La communauté internationale va devoir convaincre Pékin, premier partenaire économique de Pyongyang, de se joindre à la résolution du Conseil de sécurité. Les provocations de Kim Jong-un ne passent pas.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a condamné le cinquième essai nucléaire mené vendredi par la Corée du Nord et a décidé de préparer une nouvelle résolution imposant des sanctions à Pyongyang. Dans une déclaration unanime, ses 15 membres, dont la Chine alliée de Pyongyang, indiquent qu’ils vont « commencer immédiatement à travailler sur des mesures appropriées, selon l’article 41 de la Charte de l’ONU, et sur une résolution du Conseil ». L’article 41 concerne « des mesures n’impliquant pas l’utilisation de la force armée».
Les États-Unis, la France et le Japon ont réclamé de nouvelles et lourdes sanctions contre la Corée du Nord. De leur côté, les médias sud-coréens apparaissaient samedi partagés entre l’idée de durcir la riposte internationale ou, au contraire, de changer radicalement de stratégie face à l’entêtement de la Corée du Nord. Celle-ci est frappée depuis mars par de très sévères restrictions économiques, financières et commerciales, à la suite de son quatrième test atomique mené en janvier. Washington et Pékin avaient mis deux mois à mettre au point cette résolution.
L’ambassadeur chinois Liu Jieyi s’est montré très prudent vendredi, estimant qu’il fallait « s’abstenir de toute provocation des deux côtés». Or, pour imposer de nouvelles sanctions ou appliquer strictement celles existantes, il faudra compter sur la bonne volonté de Pékin, premier partenaire économique de Pyongyang.
Des avis divergents
Les résolutions de l’ONU interdisent au Nord toute activité nucléaire ou balistique et cinq séries de sanctions internationales ont visé le pays depuis son premier test atomique en 2006.
Le président américain Barack Obama a indiqué qu’il allait «travailler avec le Conseil de sécurité» et la communauté internationale pour faire appliquer «avec force» les résolutions déjà adoptées et «prendre des mesures significatives supplémentaires, notamment de nouvelles sanctions ». Le ministre américain de la Défense, Ashton Carter, a estimé que Pékin avait «une responsabilité importante» pour faire plier Pyongyang.
S’il a dénoncé l’«aventurisme dangereux» de Pyongyang, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a jugé de Genève qu’il fallait «s’abstenir de prendre des mesures qui pourraient aggraver les tensions et mettre la région à deux doigts d’un affrontement armé». «Notre patience, comme celle de la communauté internationale, a atteint ses limites», a déclaré quant à elle la présidente sud-coréenne Park Geun-hye, dénonçant «l’inconscience maniaque» du dirigeant nord-coréen Kim Jong-un.
Samedi, la presse sud-coréenne apparaissait divisée sur la stratégie à adopter. «Il faut mettre en œuvre une stratégie pour isoler Kim Jong-un et sa clique de l’intérieur, et les renverser», demande le quotidien conservateur Chosun Ilbo. Mais pour le Hankyoreh, classé à gauche, ce cinquième essai, huit mois après le précédent, illustre l’échec de la stratégie internationale de sanctions. «Il faut cesser de tout miser sur la théorie illusoire selon laquelle le Nord serait proche de l’implosion. Une nouvelle stratégie globale est nécessaire», préconise le journal.
Objectif : atteindre des cibles américaines
La Corée du Nord a affirmé, vendredi, avoir réussi à tester une tête nucléaire susceptible d’équiper un missile. D’après les médias officiels nord-coréens, ce dernier test a permis à Pyongyang d’atteindre la capacité de miniaturisation d’une ogive nucléaire afin de pouvoir la monter sur un missile. L’essai a été mené le jour anniversaire de la fondation de la Corée du Nord en 1948. «Cette explosion de dix kilotonnes, c’était presque deux fois plus que le quatrième essai nucléaire et légèrement moins que le bombardement d’Hiroshima, qui avait été mesuré à 15 kilotonnes environ», a expliqué Kim Nam-wook de l’agence météorologique sud-coréenne. Cet essai sera scruté de près par les experts qui chercheront à déterminer s’il a permis au Nord de réaliser de nouveaux progrès et s’il s’agit d’une bombe atomique ou d’une bombe à hydrogène, bien plus puissante. Les analystes penchent, d’après les données préliminaires, pour un engin classique. Pyongyang avait affirmé que son quatrième essai nucléaire, le 6 janvier, avait porté sur une bombe à hydrogène, une revendication mise en doute par les spécialistes. Si Pyongyang arrivait à fabriquer une bombe nucléaire assez petite pour équiper un missile et à renforcer la précision, la portée et la capacité de ses vecteurs, elle se rapprocherait de son objectif maintes fois affiché : être capable d’atteindre des cibles américaines.