Renée Claude n’est plus. Une mort annoncée qui ne finit pas comme prévu. L’alzheimer, en dix ans, aura fait son œuvre, mais c’est la COVID-19 qui l’aura finalement emportée, dans le CHSLD où son état l’avait inexorablement menée. Un choc qui s’ajoute à la tristesse. Ce faisant, la grandissime interprète a trouvé, à 80 ans, « la seule vraie tranquillité / le grand repos / l’immobilité », comme elle le chantait dans Tu trouveras la paix, sur les mots et la musique de Stéphane Venne.
Née Renée Bélanger en 1939, elle apparait à la télé dès 1959, Renée Claude devient la muse des chansonniers Jean-Paul Filion, Hervé Brousseau, Claude Léveillée, Christine Charbonneau et Gilles Vigneault, et d’un tout jeune Sylvain Lelièvre. Elle revient souvent à Brassens et à Ferré, soutient Clémence et Ferland. C’est une chanteuse en mission. Son timbre si caractéristique, son phrasé clair, sa justesse de ton servent idéalement les textes et les mélodies, permettant au milieu chansonnier d’atteindre un plus grand public. Elle est notre Juliette Gréco à nous (jusqu’au nez légèrement refait), elle peut tout chanter noblement.
Les prix s’amoncellent récompensant des chansons qui se suivent au sommet des classements, sans rien lui enlever de sa crédibilité d’interprète auprès des chansonniers. Ces chansons prennent valeur d’hymnes identitaires et féministes : C’est notre fête aujourd’hui, Le tour de la Terre, La rue de la Montagne, Tu trouveras la paix et tout particulièrement Le début d’un temps nouveau : « La moitié des gens n’ont pas trente ans / Les femmes font l’amour librement ». La muse des chansonniers est devenue l’héroïne d’une génération. Avec le parolier Luc Plamondon (sur des musiques de Germain Gauthier, André Gagnon, Yves Laferrière, Michel Robidoux, Léon Aronson, Christian St-Roch, entre autres), elle ira plus loin encore : Ce soir je fais l’amour avec toi, La bagomane, Un gars comme toi célèbrent l’affranchissement sexuel, une vie sans contraintes. Il n’y aurait pas eu Diane Dufresne sans Renée Claude.
Avec elle, tout devenait possible, y compris les excès.
L’euphorie des années 1970 s’éteint quelque peu au moment du premier référendum, en 1980. Renée Claude relance alors sa mission d’interprète et consacre un spectacle aux chansons de Clémence DesRochers : Moi, c’est Clémence que j’aime le mieux. Elle créera ainsi plusieurs spectacles centrés sur un répertoire, révélant la beauté mélodique d’un Brassens comme personne ne l’avait fait avant elle (J’ai rendez-vous avec vous, en 1981). Spectacles qu’elle alternera, ajoutant On a marché sur l’amour, florilège des chansons connues et moins connues de Ferré.