Une commission du Sénat a approuvé ce vendredi, par 15 votes contre 5, un rapport préconisant la suspension de la présidente de gauche. Ce vendredi, une commission du Sénat a approuvé par 15 votes contre 5 un rapport préconisant la suspension de la présidente de gauche Dilma Rousseff, qui pourrait être appliquée dès la semaine prochaine et ouvrir la voie à sa destitution. Dans la mesure où ce rapport serait validé par un vote à la majorité simple de l’assemblée plénière du Sénat, Dilma Rousseff serait automatiquement écartée du pouvoir pendant un délai maximum de six mois, en attendant un jugement final, et remplacée par son vice-président Michel Temer.
Cette issue ne fait d’ores et déjà pratiquement plus aucun doute, une cinquantaine de sénateurs sur un total de 81 ayant déjà annoncé un vote défavorable à la présidente lors de cette session fixée mercredi prochain et qui pourrait s’étendre jusqu’à jeudi. Michel Temer, dirigeant du grand parti centriste PMDB qui a rompu en mars avec le camp présidentiel, se prépare déjà à former un gouvernement axé sur le redressement économique du géant d’Amérique latine qui traverse depuis 2015 sa pire récession depuis les années 1930. L’opposition de droite accuse la présidente d’avoir commis un «crime de responsabilité» en maquillant les comptes publics pour camoufler l’ampleur des déficits, en 2014, année de sa réélection, puis en 2015. Dilma Rousseff se défend en assurant avoir agi comme tous ses prédécesseurs et dénonce un coup d’État institutionnel. Mais ses arguments n’ont pas convaincu la chambre des députés qui, en avril, a voté à une écrasante majorité la poursuite de la procédure de destitution.
«Présidente élue»
Dilma Rousseff, 68 ans, a réaffirmé vendredi qu’elle n’avait aucune intention de démissionner. «Nous vivons un impeachment sous forme de coup d’État. Ce qui est en jeu est une élection indirecte déguisée en destitution et ceux qui sont en train d’usurper le pouvoir, comme malheureusement le vice-président de la République, sont complices d’un processus extrêmement grave», a déclaré Dilma Rousseff, première femme élue à la tête du Brésil. «Je suis la présidente élue, je n’ai commis aucun crime et, si je démissionne, j’enterre la preuve qu’il s’agit d’un coup d’État, sans base légale, qui veut en finir avec les conquêtes (sociales) de ces 13 dernières années. Je résisterai jusqu’au dernier jour», a lancé cette ancienne guérillera emprisonnée et torturée sous la dictature militaire (1964-1985).
À moins de trois mois des Jeux olympiques, qui démarreront le 5 août à Rio de Janeiro, le Brésil est totalement accaparé par la bataille autour de l’impeachment.
Il vit aussi au rythme des révélations autour du méga-scandale de corruption Petrobras, qui éclabousse une grande partie de l’élite politique. Pendant que Dilma Rousseff lutte pour sa survie politique, ses plus proches alliés – comme son prédécesseur et mentor Lula – mais aussi ses plus féroces ennemis sont peu à peu visés par l’enquête. Le réseau de pots-de-vin aurait détourné du groupe public pétrolier plus de deux milliards de dollars et alimenté les campagnes électorales du Parti des travailleurs (PT) au pouvoir et de ses anciens alliés, au premier rang desquels le PMDB du vice-président Temer. Jeudi, c’est le controversé président du Congrès des députés, Eduardo Cunha, artisan de la procédure de destitution, qui a été écarté de ses fonctions par le Tribunal suprême pour entrave aux enquêtes judiciaire et parlementaire le visant dans le cadre de ce dossier.
Paralysie du pouvoir
Eduardo Cunha, allié de Michel Temer, ennemi juré de Dilma Rousseff et considéré comme l’un des hommes politiques les plus puissants du Brésil, est accusé par la justice de détenir des comptes secrets en Suisse et d’utiliser ses alliés pour demander des pots-de-vin à des entreprises liées à Petrobras. Parmi les hautes figures de l’État, seul Michel Temer échappe pour le moment à l’enquête Petrobras, bien qu’il ait été cité par des inculpés comme bénéficiaire de pots-de-vin.
Il risque par ailleurs d’être déclaré inéligible pour huit ans après sa condamnation, cette semaine, en appel à des amendes pour dons excessifs à des campagnes électorales. Cela pourrait bloquer son éventuelle candidature à la présidence en 2018, à la fin du mandat actuel.