Annoncé par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, en fin mai dernier, le projet de fabrication d’hélicoptères en Algérie vient de prendre forme. Un premier accord a été signé, avant-hier, entre le MDN et un constructeur italien, à cet effet. Il a donné naissance à une joint-venture, qui se spécialisera dans la production d’aéronefs de type AugustaWesland.
Cette annonce montre l’intérêt porté par le gouvernement à la redynamisation du secteur industriel, un des leviers clé sur lequel repose le défi de la diversification de l’économie et la relance de la machine productive. Non seulement il sera question pour cette société mixte algéro-italienne de réaliser des hélicoptères pour les besoins de la consommation locale, mais aussi, une bonne partie de la production sera écoulée sur le marché international. C’est du moins ce qu’à affirmé Sellal, lorsqu’il a révélé à l’opinion publique ce projet, qui a eu alors l’aval du Conseil national de l’investissement (CNI). Cet accord passé jeudi dernier entre le MDN (ministère de la défense nationale) et la firme internationale italienne, Leonardo-Finmeccanica (SPA-Italie), qui produit des hélicoptères à usage civil et militaire, confirme tout aussi la volonté de l’institution militaire d’avoir sa propre assise industrielle, en vue de s’équiper en fourniture militaire, dont le besoin se fait de plus en plus sentir à la lumière du développement sécuritaire dans la région. À ce titre, il est bon de rappeler le lancement en 2015 d’une société de fabrication de camions de marque «Mercedes-Benz» à Rouïba, qui est le fruit d’un partenariat Algéro-émirati-allemand. Une année plus tard, les premiers modèles de ces véhicules conçus pour le transport de troupes de l’Armée ont été dévoilés au grand jour. L’ambition ne manque pas pour cette société, qui table à réaliser chaque année quelques 15 000 camions et environ 1 500 bus, destinés aux unités de l’ANP. Visiblement, l’industrialisation intensive devra amener l’Algérie à réduire ses dépenses militaires qui se chiffrent en milliards de dollars américains (Mds). D’ailleurs, l’Armée nationale représente l’un des plus grands importateurs d’armes en Afrique, comme le montre son budget de défense qui s’élève en 2015, à 13,1 Mds. Ainsi, cette société mixte algéro-italienne dont l’unité de fabrication sera implantée à la base industrielle aérienne d’Aïn Arnat, une région située à une dizaine de kilomètres à l’ouest de la ville de Sétif, aura à produire trois modèles d’hélicoptères, dans deux catégories différentes; légère et moyenne, notamment. Le Haut commandement de l’ANP entend par ce projet développer «des fabrications militaires pour contribuer au progrès national et renforcer ses potentiels», a-t-on souligné dans le communiqué rendu public par le MDN. De par sa position géostratégique, l’Algérie qui représente une puissance militaire dans la Région, est appelée, en quelque sorte, à répondre aux impératifs sécuritaires. Cet état de fait, semble-t-il, a incité l’Etat-major de l’Armée à repenser sa stratégie industrielle à même de s’assurer une certaine autonomie vis-à-vis de ses fournisseurs traditionnels en armement, tels que la Russie, l’Allemagne, la Chine, les USA etc. C’est le cas de le dire, puisqu’en mars dernier, plusieurs sources ont annoncé que l’ANP était en passe de signer des contrats d’armement avec la Russie. Au menu de cette commande, une douzaine d’avions de combat de type «Sukhoï Su-35», des chasseurs multi-rôles de génération 4++, pour un montant de 900 millions de dollars. D’autres sources ont parlé d’autres contrats d’environ 700 millions de dollars qui prévoient l’acquisition de 40 hélicoptères, de type Mi-28NE, de fabrication russe. Ceci, pour n’en citer que quelques marchés conclus ou prévisibles, pour illustrer les dépenses de l’Algérie en armement. De surcroît, ce projet qui venait de voir le jour intervient au moment où la situation de la trésorerie du pays recommande des coupes budgétaires au niveau des secteurs de l’économie. N’empêche, le département de la Défense, stratégique qu’il est, s’en taille au demeurant la part du lion des dotations financières. Alors qu’elle n’en disposait durant les années 2000 que d’un réseau de petites industries qui fournissent les troupes de l’ANP en équipements militaires légers, l’ANP s’emploie, aujourd’hui, à lancer de véritables pôles industriels. Il faut dire depuis l’avènement de la décennie terroriste, l’Algérie qui a fait face, presque seule, aux groupes armés, dispose d’une expérience importante dans la lutte contre le terrorisme et les fléaux menaçant la sécurité du pays. Une raison pour laquelle, la professionnalisation de l’Armée nationale populaire se fait de plus ressentir comme un besoin, pour relever d’autres défis sécuritaires. Pour le reste, la formation continue des effectifs militaires en vue de s’en accommoder avec les nouvelles technologies de l’information et de la communication intéresse à un haut point le Haut commandement de l’Armée. Quant au projet en question, selon les explications du MDN, la société algéro-italienne produira des aéronefs qui seront utilisés, essentiellement, dans le transport de personnels et de cargaisons, l’évacuation sanitaire ainsi que la surveillance et le contrôle, a-t-on précisé. Par ailleurs, il est indiqué qu’aussitôt la production lancée, la société se dotera d’un réseau de distribution national et international. Cela confirme d’ailleurs les intentions du gouvernement de passer à l’exportation, une fois la production a commencé. En outre, cette joint-venture disposera aussi d’un service après-vente qui prendra en charge tout le processus de réparation des appareils vendus. Ce n’est pas tout, à en croire le MDN, cette entité industrielle sera un véritable laboratoire au service de la technologie de pointe dans le domaine aéronautique. Ainsi, au programme de ses activités industrielles, il sera question de développer les domaines de haute technologie, notamment en matière des matériaux composites, de la mécanique de précision, de l’électronique et de l’optoélectronique.
Farid Guellil