Les Espagnols se sont rendus hier aux urnes pour élire leurs nouveaux représentants aux deux chambres du Parlement. Le premier ministre Pedro Sanchez et le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) jouaient gros devant leur principal opposant le Parti populaire porte étendard d’une Espagne qui voulait se débarrasser de la politique de l’alliance de la gauche qui a influé négativement sur leurs conditions économiques et sociales et même sur le positionnement politique du pays alors que le monde connait un grand bouleversement sur le plan géopolitique.
Au pouvoir depuis 2018, Pedro Sanchez a négocié une alliance avec les partis de gauche et d’extrême-gauche pour gouverner. Son gouvernement controversé compte dans ses rangs la gauche radicale, a voté des mesures qui font encore débat en Espagne à l’instar de la légalisation de l’euthanasie, la réhabilitation de la mémoire des victimes du franquisme ou encore une loi permettant de changer de genre (sexe, ndlr), librement dès 16 ans. Il a également abandonné la traditionnelle position de neutralité de son pays dans le conflit du Sahara occidental en épousant les thèses marocaines qui sont une négation de la légalité internationale et a soutenu le soutien de l’Otan et des pays occidentaux à l’Ukraine.
Son principal rival, le dirigeant du Parti populaire, Alberto Núñez Feijóo, est donné comme futur vainqueur de ces élections. Toutefois sa victoire, et même si elle signifierait la fin politique de Pedro Sanchez, ne lui permettrait pas d’obtenir la majorité et gouverner sans des alliances avec les autres partis de la droite. Selon le politologue Pedro Riera Sagrera, professeur à l’université Carlos III de Madrid, pour gouverner, la droite n’aurait donc d’autre choix qu’une alliance. Or, son seul partenaire potentiel est Vox. Né en 2013 après une scission dans le PP, ce parti d’extrême droite revendique des idées ultranationalistes et ultraconservatrices. À sa tête, Santiago Abascal, qui a gagné en popularité par son violent rejet du séparatisme catalan, est parvenu à ressusciter une extrême droite jusque-là marginale. Au-delà de la défense farouche de l’unité de l’Espagne, son programme rejette l’existence de la violence de genre, critique le « fanatisme climatique » et est très ouvertement anti-LGBT et anti-avortement.
Se « réconcilier » avec l’Algérie et « renouer » avec la question sahraouie
Il soutient également un retour de l’Espagne dans le giron de ses alliés traditionnels à l’instar de l’Algérie et un abandon du soutien de l’Espagne au plan marocain d’annexion du Sahara occidental. Les positions de Vox qui font grincer des dents en Europe où on estime qu’elles le rapprochent de la droite nationaliste européenne, comme son allié assumé, Viktor Orban. Le premier ministre hongrois a d’ailleurs apporté son soutien à Vox dans une vidéo, tout comme l’italienne Giorgia Meloni. Le basculement à droite de la quatrième économie de la zone euro, après celui de l’Italie l’an dernier, constituerait un coup de tonnerre pour les gauches européennes. Toutes les enquêtes d’opinion publiées jusqu’à lundi estimaient quasi-certaine une victoire du Parti populaire (PP, droite) d’Alberto Núñez Feijóo. Le vote d’hier a été marqué par une grande proportion de vote par correspondance (près de 2,5 millions d’électeurs) et par des conditions météorologiques caniculaires qui ont freiné le démarrage de certains bureaux dépourvus de système de climatisation. Selon la presse espagnole, à Jaén, où les températures avaient dépassé les 40 degrés dans la vallée du Guadalquivir, chaque membre des 151 bureaux de vote de la capitale a reçu 4,5 litres d’eau (trois bouteilles de 1,5 litre), fournis par la sous-délégation gouvernementale et distribués dans un camion frigorifique municipal. Cependant, dans huit bureaux de vote, les plus chauds, une deuxième distribution d’eau a été réalisée. Sur les 39 centres de vote de la ville, 15 manquent d’un système de refroidissement de la climatisation, ce qui a nécessité la distribution d’une cinquantaine de ventilateurs. Des rallonges ont également dû être trouvées à la hâte pour pouvoir brancher les ventilateurs. Depuis tôt le matin, les bureaux de vote de la capitale de Jaén ont enregistré de longues files d’attente pour voter. Cette mobilisation des espagnols pour apporter le changement. Cela a poussé le candidat du Parti Populaire à espérer qu’à partir de la fin du dépouillement des bulletins, l’Espagne « entamera une nouvelle ère » et a appelé à voter malgré les difficultés. « J’espère et je souhaite que les Espagnols décident librement malgré les conditions météorologiques et toutes les adversités », a-t-il souligné en mentionnant certains coups fourrés du gouvernement de Pedro Sanchez qui avait continué à manœuvrer jusqu’au jour du vote pour entraver le vote dans certaines régions et provinces. Malgré tout le dispositif mobilisé par le Parti socialiste ouvrier espagnol pour pousser ses électeurs et certains indécis à renouveler leur confiance à Pedro Sanchez, les Espagnols étaient décidés à sortir dans la rue, après la proclamation des résultats pour défiler et fêter une nouvelle ère qui commence pour eux et pour leur pays.
Slimane B.