Les syndicats et organisations de la société civile les plus en vues en Tunisie ont appelé, dans une déclaration, les forces politiques « à placer l’intérêt général du pays et de son peuple au-dessus de toute autre considération, par l’adoption de la voie du « dialogue » en ce qui a trait notamment aux questions « conflictuelles ».
L’autre appel lancé par ces organisations est celui à l’adresse du peuple tunisien, qu’ ils l’invitent « à faire preuve de maîtrise de soi et à ne pas se laisser entraîner par la violence », préconisant de « préserver » les institutions du pays et les intérêts de la Tunisie, en cette phase délicate que traverse notre voisin de l’Est. Les signataires qui sont le Syndicat national des journalistes tunisiens, (SNJT), l’Union générale tunisienne dU travail (UGTT), l’Ordre national des avocats de Tunisie, l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), l’Association des magistrats tunisiens (AMT), la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES) ont, dans leur déclaration-appel, mis en garde contre « tout prolongement illégitime et injustifié de la suspension des activités des institutions de l’État », sans manquer de souligner « la nécessité de respecter le délai d’un mois mentionné dans la Constitution » est-il précisé. Un message à l’adresse du président de la République tunisienne, Kais Saïed, appelé par ces organisations et la majorité de la classe politique à dévoiler sa feuille de route, après les décisions et les mesures de geler l’Assemblée et de limoger le gouvernement et de nommer un nouveau responsable à la tête de l’exécutif.
Il est à rappeler que le Président tunisien a recouru à l’article 80 de la Constitution du pays, dans ses prises de décisions en question et a assuré la société tunisienne et les acteurs politiques de la scène tunisienne qu’il s’engage au respect « des libertés et de la démocratie ». Les rédacteurs de la déclaration-appel précitée ont dégagé, au terme de leur réunion, un comité de travail conjoint formé,
« pour faire le suivi des développements de la situation politique dans le pays et mettre en place une feuille de route», ont-il indiqué, en collaboration avec les organisations de la société civile « avant de la soumettre au président de la République et à l’opinion publique », est-il précisé dans leur déclaration-appel. Par crainte de voir le pays se diriger vers l’inconnu, l’opinion tunisienne et également des observateurs de la scène politique de Tunisie multiplient les appels non seulement au « strict respect » de la loi fondamentale du pays mais, insistent-ils, « à la promotion du dialogue politique » lequel ouvrira les perspectives de solutions et au dépassement dans la sérénité et l’apaisement des divergences, indiquant que le débat juridique n’apportera que davantage de complications et de blocages de toutes perspectives de sortie de crise.
En l’absence de la Cour constitutionnelle, laquelle n’a pas eu sa part , lors des débats de la constituante tunisienne, laquelle assemblée, dominée par le parti islamiste Ennahda et bien après des carences en matière de règles et de lois organiques relatives au fonctionnement du parlement tunisien, depuis la première Assemblée parlementaire élue, et dominé par Ennahda à celle qui vient d’être geler par le président de la République, la solution est à rechercher « sur la voie du dialogue politique » soulignent des observateurs.
À la crise sanitaire grave à laquelle est confronté le pays, aggravant davantage la situation socio-économique, qui n’a cessé de se dégrader, tout au long des gouvernements précédents, les Tunisiens sont appelés à faire preuve d’esprit de responsabilité, pour ne pas compliquer davantage la situation politique. Lourdement endettée et traversant une grave crise économique, marquée par un recul historique de son PIB jusqu’à atteindre -8,9% en 2020, en raison des politiques économiques promues depuis plus de dix ans, la Tunisie a vu sa situation économique reculée considérablement à cause notamment de la chute du tourisme, à cause de la pandémie, secteur représentant, faut-il le rappeler, 14% de son PIB. Aussi la dette extérieure du pays selon des rapports locaux, a par ailleurs, atteint la barre de près de 30 milliards d’euros soit 100% du produit intérieur brut du pays. la Tunisie, qui doit rembourser plus de 4,5 milliards d’euros sur l’année en cours, a aussi besoin d’une rallonge de 5,7 milliards d’euros, selon des experts, pour boucler son budget 2021, en pleine crise économique, sociale et sanitaire. Pays en négociations avec le FMI pour un quatrième plan d’aide en dix ans. Situation financière critique qui ne manquera sans nul doute pas d’ « être une carte de pression » sur le pays, comme avertit l’UGTT, refusant, affirmait-il, ces dernières années, de brader le pays aux donateurs et aux règles des investisseurs sur le marché mondial. Pour le politologue Slaheddine Jourchi, le futur « gouvernement » dans le sillage des mesures prises par le Président tunisien « devra améliorer les conditions de vie des Tunisiens », en raison des problèmes profondément enracinés du chômage et de la dégradation des infrastructures publiques, à travers le pays, pour lesquelles se sont soulevés les Tunisiens et qui « n’ont pas été résolus mais aggravés » durant ces dix ans ».
Karima B.