C’est aujourd’hui que devait se tenir la première réunion du Conseil des ministres avec les nouveaux membres du gouvernement, sous la présidence d’Abdelmadjid Tebboune, dont la Présidence a annoncé, dans la soirée de jeudi, la composante du nouvel Exécutif, composé de trente-neuf (39) membres.
Le porte-parole officiel de la Présidence de la République, M. Belaïd Mohand Oussaïd, qui avait, alors, rendu public la liste du nouveau staff gouvernemental, avait également assuré que le nouveau cabinet est en charge du « lancement du changement économique en Algérie, conformément aux promesses faites par le président de la République lors de sa campagne électorale et affirmées dans son discours à la Nation lors de la prestation de serment ».
Selon la même source, le nouveau gouvernement devrait élaborer son plan d’action, qui sera présenté à nouveau au Conseil des ministres pour adoption avant sa présentation au Parlement. À se fier à cette déclaration, on doit s’attendre donc, et dans un délai proche, à une batterie de mesures de redressement d’une économie moribonde, à même de répondre aux aspirations légitimes de la population, et surtout traduire, sur le terrain, les engagements du nouveau locataire d’El Mouradia, exprimés lors de la campagne électorale de l’élection présidentielle du 12 décembre.
À bien décortiquer le message du président démissionnaire du Parti pour la liberté et la justice (PLD), M. Belaïd Mohand Oussaïd, il est aisé d’en déduire l’appréciation du Président sur l’origine de la crise que vit le pays. Le « lancement du changement économique en Algérie » est donc le chantier prioritaire du président Tebboune pour tenter de remettre sur les rails un secteur toujours dépendant des hydrocarbures à raison de 95%, en dépit d’une embellie financière, qui donne le tournis, enregistrée lors de ces vingt (20) dernières années, issue de la flambée des prix du pétrole. Et pour preuve, l’une des caractéristiques principales du nouvel Exécutif, c’est la forte concentration des segments de production et de gestion en relation directe avec le secteur de l’économie, soit près de vingt (20) postes dans la composante du nouveau cabinet, entre les Finances, l’Energie, l’Agriculture, l’Artisanat, l’Industrie et bien d’autres, agissent tous dans le même objectif, en rapport avec la relance de l’économie, pour dire l’importance accordée par le nouveau Président à ce secteur sensible et névralgique. Mais il est, par ailleurs, à se demander, à la lumière de cet intérêt, sur la nature de la crise qui secoue le pays depuis des années maintenant.
Peut-on réussir le pari d’un redressement économique, sans y passer par une refonte globale des institutions, à travers une nouvelle Constitution, de nouvelles lois sur les libertés, de nouvelles Assemblées élues… ? Toutes ces mesures peuvent, énormément contribuer à rétablir la confiance entre les gouvernés et les gouvernants, et un rapprochement entre le citoyen et l’administration, conditions sans lesquelles l’entreprise de Tebboune, y compris sur le plan économique, ne peuvent se concrétiser en raison d’une probable défection citoyenne, notamment avec l’avènement du mouvement populaire, qui garde un œil vigilant sur tout ce qui est entrepris par le pouvoir en place. D’où justement le besoin de la contribution de tout un chacun. Une contribution qui ne peut avoir lieu en dehors d’une refondation générale, notamment dans le politique. Certes le volet économique n‘est qu’un chantier parmi d’autres dans l’agenda du Président, riche de cinquante-quatre (54) engagements, et que les points, déjà cités, sont inscrits dans son carnet, mais une erreur d’appréciation, surtout, sur les priorités peut s’avérer difficile à mener en l’absence d’une adhésion sans faille de tout un peuple.
Le nouveau Président qui n’a pas trop puisé ses ministres, au sein du tandem FLN.RND, deux forces politiques reléguées par la nouvelle donne, née du mouvement populaire, au statut de simples spectateurs, n’aura certainement pas à se faire trop de souci, sur l’adoption de ses avant-projets au sein des deux chambres du Parlement, dont ces deux partis sont majoritaires. En effet dans le nouveau staff gouvernemental conduit par le Premier ministre, Abdelaziz Djerad, figure, même en petit nombre, des membres du parti unique et du RND, ainsi que du Front El Moustaqbal du candidat malheureux Abdelaziz Belaïd. Le Président n’aura donc pas de mal à composer avec les députés de la chambre basse du Parlement et du Sénat, deux Institutions qui s’apparentent, beaucoup plus, à des boîtes à résonance, qu’à un pouvoir législatif, trouvent en leurs maintiens, du moins pour le moment, en attendant la convocation des élections législatives anticipées, une aubaine pour tenter de se repositionner en adoptant tous les projets émanant du pouvoir à mains levées comme de doux petits écoliers.
D’ailleurs le SG par intérim du RND, Azzedine Mihoubi, candidat malheureux au scrutin présidentiel, s’est précipité de féliciter le vainqueur Tebboune, en lui souhaitant un succès dans son entreprise et à dépasser la crise actuelle à travers un dialogue inclusif. Même topo au sein de son « frère ennemi » de la défunte Alliance présidentielle, le Parti FLN, qui, malgré son erreur d’appréciation en soutenant le candidat Mihoubi au détriment de Tebboune, qui est pourtant membre du comité central du parti, ne s’est pas du tout gêné de le féliciter et d’afficher sa disposition à travailler ensemble pour l’édification d’une Algérie meilleure.
En tout cas, le nouveau gouvernement, dont les membres ont pris, hier, leurs nouvelles fonctions, sont attendus sur le terrain pour mettre en exécution le programme du Président, dans un contexte politique, social et économique qui laisse à désirer.
Brahim Oubellil