L’ex-président du Congrès des députés brésiliens, Eduardo Cunha, à l’origine de la procédure de destitution controversée de l’ex- présidente Dilma Rousseff, a été destitué par ses collègues parlementaires, lundi, pour avoir nié l’existence de comptes bancaires lui appartenant à l’étranger. «Je déclare la perte du mandat du député Eduardo Cunha pour conduite incompatible avec le mandat parlementaire», a annoncé l’Assemblée dans un jugement rendu dans l’enceinte après le vote.
Celui-ci est sans appel: sur 470 députés présents, il y a 450 votes en faveur de la destitution, 10 contre et 9 absentions, le président n’ayant pas voté. M. Cunha a assuré lui-même sa défense au cours de la session, imitant en cela Mme Rousseff dans la dernière phase de son procès politique.
«Je n’ai pas menti, il n’y a pas de compte», a-t-il déclaré, ajoutant: «Où est la preuve? Il n’y a pas de preuve (…) Ne me jugez pas en fonction de ce que dit l’opinion publique».
Ce député évangélique ultra-conservateur de 58 ans était accusé d’avoir «menti» à ses pairs, en niant avoir été titulaire de comptes bancaires secrets à l’étranger, devant une commission d’enquête parlementaire sur le scandale de corruption autour de la compagnie pétrolière publique Petrobras.
L’enquête judiciaire a, par la suite, permis de découvrir qu’il était titulaire d’au moins un compte bancaire secret en Suisse sur lequel avaient transité environ cinq millions de dollars d’origine suspecte.
Ce Machiavel brésilien aux cheveux poivre et sel et aux costumes italiens impeccables avait déclenché en décembre 2015 la procédure de destitution contre Dilma Rousseff, en représailles au vote des députés de son Parti des travailleurs (PT, gauche) pour son propre renvoi devant la Commission d’éthique du Parlement. Ce personnage central de la crise politique brésilienne, ennemi juré de l’ex-dirigeante de gauche, avait été suspendu le 5 mai de ses fonctions de président de l’Assemblée par le Tribunal suprême fédéral (STF). Personnage extrêmement influent ayant fédéré autour de lui les secteurs les plus conservateurs du Parlement, Eduardo Cunha a incarné l’aile dure du Parti du Mouvement démocratique brésilien (PMDB, centre-droit) de l’actuel président Michel Temer, qui a succédé le 31 août à Dilma Rousseff, destituée de ses fonctions pour maquillage des comptes publics. M. Cunha a usé pendant 11 mois d’incessants subterfuges pour freiner la procédure qui pourrait lui faire perdre son mandat, mais a été abandonné par un grand nombre de ses anciens soutiens.
Dimanche, 300 députés (sur un total de 513) avaient indiqué au quotidien O Globo qu’ils voteraient pour la révocation du mandat de M. Cunha. Le minimum requis était de 257. «Je suis en train de payer le prix pour que le Brésil se soit libéré du PT. Ils me font régler l’addition de la destitution (de Dilma Rousseff) que j’ai acceptée, ce que personne d’autre n’était capable de faire à ce moment-là», s’est-il défendu après avoir rappelé qu’au moins 160 autres parlementaires faisaient aussi face à des enquêtes judiciaires. Il a également déclaré que personne, quelle que soit la décision que prendrait le Congrès, ne lui enlèverait «le plaisir que ce gouvernement criminel s’en soit allé». Chacune de ses attaques contre l’ancienne présidente a été accompagné de quelques applaudissements.
Dilma Rousseff accuse M. Cunha et son ancien vice-président Michel Temer d’avoir orchestré un «coup d’Etat» parlementaire à son encontre et continue de clamer son innocence.