Accueil SPORTS Après l’exemple de Bab El-Oued : Douéra, la honte du désordre

Après l’exemple de Bab El-Oued : Douéra, la honte du désordre

0

Une semaine après la démonstration d’autogestion populaire à Bab El Oued, où les supporteurs du MCA ont prouvé qu’un rassemblement pouvait se dérouler sans encadrement policier ni débordement, la première rencontre ouverte au public à Douéra a offert un spectacle inverse : confusion, désorganisation et humiliation pour des milliers de supporters.

Le contraste est saisissant, presque cruel. Là où les supporteurs avait donné une leçon de civisme, les organisateurs ont offert celle du chaos. Samedi soir, le Mouloudia d’Alger retrouvait enfin son public au stade Ali-la-Pointe, quatre mois après la tragédie du 5-Juillet. Mais cette “renaissance” a viré au fiasco. Entre files d’attente interminables, accès bloqués et policiers dépassés, Douéra s’est transformé en vitrine de tout ce qui dysfonctionne dans la gestion du football algérien. Dès l’ouverture des portes, le désastre était annoncé. Trois accès seulement ouverts sur six, scanners de contrôle en panne, contrôles manuels improvisés par des policiers à bout de nerfs. Les files d’attente s’étiraient sur des centaines de mètres, sous une chaleur étouffante. Des familles, billets valides en main, se voyaient refoulées pendant que d’autres entraient sans vérification. Résultat : des bousculades, des cris, de la colère. Une scène d’improvisation indigne d’un pays qui se prétend organisateur de compétitions internationales.

Policiers débordés, organisation inexistante
À l’intérieur, le chaos continuait. Faute de signalisation claire, des supporteurs porteurs de billets pour la tribune Sud se retrouvaient au centre, d’autres sans billet s’infiltraient aisément. Les blocs vides côtoyaient les gradins surchargés, sans qu’aucune autorité n’intervienne. Les policiers, eux, semblaient perdus. Certains donnaient des ordres contradictoires, d’autres observaient impuissants des mouvements de foule qu’ils ne contrôlaient plus. Des altercations ont éclaté, parfois violentes.
Le plus révoltant reste ce constat : quatre mois après une tragédie humaine qui aurait dû tout changer, rien n’a été retenu, rien n’a été corrigé. Les mêmes erreurs, les mêmes défaillances, la même désinvolture. On promettait une “nouvelle ère” de gestion et de sécurité ; on a retrouvé l’ancien monde, celui de l’improvisation et du mépris du public.

Un stade moderne, une mentalité archaïque
Le stade Ali-la-Pointe devait incarner la modernité du football algérien. En réalité, il en illustre les contradictions : une coquille neuve gérée avec des méthodes d’un autre âge. Toilettes fermées, points de restauration quasi inexistants, impossibilité de circuler librement dans les tribunes. Seuls quelques kiosques fonctionnaient, pris d’assaut par une foule affamée et assoiffée. Des supporteurs ont été empêchés de rejoindre leurs proches, d’autres sommés de rester assis sous la menace de matraques.
Ce désordre n’est pas un accident : c’est un système. Un système où personne ne rend de comptes, où chaque défaillance se répète sous couvert de “leçon apprise”. Les autorités sportives et sécuritaires promettent après chaque incident, puis oublient dès que les projecteurs s’éteignent.

Bab El Oued, l’autre visage du football populaire
L’ironie est cinglante. Il y a à peine une semaine, le même public avait donné au pays une leçon de dignité. À Bab El Oued, près de 10 000 supporters du MCA s’étaient rassemblés pour suivre à huis clos le match contre le FC Fassell. Pas un policier, pas un incident. Les fans avaient assuré eux-mêmes la discipline, l’ordre et la propreté. Des familles entières, des chants, des drapeaux palestiniens, une atmosphère fraternelle. Là où l’État craignait le désordre, les supporteurs du Mouloudia ont prouvé qu’ils pouvait s’organiser seule.
Et voilà qu’à Douéra, encadrée, surveillée, quadrillée, cette même foule se retrouve humiliée, bloquée, traitée comme une menace. Le symbole est fort : quand les supporteurs agissent, tout se passe bien ; quand les organisateurs interviennent, tout s’effondre.
Le Mouloudia a remporté son match, mais sur les gradins, c’est la confiance qui a perdu. Quatre mois après un drame national, comment expliquer une telle négligence ? Où sont passées les promesses de réforme, de professionnalisation, de billetterie moderne et de sécurité intégrée ? À Douéra, le football algérien a simplement remis le masque du passé.
À Bab El Oued, le peuple avait montré la voie. À Douéra, les organisateurs ont rappelé pourquoi rien ne change.
Mohamed Amine Toumiat

Article précédentFIBDA 2025 : Les œuvres de dix bédéistes palestiniens à l’honneur
Article suivantNUMÉRISATION, ALLÈGEMENT DE PROGRAMMES ET FONDEMENTS DU SYSTÈME ÉDUCATIF : Saâdaoui donne un cours de rattrapage