Cent-quarante-cinq organisations de défense des droits humains, survivants et proches de victimes de l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth, ont appelé mercredi le Conseil des droits de l’homme de l’ONU à une enquête internationale indépendante sur le drame, déplorant l' »échec » de l’enquête locale.
L’explosion survenue le 4 août 2020, et imputée de l’aveu même des autorités au stockage sans mesures de précaution d’énormes quantités de nitrate d’ammonium, a fait au moins 214 morts, plus de 6.500 blessés, et dévasté des quartiers entiers de la capitale. Les autorités libanaises ont rejeté d’emblée toute enquête internationale, alors que l’enquête locale continue de piétiner plus d’un an plus tard, dans un contexte de fortes pressions politiques. De hauts responsables politiques, sécuritaires et judiciaires étaient conscients des dangers de cette substance hautement volatile sans prendre aucune mesure préventive, selon des ONG internationales. Dans une lettre conjointe, les 145 signataires, dont Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International, ont appelé les Etats membres du Conseil des droits de l’homme des Nations unies à « établir une mission d’enquête internationale indépendante et impartiale à l’instar des missions d’enquête d’un an » mises en place par l’ONU. Les proches des victimes et des survivants « lancent un nouvel appel au Conseil des droits de l’homme pour qu’il mette en place d’urgence une mission d’enquête sur l’échec de l’Etat libanais à protéger leurs droits », a affirmé Aya Majzoub, de HRW. « Plus d’un an après l’explosion, les dirigeants libanais continuent d’entraver, de retarder et de saper l’enquête locale », a-t-elle ajouté. La lettre déplore « l’échec de l’enquête locale » et « l’obstruction éhontée des autorités » qui démontrent, selon ses signataires, « la culture d’impunité qui existe depuis longtemps au Liban (…) et la nécessité d’une enquête internationale ». Une lettre similaire avait déjà été adressée en juin au Conseil des droits de l’homme de l’ONU par 115 organisations et représentants des survivants et proches des victimes de l’explosion du port. Le premier juge chargé d’enquêter sur l’affaire, Fadi Sawan, a été dessaisi de ses fonctions, après l’inculpation de hauts responsables. Son remplaçant, Tareq Bitar, fait également face à des obstructions, notamment le refus du Parlement de lever l’immunité de certains députés. Le 26 août, M. Bitar a émis un mandat d’amener à l’encontre de l’ancien Premier ministre, Hassan Diab, après son refus de se présenter à un interrogatoire, avant d’émettre un nouveau mandat similaire mardi. Mais celui-ci se serait rendu aux Etats-Unis pour une visite familiale, selon des médias locaux.