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Hausse des prix des fruits et légumes : Une flambée et des interrogations

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C’est un mercredi matin passé au marché Meissonnier de la Capitale, Alger, où il fait un froid glacial. Ami Ali arrive à l’instant pour faire ses courses à la veille de la célébration du premier jour de l’an berbère, Yennayer.

Occasion pour les pères de famille de s’approvisionner en denrées alimentaires à l’effet de concocter le repas du dîner traditionnel partagé entre les membres de la famille. Chose sacrée chez les Algériens. Choisir les bons légumes et faire ses emplettes à l’entame de la journée semble le mot d’ordre sur lequel ne peuvent déroger les chefs de familles. Seulement, et exceptionnellement cette année, les pères de familles n’auront pas la tâche facile. En effet, faire ses courses est beaucoup plus synonyme d’un casse tête. S’adressant à un vendeur derrière une étale de légumes de ce marché, Ami Ali demande les prix de la tomate et de l’oignon. « 140 DA/kg la tomate et 50 DA/kg l’oignon ! », répond le vendeur. Une réponse sèche qui fait froid dans le dos pour beaucoup de clients. C’est la mercuriale ! Les prix s’envolent et s’avèrent inaccessibles pour les bourses moyennes. Force est de constater qu’en dépit des assurances du ministère du Commerce, selon lesquelles le taux de la TVA qui passe de 17 à 19% n’aura pas d’incidences sur le prix du produit à la consommation, les vendeurs continuent d’exercer leur diktat. Si non, comment expliquer le fait que les directives récentes du département de Bekhti Belaib, portant une instruction ferme adressée aux vendeurs et commerçants à l’effet d’éviter les augmentations illégales des prix, n’ont pas reçu d’oreille attentive. C’est le cas de le dire, puisque les marchés de détail des produits de large consommation dictent leur propre loi. C’est ce que montre la tendance en hausse observée en ce début de l’année comparativement au mois précédent. L’offre et la demande ne semblent pas une règle en cours sur les espaces de vente. Sur la place de ce marché situé au cœur de la Capitale, l’afflux des clients se fait rare. « Beaucoup de monde arrive, mais rebroussent aussitôt chemin si non repoussé par les prix en hausse vertigineuse. «De plus en plus, les citoyens ressentent les effets immédiats de la crise financière. Leurs petites bourses s’amenuisent peu à peu. Du coup, c’est cet état de fait porte préjudice à la consommation», déplore sur place un des clients accosté sur les lieux. À vrai dire, une simple virée dans le marché expliquerait les causes qui seraient derrière l’hésitation du client devant l’acte d’achat. Avec des carottes à 80 DA, des pommes de terre cédées entre 60 à 80 DA, des petits pois à 180 DA ou encore du poivron vert à raison de 140 DA le kg, les acheteurs n’ont pas vraiment l’embarras de choix. Le commun des consommateurs, comme en fait témoin Ami Ali, fait la tournée des étales en espérant tomber sur une marchandise plus accessible. «Je suis à la retraite depuis l’année dernière. Je touche une pension aussi maigre et j’ai à ma charge deux jeunes filles. Avec cette flambée des prix, je risque de me retrouver les poches vides à la fin du mois. Les temps sont dures…», a-t-il encore témoigné. Toutefois, Ami Ali n’est pas près à renoncer dès lors qu’il veut passer la fête de Yennayer. Ceci dit, malgré tout, il s’est dit être dans l’obligation de faire ses courses à même de permettre aux membres de sa famille de déguster le repas traditionnel de ce nouvel an Amazigh. Quitte à renoncer à l’achat du dessert et autres fruits de la saison. Les fruits justement, ils ne font pas exception. Les prix restent tout aussi inaccessibles même pour ceux dits «de saison» et «produits localement». À titre d’exemple, l’orange est cédée à 140 DA et la mandarine à 130 DA. Quant aux produits de l’importation comme la banane, pour la plupart des consommateurs, austérité oblige, il n’en est même pas question d’aller voir le prix. En fait, pour l’anecdote, ce fruit exotique revient sur toutes les langues, à chaque fois que la question de la crise financière est abordée, en raison de son prix défiant tout entendement. «L’État n’est pas obligé de continuer à subventionner l’importation de la banane», pour rappeler les propos du ministre du Commerce. Au marché de Meissonnier comme celui de Clauzel, à quelques encablures de là, il est impossible d’acheter des bananes au dessous de 500 DA. Même cas pour les autres fruits, comme les pommes qui sont cédées entre 200 et 300 DA, contre 150 DA pour celles produites localement. Quant aux fraises, leur prix a atteint 350 DA. Un vendeur de fruits et légumes tente d’expliquer la hausse des prix en arguant : «pour cette semaine et à cause des conditions météorologiques et la chute des pluies, les agriculteurs éprouvent de la peine à cueillir leurs cultures. C’est pour cela que les prix s’envolent. Comme pour la salade verte qui était la semaine passée à 70 DA, alors qu’elle se vent aujourd’hui à 140 DA. Les épinards aussi (250 DA)». Les consommateurs, quant à eux, ne partagent pas le même avis. «Faute de régulation, les vendeurs d’ici s’octroient les marges bénéficiaires qui leur conviennent. Des bénéfices au dessus de ceux légalement autorisés. Ils vendent la marchandise plusieurs fois à un même prix. Voyez par exemple la pomme de terre. Il l’achète à 20/ 25 DA et ils la revendent à 60 DA», regrette un père de famille interrogé à ce propos. Dans ces marchés, on observe que les stands réservés à la vente des viandes blanches et rouges sont presque boudés par les acheteurs. Les prix affichés ne laissent aucune marge pour négocier. La volaille atteint 350 DA/ kg et la dinde affiche 590 DA/kg. Les œufs sont cédés 450 DA le plateau. Pour la viande bovine, elle est cédée entre 850 et 1 500 DA/kg. Et aux clients de faire leur calculs ! Approchant un boucher sur les raisons de cette flambée, celui-ci ne tarde pas à réagir : «à quel résultat s’attendent les autorités après avoir relevé le taux de la TVA à 19 % ? Que l’on travaille gratuitement et pour rien ? On voulait nous désigner comme les boucs émissaires. Non ! Nous aussi, nous avons des bouches à nourrir. Nos responsables semblent vivre sur la planète Mars !», dira ce commerçant l’air mécontent sur son sort. «Les prix sont raisonnables. C’est vrai que les gens achètent moins. Mais, c’est une tendance maintenant. Ils achètent des quantités moindres comme des tranches de viandes. Le comportement du consommateur a changé», tente d’expliquer pour sa part un autre boucher.
Hamid Mecheri

La version du ministère du Commerce
Les opérations de contrôle menées par les services du ministère du Commerce depuis ces derniers mois n’ont pas révélé l’existence de stocks de marchandises dissimulés à des fins spéculatives, a indiqué un responsable de ce ministère, réfutant une hausse générale des prix de produits alimentaires. « Parler de hausse générale des prix est un constat biaisé. La hausse n’a pas touché tous les prix », a déclaré à l’APS le directeur général du contrôle économique et de la répression des fraudes auprès de ce ministère, Abderrahmane Benhazil. Selon lui, la hausse de la TVA, qui est passée de 17 à 19% dans le cadre de la loi de finances 2017, « ne peut en aucun cas provoquer une flambée des prix. D’ailleurs, les augmentations constatées pour quelques produits seulement sont insignifiantes ». « La hausse de la TVA est insignifiante et ne peut en aucun cas engendrer une hausse des prix. La réalité sur le terrain est que les prix de large consommation soutenus par l’Etat ou non, n’ont pas connu d’augmentations », affirme-t-il. A ce propos, il soutient que les interventions quotidiennes des services du ministère du Commerce n’ont révélé, depuis l’entrée en vigueur des dispositions de la loi de finances 2017, que quelques augmentations pour certains produits laitiers et maraîchers.
« Les prix de ces produits ne sont pas fixés par la loi contrairement à ceux subventionnés par l’Etat. Il ne peut y avoir d’infractions s’il n’y a pas une loi régissant ces prix. Donc, ce sont des prix libres », avance-t-il. Même les produits de base non subventionnés comme les pâtes alimentaires ou quelques légumes secs n’ont pas été touchés par des hausses, observe le même responsable. Quant à l’augmentation, depuis fin 2016, des prix du café, des lentilles et des pois chiches, Benhazil l’explique par le renchérissement des cours de ces produits sur les marchés internationaux à l’instar du café passé de 1.850 dollars/t à la fin 2015 à 2.150 dollars/t à la fin 2016 pour le café Robusta, et de 2.811 dollars/t à 3.250 dollars/t pour l’Arabica. Pour les lentilles et les pois chiches, les prix sont remontés, respectivement, de 946 dollars/t à 1.150 dollars/t et de 1.168 dollars/t jusqu’à 1.700 dollars/t entre les deux périodes de comparaison. « Ce sont des choses que nous ne pouvons pas maîtriser car elles dépendent des marchés internationaux », soutient-il. Néanmoins, même si les prix mondiaux de la poudre de lait ont diminué en passant de 2.834 dollars/t à 2.300 dollars/t, cette baisse ne s’est pas répercutée sur les prix au niveau du marché national. Par ailleurs, fait savoir Benhazil, sur les 4.304 chambres froides existantes, 85% ont été contrôlées durant ces trois derniers mois (3.680 chambres).
« Les interventions ont relevé l’inexistence de stocks détenus à des fins spéculatives », assure-t-il. Pour lui, les augmentations des prix constatées pour certains produits agricoles sont dues plutôt au manque de l’offre sur le marché, un constat normal durant cette période hivernale. Concernant le contrôle des prix des produits subventionnés ou réglementés, les interventions du ministère ont donné lieu à la constatation de 1.948 infractions (liées au non respect des prix) durant les dix premiers mois de l’année 2016 contre 2.900 infractions durant la même période de 2015.

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