Après plus d’un quart de siècle de tolérance et de silence, le parlement de l’Union européenne vient de voter, jeudi, un texte critique sur le Maroc l’appelant au respect des droits de l’Homme et au respect des libertés fondamentales.
Le texte et même s’il n’est pas contraignant traduit un changement de fond dans l’attitude de l’UE à l’égard du Maroc qui s’était offert le silence et la bénédiction de cette institution grâce au lobbying et à la corruption de certains députés. Il a été largement adopté par les députés à Strasbourg avec 356 voix pour, 32 contre et 42 abstentions. Il traduit une forme de condamnation des pratiques du Makhzen qui s’est ingéré, via des réseaux corrompus, dans le fonctionnement des commissions. Le Parlement européen demande « instamment aux autorités marocaines de respecter la liberté d’expression et la liberté des médias et d’assurer un procès équitable aux journalistes emprisonnés, notamment Omar Radi, Souleïmen Raïssouni et Taoufik Bouachrine ». Les députés demandent « leur libération provisoire immédiate et exigent la fin du harcèlement de tous les journalistes dans le pays, ainsi que de leurs avocats et de leurs familles ». En outre, le texte condamne fermement l’utilisation abusive par les autorités marocaines des allégations d’agression sexuelle comme moyen de dissuader les journalistes de faire leur travail ». C’est un changement de cap de l’Union européenne qui veut réparer son image grandement écornée par les révélations faites à l’occasion de l’enquête sur le Marocgate. Il faut préciser que jusqu’à jeudi matin, quelques heures avant le vote du texte, le Makhzen avait dépêché des députés pour tenter de faire barrage à l’adoption du texte ce qui renseigne sur ses pratiques. Il avait tenté de remettre en mouvement ses relais, qui observent un silence radio, depuis les révélations de la presse sur la toile tissée par le Maroc et conduite par le député Pier Antonio Panzeri, aujourd’hui incarcéré et qui s’est engagé à collaborer avec la justice pour faire toute la lumière sur cette affaire, qui a connu, mercredi, un nouveau rebondissement quand Panzeri, a avoué avoir participé activement à des actes de corruption en lien avec le Maroc. « Pier Antonio Panzeri a avoué mercredi avoir participé activement à des actes de corruption en lien avec le Maroc et donc avoir été corrompu et avoir corrompu d’autres personnes », a déclaré son avocat, Laurent Kennes, à Euronews. Le Parquet fédéral belge avait annoncé mardi que l’ex-eurodéputé italien, qui a fait trois mandats au Parlement européen, a signé un « accord de repentance » et s’est engagé, en contrepartie d’une réduction de peine, à partager des informations « substantielles et révélatrices » sur le système d’échange d’argent contre des faveurs. Dans le cadre de cet accord conclu avec la justice belge, Panzeri a également reconnu être un « dirigeant de l’organisation criminelle », explique Me Kennes, relevant que « cela ne signifie pas qu’il est le seul dirigeant ». « Cela signifie qu’il est au moins l’un des dirigeants d’une organisation dont l’un des objectifs était de corrompre les gens », a précisé l’avocat. Cela prouve que l’étau se resserre sur le Maroc qui devra s’expliquer dans les prochains jours sur ses pratiques criminelles qui ont dévoyé le parlement européen et l’ont aligné sur ses positions coloniales et de violations des droits de l’Homme. Lors de la plénière de jeudi du Parlement européen, les députés ont fermement condamné l’utilisation abusive, par les autorités marocaines, du logiciel espion Pegasus et exhortent également le pays à mettre fin à la surveillance numérique des journalistes, notamment via ce logiciel. Ils mandent aux États membres de l’UE de cesser d’exporter des technologies de surveillance vers le Maroc, conformément au règlement de l’UE sur les biens à double usage. Les députés s’engagent à enquêter pleinement et à traiter les cas de corruption impliquant des pays non membres de l’UE qui cherchent à acheter de l’influence au Parlement européen. C’est un véritable coup de massue que vient de recevoir le Makhzen qui pourrait dans les prochains jours recourir, comme il avait l’habitude de le faire, au chantage de l’immigration clandestine, en lâchant sur les côtes européennes des milliers de clandestins tout comme il l’avait fait en janvier 2022 contre l’Espagne quand près de 5000 marocains avaient envahi les plages de Ceuta et Melilla.
Slimane B.