Ce qui se produisait jusque-là dans les stades de football s’invite désormais dans les salles de basket. À Hydra, lors du match entre le MC Alger et le Club Sportif de Rouiba (81-78), les tribunes se sont vidées avant même le coup d’envoi. Harcelés par les forces de l’ordre, de nombreux supporters ont quitté la salle, laissant derrière eux une victoire sans âme.
Le MC Alger a remporté un succès important face au Club de Rouiba (81-78) lors de la septième journée du championnat national de basketball. Un match disputé, haletant, où les joueurs du Mouloudia ont fait preuve de caractère pour décrocher une victoire essentielle dans la course au titre. Mais sur les gradins, le spectacle n’a pas eu lieu. Une partie du public, pourtant venu en nombre pour soutenir son équipe, a été contrainte de quitter les lieux avant le début de la rencontre, excédée par les conditions d’accès et le comportement jugé injustifié. À l’entrée de la salle de Hydra, le dispositif policier était particulièrement dense. Les fouilles, les barrières et les restrictions d’accès ont créé un climat de tension. « Nous sommes venus voir du basket, pas passer un contrôle militaire », lâchait un supporter en colère. Devant cette situation, plusieurs dizaines de fans du MCA ont préféré rebrousser chemin, tandis que d’autres tentaient encore d’entrer alors que le match avait déjà débuté. Ce scénario rappelle tristement ce que vivent depuis des années les supporters de football en Algérie. Dans les stades, les scènes d’incompréhension et de bousculade à l’entrée sont devenues monnaie courante. À cause d’une organisation souvent déficiente et d’une gestion maladroite du flux de spectateurs, plusieurs rencontres se sont déroulées devant des tribunes clairsemées, parfois même à huis clos. L’excès de prudence dans les dispositifs sécuritaires finit souvent par priver les supporters de ce qu’ils aiment le plus : vivre le match de leur équipe.
Un phénomène qui dépasse le football
Voir ces incidents se produire dans une salle de basket symbolise l’extension d’un problème plus vaste. Le sport algérien peine encore à organiser sereinement ses grands rendez-vous. Qu’il s’agisse d’un derby de football, d’un match international ou, comme ici, d’une simple rencontre de championnat, les défaillances se répètent : manque de coordination entre clubs et autorités, communication tardive, et encadrement parfois disproportionné. Le résultat est le même : frustration et désaffection du public.
La comparaison avec le football est inévitable. Dans les deux cas, c’est la même logique qui s’impose : celle de la méfiance. Au lieu de considérer le supporter comme un acteur essentiel de l’événement, on le traite souvent comme une source potentielle de désordre. Pourtant, la grande majorité des spectateurs viennent simplement vivre leur passion dans le respect. La salle de Hydra devait être un espace familial, un lieu d’encouragement et de fair-play. Elle s’est transformée en symbole du malaise organisationnel qui mine nos événements sportifs.
Le MCA prône l’apaisement et le dialogue
Dans un communiqué publié après la rencontre, la section basketball du MC Alger a regretté ces incidents. « Que serait le goût de la victoire sans nos supporters ? », écrit-elle, tout en s’excusant à ses supporters. Le club appelle toutefois à une réflexion collective pour améliorer la gestion des matchs à forte affluence. L’objectif, selon le communiqué, est de préserver à la fois la sécurité et la convivialité du sport, sans basculer dans la répression ou la suspicion. Le Mouloudia a d’ailleurs proposé d’ouvrir un dialogue avec les autorités locales et les responsables de la Fédération afin d’éviter la répétition de ce genre de scènes. Car au-delà de la frustration des fans, c’est aussi l’image du sport algérien qui en pâtit. À l’heure où l’on cherche à attirer de nouveaux publics et à valoriser le basketball national, ce genre d’incident envoie le signal inverse.
Après les stades, les salles : le malaise est désormais général. Le MC Alger a gagné sur le parquet, mais le sport algérien, lui, continue de perdre du terrain face à ses propres failles d’organisation. Le jour où l’on comprendra que le public est une richesse, et non un danger, le spectacle retrouvera peut-être enfin son âme.
Mohamed Amine Toumiat
