Ce week-end a été marqué par une activité soutenue des partis ; de ceux considérés comme du/ou proches du pouvoir, comme de ceux se réclamant de son opposition. Une activité qui a confirmé une donnée récurrente dans le comportement de l’opposition.
à savoir que, globalement, elle se trouve dans la position d’un boxeur largement dominé par son adversaire et qui, de ce fait, se contente de répondre aux coups de celui-ci. Ce qui s’est vérifié une nouvelle fois ce week-end. L’argumentaire développé par tous les responsables de cette frange de l’échiquier politique national n’a été, en effet, qu’une suite de réponses à celui développé aussi bien par des responsables du gouvernement que par des responsables de formations politiques de « l’autre bord », pour expliquer et, dans certains cas, justifier les choix faits par le pouvoir dans les domaines politique et économique. Des réponses qu’ils enrobent, à l’évidence, pour mieux les faire passer auprès d’une opinion publique de plus en plus réfractaire au discours carrément négativiste qu’ils développent, des traditionnelles critiques qu’ils lui portent. Un travers auquel n’a pu échapper le président de Talaie el houriat (l’Avant-garde des libertés) et, néanmoins, ancien chef du gouvernementdurant une bonne partie de la première mandature du président de la République en poste. Animant, vendredi dernier, un meeting dans la capitale des Zibans, Biskra, Ali Benflis s’est en effet, laissé aller dans une référence claire aux mesures prises par le gouvernement pour faire face à la crise induite par la baisse des prix du pétrole et à peine voilée, en gros -le Président a parlé de 120 milliards de dollars à investir d’ici 2030- investissements annoncés dans le seul secteur des énergies renouvelables, a accusé le pouvoir « de faire (au peuple) des promesses trompeuses (…) et de (le) nourrir d’illusions et de faux espoirs ». Faut-il le préciser, en s’abstenant de dire en quoi les mesures prises et celles annoncées pouvaient être « trompeuses » pour le peuple au point de le « nourrir d’illusions et de faux-espoirs ». Une exigence que le président de Talaie el houriat a allègrement enjambé pour sortir un des refrains favoris de l’opposition ; celui décrétant, sans aucune autre forme de procès, que « le système (parce qu’il) est dépassé par les profondes mutations que connaît notre société (…) est arrivé en fin de parcours ». Une sentence qui lui permet d’en décréter une autre que, de ce fait, «il ne correspond plus aux attentes et aux besoins » des Algériens ; et, en filigrane, qu’il doit partir. Comme pour souligner l’incontournable nécessité de cette issue, Ali Benflis a péremptoirement ajouté, là aussi sans autre preuve que ses déclarations, que «le système condamne notre pays à l’immobilisme et à la stagnation ». Des propos qu’il n’oublie pas «d’agrémenter », au passage, de son habituelle pique, à l’adresse du président Bouteflika et en référence à sa maladie, «de vacance du pouvoir». Moins caustique mais tout aussi critique – à l’égard du pouvoir, s’entend – que l’ancien chef du gouvernement, Abderrezak Mokri, président du HMS, qui s’est néanmoins livré, avant-hier à Guelma, quasiment au même exercice : tirer à boulets rouges sur le pouvoir, à savoir, en basant son argumentaire sur des généralités que ne dédaigneraient pas les habitués de discussions de café. En déclarant à un public acquis que « le pouvoir a gaspillé allègrement des centaines de milliards de dollars durant ces quinze dernières années » ; qu’il «a opté pour la paix sociale au lieu de consolider les secteurs stratégiques » ; que «l’argent du peuple a été distribué à des centaines de milliers de jeunes dans le cadre de l’ANSEJ, et ce, au détriment du développement national » ; que « Abdelmalek Sellal a déclaré récemment que le pays est entré dans une conjoncture économique difficile alors que l’année dernière, il prétendait qu’il était à l’abri des retombées de la chute des prix du pétrole » ; et que « le programme du président de la République est échec, puisque le recours à l’endettement, même intérieur, est préconisé par le pouvoir », Abderezak Mokri n’a pas fait autre chose. Et ce, n’est pas le rappel, à l’évidence, en réponse à des responsables du RND qui l’avaient qualifié, il y a quelques jours, de «DAECH politique», de la contribution de son parti « à la lutte contre le terrorisme » et de sa « participation à la réconciliation nationale pour éteindre la fitna et engendrer la paix en Algérie », qui donnerait plus de poids, auprès de l’opinion publique, aux généralités professées ; une opinion publique qui, en cette conjoncture difficile, est en droit d’attendre un discours, à défaut d’être sécurisant, devrait, à tout le moins, être plus instructif ; politiquement, s’entend.
Cette absence de réalisme dans le discours politique transparaît également, bien qu’à un degré nettement moindre, dans les propos du secrétaire général du mouvement El-Islah. Enjambant allègrement les dissensions existantes entre ses composantes -des dissensions auxquelles, selon des informations persistantes, n’échappent pas à la CNLTD- Filali Rouini a, non moins allègrement, prédit dans une déclaration à la presse faite hier en marge de la réunion du Majliss Echoura de son parti, que « le prochain congrès de l’opposition sera couronné par une feuille de route et une vision politique qui tracera la démarche à suivre pour la prochaine étape ». Comme langue de bois, il n’y a pas mieux…
Mourad Bendris