe sahraouie démocratique (RASD), Ban Ki-moon affirme la reconnaissance de l’ONU du combat du peuple sahraoui pour son indépendance. Pour le Maroc, il faut bien cacher, au monde, la laideur du visage de sa colonisation dans les territoires sahraouis encore sous son occupation, mais tout citoyen, de part ce monde, garde en mémoire la laideur des systèmes coloniaux qu’ont subi les peuples, dont ceux d’Afrique. Par ses entraves à la visite de Ban Ki-moon au Sahara occidental, tout déplacement du SG de l’ONU, car suivi de près par les médias internationaux, Rabat cherchait à maintenir le blocus politico-médiatique qu’elle impose sur les territoires sahraouis occupés. Rappelons le refoulement et l’accès interdit par les autorités coloniales des territoires sahraouis occupés aux observateurs internationaux, parlementaires étrangers, professionnels des médias internationaux et membres d’ONGs en charge des questions des Droits de l’Homme, Rabat a été prise au dépourvu par la décision de Ban Ki-moon de s’y rendre. En sollicitant la France, à peser au sein du Conseil de Sécurité et au niveau du Bureau du SG de l’ONU pour changer l’itinéraire de la mission en question de Ki-moon au Sahara occidental, par nostalgie à son histoire coloniale, et par calculs d’intérêt économiques, au Maroc, pour mieux exploiter illégalement les ressources naturelles des territoires sahraouis occupés, Paris contribue fortement à faire échec aux objectifs de l’ONU, relatifs à la troisième décennie internationale 2011-2020, de l’élimination du colonialisme dans le monde, dont celui du Maroc au Sahara occidental.
Paris au secours de Rabat en Europe, contrairement à la Norvège
Acculés par les nombreuses et multitudes décisions d’ordre politiques, juridiques et économiques qui ont contrarié et bousculé sa politique coloniale au Sahara occidental, la monarchie marocaine tente, en s’appuyant sur les responsables français et leurs lobbies, dans l’espace européen, pour sortir de l’engrenage des camouflets, dans lequel elle est plongée, depuis, notamment, ces derniers huit mois. La dernière décision en date, celle du Fonds de pension souverain de la Norvège, le plus gros fonds souverain sur la scène internationale. Celui-ci a annoncé, en effet, hier, sa décision de se désengager du groupe pétrolier irlandais San Leon Energy, à cause des activités illégales de ce dernier, dans les territoires sahraouis sous occupation marocaine, souligne que «l’entreprise (San Leon Energy, ndlr) contribue à de graves manquements aux normes éthiques de base, en conduisant une prospection pétrolière au Sahara occidental pour le compte des autorités marocaines», a-t-il indiqué dans ses recommandations. Décision en conformité avec le Droit international, alors que la France a annoncé la veille, jeudi, qu’elle œuvrera pour l’annulation de l’arrêt du Tribunal européen, du 10 décembre 2015, annulant l’Accord agricole entre l’Union européenne (UE) et le Maroc, car l’Accord UE-Rabat, inclut le Sahara occidental, lequel territoire est soumis à un processus de décolonisation à l’ONU. Indiquant que la France est «attachée à la relation entre l’Union européenne et le Maroc», le Quai d’Orsay «invite ses partenaires européens à agir dans le même sens, dans la perspective d’aboutir à une annulation de l’arrêt», a souligné, jeudi, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, lors d’un point de presse. Face à la pluie de décisions qui ne cessent de tomber sur Rabat, l’acculant sur son entêtement de maintenir sa colonisation au Sahara occidental, obstruant, ainsi, toute perspective de règlement de la question sahraouie, selon le Droit international, lequel dicte la tenue du référendum d’autodétermination du peuple du Sahara occidental pour venir à bout de conflit qui a duré plus de 40 ans. Ne pouvant aller jusqu’à suspendre ses relations avec l’UE, suite à l’arrêt du Tribunal européen et aussi la résolution du Parlement européen pointant du doigt le non-respect par le Maroc des Doits des Sahraouis, le Maroc s’est contenté de suspendre ses contacts avec l’UE, laquelle décision se veut davantage un coup médiatique, sans plus. Le roi Mohammed VI s’est empressé, lors de sa visite samedi dernier, à Paris, pour organiser un dîner à l’honneur du président français, pour que celui-ci allège outre le poids politico-diplomatique des conséquences des camouflets qu’il a reçus, mais aussi pour demander à Paris de peser au sein du Conseil de Sécurité, comme à ses habitudes, pour que ses décisions ne soient pas accablantes, sur la colonisation marocaine au Sahara occidental. Mais le rapport que s’apprête à rédiger le SG de l’ONO, au terme de sa visite dans la région, Ban Ki-moon sera, aujourd’hui, dans les camps des réfugiés sahraouis, après avoir été à Madrid, l’ex-colonisateur du Sahara occidental, l’occasion pour ce responsable onusien de se rendre bien compte, outre d’un peuple qui a trop et longtemps souffert d’une colonisation qui n’ a que trop duré, et il réclame son droit à l’autodétermination, de voir de visu sa détermination et son attachement à la liberté et l’indépendance de son pays. D’autant plus que la visite de Ben Ki-moon coïncide avec la célébration par le peuple sahraoui et son représentant unique et légitime, le Front Polisario, du 40e anniversaire de la proclamation, le 27 février 1976, de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), un des membres constitutifs de l’Union africaine (UA).
Karima Bennour