Six mois après le premier concert donné à Cuba par le groupe anglais, une retransmission exceptionnelle était proposée dans les salles de cinéma.
Les spectateurs d’un millier de salles de cinéma dans le monde – dont près de 200 en France – étaient vendredi soir pendus aux lèvres charnues de Mick Jagger. Six mois quasiment jour pour jour après le premier concert des Rolling Stones à Cuba, les images de celui-ci étaient diffusées dans le cadre d’une projection unique. L’objet sera édité dès le 11 novembre prochain en audio et en vidéo, avant un possible nouvel album studio du vieux groupe anglais.
Dans la salle du Publicis des Champs-Elysées, Philippe Manœuvre, tel qu’en lui-même, prend la parole pour présenter le film intitulé Havana Moon – d’après une chanson de leur maître Chuck Berry. Le journaliste remarque avec malice que le groupe n’a donné que quatre concerts gratuits au cours de sa longue carrière: ceux de Hyde Park et Altamont en 1969, un à Rio en 2006, et celui du 25 mars dernier à La Havane, devant un public estimé entre 500 000 et 1,2 million d’âmes. Bref et efficace, le rock-critic cède sa place au film, acclamé avec une liesse digne d’un concert.
58 camions pour 500 tonnes de matériel ayant nécessité 21 jours de montage: voilà pour les chiffres. En cinq questions, les quatre Stones, sur l’écran, détaillent les conditions de cette date. Les images de la Havane sont saisissantes. L’irruption de matériel high-tech dans les rues remplies de voitures américaines des années 1950 est bluffante. Charlie Watts décrit une ville «délabrée mais toujours debout», un peu comme les membres de son groupe.
Les morceaux défilent devant un public qui porte l’enthousiasme des premières fois. Jagger, très impressionnant, établit un dialogue nourri avec la foule, dans un bon espagnol. «Nous voici enfin!» s’exclame-t-il. Watts, impassible assure la rythmique avec aplomb. Le vieux pirate Keith Richards est fatigué, l’ectoplasme Ronnie Wood simplement fatiguant et inutile, comme à son habitude. Jumpin Jack Flash, Angie, Paint It, Black, et Honky Tonk Women ont résonné dans le stade alors que vient le temps des présentations. Les morceaux ont sans doute été refaits en studio, mais les tubes scintillent.
Jagger introduit Charlie «Che» Watts et Keith Richards, en chemise au rouge révolutionnaire. Une séquence d’autocongratulation mutuelle sans intérêt («Mick est formidable, Keith est merveilleux, Charlie est impérial», ce genre) précède le temps des rappels. Jagger, en casquette moche, court, se tortille et danse comme un beau diable de 72 ans à la santé insolente. Les visages de fans cubains frappés par la foudre rock’n’roll sont beaux et émouvants.