À la veille de la commémoration des manifestations historiques du 11 décembre 1960 et de la Journée mondiale des droits de l’Homme, célébrée le 10 décembre de chaque année, l’Algérie a réaffirmé sa volonté de préserver et de transmettre sa mémoire nationale en lançant un chantier inédit consacré à l’impact environnemental des crimes coloniaux. Un rendez-vous mémoriel d’envergure s’est tenu à cette occasion sous l’égide du ministère de l’Environnement et de la Qualité de vie, en coordination avec le ministère des Moudjahidine et des Ayants droit, et en collaboration avec la Commission algérienne de l’histoire et de la mémoire.
Cette rencontre, à forte portée symbolique, s’inscrit dans un moment charnière de l’histoire nationale et universelle. Elle fait écho à la lutte du peuple algérien pour sa liberté, incarnée par les manifestations populaires du 11 décembre 1960, et aux principes universels des droits humains célébrés le 10 décembre. En croisant ces deux références, les autorités algériennes entendent inscrire la question de la mémoire environnementale dans un cadre plus large de justice historique et de reconnaissance des souffrances subies durant la période coloniale. Dans son allocution, Kaoutar Krikou, ministre de l’Environnement et de la Qualité de vie, a salué l’accompagnement du ministère des Moudjahidine et des Ayants droit dans les travaux de la Commission nationale de la mémoire environnementale. Elle a souligné que cette initiative s’inscrit dans une démarche globale de valorisation et de sauvegarde de la mémoire nationale, visant à documenter l’ensemble des dimensions du fait colonial, y compris celles qui ont longtemps été ignorées ou reléguées au second plan. La ministre a rappelé que la Commission nationale de la mémoire environnementale a été officiellement installée le 3 novembre 2025 sous la supervision conjointe des ministères de l’Environnement et des Moudjahidine. Sa mission principale consiste à identifier, documenter et analyser l’impact environnemental des crimes coloniaux commis en Algérie. Pollution durable des sols, dégradation des ressources naturelles, résidus militaires et déchets toxiques : autant de séquelles environnementales qui continuent de peser sur les territoires et les populations, parfois plusieurs décennies après l’indépendance. Kaoutar Krikou a précisé que ce travail s’articule étroitement avec celui de la Commission algérienne de l’histoire et de la mémoire, créée par décision du président de la République le 30 novembre 2022. Cette commission est chargée de faire la lumière sur l’ensemble des crimes coloniaux, notamment les massacres, les pratiques de torture systématiques, l’utilisation de déchets nucléaires et l’ensemble des violations graves commises à l’encontre du peuple algérien durant la colonisation. L’intégration de la dimension environnementale vise à offrir une lecture plus complète et plus juste de cette période. La rencontre a également été marquée par la présence de la Direction générale des Archives nationales, dont le rôle est central dans la collecte et l’exploitation de sources fiables. Selon la ministre, la rigueur archivistique constitue un pilier fondamental de ce chantier mémoriel, qui ambitionne de bâtir une mémoire scientifique et institutionnelle solide, fondée sur des faits établis et documentés. L’objectif est non seulement de préserver la vérité historique, mais aussi d’en assurer la transmission aux générations futures. Dans ce contexte, Kaoutar Krikou a tenu à rendre un hommage appuyé aux éléments de l’Armée nationale populaire, héritière de l’Armée de libération nationale, pour leurs efforts constants en matière de déminage. Ces opérations ont permis de neutraliser des milliers de mines laissées par le colonialisme et de sécuriser de vastes zones du territoire national. Leur impact dépasse la simple dimension sécuritaire, contribuant à la restitution de terres agricoles et à la relance du développement local dans une optique de durabilité et de justice historique. À travers ce travail de mémoire environnementale, l’Algérie entend réaffirmer sa détermination à traiter le passé colonial dans toutes ses dimensions, sans hiérarchisation ni occultation. En intégrant les conséquences écologiques et sanitaires des crimes coloniaux dans le récit national, les autorités algériennes affirment une volonté claire de reconnaissance et de réparation morale, tout en inscrivant cette démarche dans une perspective éducative et citoyenne. Cette initiative s’inscrit enfin dans une vision de long terme, tournée vers la défense des droits des générations présentes et futures. En articulant mémoire, environnement et droits humains, l’Algérie pose les bases d’une approche globale de la justice historique, fidèle à son histoire et résolument tournée vers la transmission de la vérité.
M. Seghilani














































