Les conséquences de la chute des cours du pétrole deviennent de plus en plus lourdes pour les pays producteurs. Les annulations de projets se multiplient dans l’industrie pétrolière, dans plusieurs pays, y compris l’Algérie, confrontée à une chute vertigineuse des cours, depuis juin qui grève les comptes des compagnies et entraîne des suppressions d’emplois, particulièrement en mer du Nord.
Par exemple, le géant BP a annoncé, jeudi dernier, une coupe de 300 emplois en mer du Nord, essentiellement des postes basés dans la ville écossaise d’Aberdeen, la «capitale» pétrolière britannique, un mois après avoir enregistré des charges supplémentaires d’un milliard de dollars. Plusieurs majors du secteur, comme l’Anglo-Néerlandaise Shell et les Américaines Chevron et ConocoPhillips, avaient déjà annoncé dernièrement des suppressions d’emplois d’ampleur comparable, mais l’annonce de jeudi prend un relief particulier à la lumière du plongeon de 60% des cours du Brent depuis juin.
Mercredi, les compagnies Qatar Petroleum et Shell ont annoncé à leur tour l’abandon d’un important projet pétrochimique au Qatar, d’une valeur de 6,4 milliards de dollars, tandis que la Norvégienne Statoil renonçait à trois licences d’exploration au Groenland dans l’océan Arctique. Une situation qui devient de plus en plus inquiétante pour l’Algérie qui compte un bon nombre de compagnies étrangères dans l’investissement pétrolier comme Shell, Statoil, Enel, Dragon Oil, ENI, Repsol et BP. La question qui se pose aujourd’hui, est-ce que ces compagnies qui sont installées en Algérie pourraient réduire les postes d’emploi ? Ou plutôt la décision reviendrait à Sonatrach qui gère les projets à plus de 51%. Notons d’ailleurs que depuis quelques temps, les compagnies pétrolières étrangères installées en Algérie, au moins six grands groupes pétroliers étrangers, ont réduit leur personnel et participent rarement aux appels d’offres pour la prospection et l’exploration d’hydrocarbures. Ces compagnies sont Repsol, Gas Natural, Anadarko, Shell, British Petroleum (BP) et Eni. En 2011, faut-il le rappeler, ces entreprises étrangères ont décidé de ne pas renouveler les contrats de travail de milliers de travailleurs qui étaient employés dans l’activité exploration. De son côté, Shell a décidé d’effectuer un plan social en Algérie afin de réduire ses charges dans les activités de recherche et d’exploration, en suivant les exemples de plusieurs autres groupes pétroliers, notamment BP. Aussi, Saipem (filiale du groupe italien ENI) a réduit sa présence en Algérie depuis l’éclatement du scandale de corruption au sein de Sonatrach en janvier 2010. Toutes les sociétés étrangères de services pétroliers ont dégraissé leur personnel, excepté Technip qui a obtenu le projet de modernisation de la raffinerie d’Alger. La décision de ces entreprises de réduire leur présence en Algérie est due notamment aux difficultés liées à l’investissement étranger et aux problèmes de paiement avec Sonatrach.
L’autre explication du manque d’intérêt des majors pétroliers au marché algérien est liée à la crise économique mondiale. S’ajoute à ces problèmes la chute des cours du pétrole, qui va avoir des retombées négatives sur la production et le chiffre d’affaire de ces compagnies étrangères. Les spécialistes prévoient donc un autre dégraissement de leur personnel même si pour l’instant aucune information n’est sortie dans ce sens. Au-delà des compagnies, plusieurs pays producteurs de pétrole comme l’Algérie souffrent de la dégringolade des cours, provoquée par une surabondance de production et une demande en berne à cause du ralentissement économique mondial. D’ailleurs, l’Agence internationale de l’Énergie (AIE) vient d’enfoncer le clou en prévoyant que les cours du pétrole pourraient encore baisser et un rebond ne paraît pas imminent.
Dans son rapport mensuel publié vendredi, l’AIE écrit que les stocks vont continuer à croître durant le premier semestre 2015. Elle ajoute toutefois que la faiblesse des cours finira par contracter l’offre et développer la demande.
«Personne ne sait jusqu’où le marché va descendre avant d’atteindre un plancher. Mais l’orientation à la vente a un impact», écrit l’AIE.
«Un redressement des cours, sauf perturbation majeure, ne devrait pas être imminent mais les signaux s’accumulent pour indiquer que la tendance va se retourner.» «Un rééquilibrage devrait commencer dans la deuxième partie de l’année», poursuit l’agence. Aussi, l’AIE a réduit ses prévisions pour 2015 concernant la croissance de la production pétrolière des pays non-membres de l’Opep de 350 000 barils par jour (bpj) à 950 000 bpj, après une croissance record de 1,9 million de bpj en 2014. Concernant les pays de l’Opep l’AIE a relevé son estimation de la demande de brut de 300 000 barils par jour à 29,2 millions de bpj, un chiffre encore inférieur à la production de l’organisation, qui a atteint 30,48 millions de bpj le mois dernier.
Ines B.