En fonction de son état de santé et de l’évolution de son diabète, pratiquer un jeûne répété sur plusieurs jours présente des risques de complication pour le jeûneur. Quels sont les effets du jeûne sur la personne diabétique ? Comment le faire dans de bonnes conditions ? Quelles sont les indications médicales et les contre-indications ? Telles étaient les questions posées par des jeûneurs lors d’une récente émission radiophonique. Un spécialiste a tenu à apporter des éléments de réponse à cette problématique qui intervient à la veille de chaque mois de Ramadhan. Il faut noter que de nombreuses personnes font fi des recommandations de leurs médecins et optent pour le jeûne au péril de leur santé. Conséquences : les services des urgences des différents hôpitaux de la wilaya reçoivent quotidiennement des malades en phase d’hypoglycémie ou d’hyperglycémie, mais aussi confrontés à une forte déshydration. Le diabétologue, le Dr Nouioua, de l’hopital «Zighout-Youcef» de Ténès a indiqué que : «lorsque l’on jeûne, la quantité de glucose circulant diminue, la production d’insuline aussi et, sous cette action, le foie va commencer à libérer ses réserves. Mais les réserves hépatiques ne sont pas infinies et ne permettent de couvrir qu’environ 24h de jeûne. Après ces 24h, d’autres mécanismes se mettent en marche : du glucose peut ainsi être fabriqué à partir des protéines (muscles) ou des acides gras (tissu graisseux).Ainsi, la production de glucose va se poursuivre jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de substrat… Si le jeûne se poursuit trop longtemps, ces phénomènes adaptatifs vont être dépassés, la production d’ATP deviendra insuffisante et les conséquences vont se faire sentir». Le Dr Nouioua souligne que «lors du Ramadhan, au coucher du soleil, l’alimentation et l’hydratation sont de nouveau autorisées. Le risque est la surcharge d’apports alimentaires, dont les conséquences peuvent être l’hyperglycémie et la décompensation métabolique aigüe chez les personnes qui prennent leur traitement à des doses parfois inadaptées (au regard de leurs apports caloriques majorés). Elles risquent dans ce cas d’être carencées en traitement de par ces apports caloriques importants. Le risque est d’autant plus grand pour ceux ou celles qui ont un diabète de type 2, et dont la glycémie a augmenté à 3, voire 4 g/l : l’hyperglycémie se manifestera par une soif intense et une envie fréquente d’uriner. Une quantité élevée de glucose circulera dans son sang et l’organisme, en manque d’insuline, ne pourra plus utiliser ce glucose pour nourrir ses cellules. L’organisme va alors dégrader les graisses pour survivre et produire de l’acétone. Cette dernière (l’acétone) va acidifier le sang et, si rien n’est entrepris, le patient va donc arriver en état d’acidocétose avec nécessité d’apport urgent d’insuline (la plupart du temps en milieu hospitalier). Il s’agit d’une grave complication du diabète. Il existe également un risque non négligeable de déshydratation, surtout en période de chaleur, ce phénomène peut être accentué par l’hyperglycémie (urines fréquentes et abondantes) précise le diabétologue. Par ailleurs, sur un volet strictement religieux, il faut savoir que les règles concernant la dispense du Ramadhan sont très clairement indiquées dans le Coran : La Sourate II verset 183 précise : «Si le jeûne peut altérer de manière significative la santé du jeûneur ou lorsque la personne est malade, l’Islam l’exempte du jeûne». Dans la Sourate II, verset 185 il est dit : «Allah cherche à vous faciliter l’accomplissement de la règle, il ne cherche pas à vous la rendre difficile». Cette autre Sourate est plus claire pour les malades : «Celui d’entre vous qui est malade ou qui voyage jeûnera ensuite un nombre égal de jours» et enfin celle-ci ou Allah montre comment compenser ce jeûne par une action de bienfaisance par la Sourate II verset 184 : «Ceux qui pourraient jeûner et qui s’en dispensent devront, en compensation, nourrir un pauvre». toutefois le Dr Nouioua préconise la consultation d’un diabétologue rompu à ce type de questions avant le début du Ramadhan, car malheureusement, aujourd’hui les patients ne sont pas toujours bien conseillés et orientés par manque d’informations sur la pratique du Ramadhan : soit le médecin consulté déconseille systématiquement le jeûne, soit il laisse le libre choix au patient de gérer son traitement durant le jeûne.
Bencherki Otsmane