Les Algériens étant très peu nombreux à voyager durant le mois de Ramadhan, de nombreuses agences de voyages et de tourisme se rabattent sur le segment de la Omra, un voyage spirituel particulièrement recherché durant le mois sacré.
Cette tendance a été confirmée à l’APS par plusieurs responsables d’agences de voyage qui assurent que la quasi totalité de leur chiffre d’affaires est réalisée durant le mois de Ramadhan par la Omra (petit hadj du musulman à la Mecque). Durant ce mois de Ramadhan quelque 50.000 pèlerins se sont rendus aux Lieux Saints de l’islam pour accomplir une Omra, selon les chiffres rendus publics par l’Office national du Hadj et de la Omra.
Le gérant d’une agence située à Bab El-Oued (Alger) a ainsi affirmé que le segment de la Omra constitue l’essentiel (jusqu’à 70%) de son cahier de charges durant le mois sacré. « Avant même la fin de chaâbane (8ème mois du calendrier hégirien), nous clôturons déjà ce programme et toutes les réservations auront été faites pour nos clients », explique Ali Yahi, assurant que son agence propose des « séjours à la carte » aux Lieux Saints de l’islam, avec des tarifs de base de 250.000 DA pour une durée de 15 jours, en comptant la billetterie et en demi-pension. Si le voyage lié à l’accomplissement du hadj est soumis à une stricte réglementation par le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, qui sélectionne les agences habilitées, celui de la Omra ne l’est pas et les tarifs fixés par les agenciers sont « libres », note le même interlocuteur, précisant que durant le mois sacré, ce sont plutôt les Algériens établis à l’étranger qui rejoignent le pays pour passer le Ramadhan aux cotés des proches et amis. Le reste de la clientèle (3 à 5 %) se compose essentiellement de familles ayant opté pour des destinations étrangères comme la Tunisie, le Maroc ou encore la Turquie pour y vivre une ambiance ramadanesque « pas si différente de celle du pays », poursuit-il, relevant que le manque financier à gagner pour son agence, durant ce Ramadhan, est « conséquent ». « Nous recevons rarement des personnes qui voyagent durant cette période, mais essentiellement des commerçants se rendant en France et en Turquie, entre autres, et représentant à peine 1% de notre activité », précise le gérant d’une autre agence, sise dans le quartier des Sources, Nouredine Baghdadi.
N’étant pas versée dans l’activité de la Omra, cette agence a également enregistré, durant ce mois sacré, « un manque à gagner considérable », révèle son responsable.Ce qui n’est pas le cas d’une autre, spécialisée en la Omra et dont le chiffre d’affaires durant le Ramadhan provient grandement de cette activité, en plus de celle de la billetterie, le mois sacré étant une haute saison pour ce rituel religieux, explique la représentante marketing de l’agence. Outre la Omra, l’agence compte également le Hadj parmi son portefeuille de prestations, cette dernière étant parmi celles autorisées par le ministère des Affaires religieuses pour la saison 2016 à assurer cette activité, avec un quota fixé à 300 hadji.
La Omra, un pur business pour les agences
Comptant parmi les doyennes des agences ayant investi, dés 1988, le créneau du tourisme et des voyages, une autre agence, qui a fini par évoluer en groupe, n’a pas jugé utile d’intégrer dans son cahier des charges l’activité de la Omra, indique son gérant Djamel Necib, considérant que celle-ci n’est pas « le propre » d’une agence se proclamant spécialisée dans les domaines suscités. Ce professionnel du tourisme considère qu’une agence « digne de ce nom se doit de développer les activités liées au tourisme et aux voyages organisés », et oeuvrer à « commercialiser la destination Algérie et à y faire ramener les touristes étrangers, tout en encourageant les nationaux à la privilégier sur les autres ». Il s’insurge ainsi contre le « laisser-aller » qui caractérise ce secteur, si bien qu' »il suffit d’un agrément, de porter une barbe et de mettre des placards publicitaires mettant en exergue la Qaâba pour verser dans l’activité de la Omra! ».Relevant une prolifération des agences qui font de ce créneau leur principale activité, au moment où celle-ci « doit relever du seul secteur des Affaires religieuses et des Wakfs », M. Necib estime que ce « mélange des genres » est fortement « nuisible » à l’activité touristique, le qualifiant de « pur business » et « de commerce visant le seul gain facile ». Se consacrer à la seule activité initiale du groupe fait perdre à celle-ci, durant le mois sacré, quelque 40% de sa clientèle, avoue son gérant, informant que cette période est néanmoins mise à profit pour répondre aux sollicitations de missionnaires voyageant dans le cadre de leurs activités professionnelles, aussi bien nationaux qu’étrangers. Une autre enseigne, sise à Alger centre, semble avoir opté pour cette
démarche qui consiste à « bien faire les choses dans un créneau plutôt que de se disperser au risque de ne rien assurer convenablement », soutient son représentant commercial, Sofiane Lakrouf. Il déplore que plusieurs agences spécialisées dans l’activité de la Omra et assurant également l’activité touristique ne donnent pas satisfaction s’agissant de cette dernière.
Il avoue que durant le mois sacré, l’activité de la boite baisse de 80% avec une clientèle se résumant, pendant cette période de l’année, aux missionnaires aussi bien nationaux qu’étrangers, qui les sollicitent pour la prestation d’achats de billets.
La clientèle vacancière se résume, quant à elle, à celle qui réserve pour l’après ramadan, précise-t-il, notant que le peu qui voyage durant ce mois-ci à l’étranger « préfère généralement réserver sur place des appartements ou des studios », sans passer par les services des agences.
« Pour investir le créneau de la Omra, il faut du temps et du personnel qualifié. Nous ne pouvons pas nous amuser à envoyer des personnes du troisième âge en toute irresponsabilité. Généralement, celles-ci sont ignorantes des procédures et des tarifs et sont, par conséquent, parfois dupées par des agenciers motivés par le seul gain rapide », conclut Lakrouf.