Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a mis en évidence dimanche, en marge du Conseil des ministres, l’importance d’encourager la création de micro-entreprises et de startups. Dans ce contexte, et pour faire un état des lieux sur cette nouvelle dynamique de libération de la culture des PME, qui vise à stimuler l’économie nationale, Le Courrier d’Algérie a sollicité l’expert en économie, Abdelmalek Serrai, pour nous donner des éléments d’analyse.
Dans un souci de dynamiser une économie nationale longtemps dépendante des hydrocarbures, et contribuer ainsi au processus de développement social, le chef de l’Etat a réaffirmé, devant les membres de son gouvernement, « l’engagement de l’Etat à encourager les jeunes et à soutenir les start-up et les développer, tout en créant un environnement propice à même de contribuer à la relance de l’économie nationale ». Une invitation de Tebboune à l’encontre des porteurs de projets, à saisir cette opportunité et à se développer, dans un écosystème désormais favorable au secteur et qui s’améliore de plus en plus. Un progrès complimenté par le premier magistrat du pays, pour « l’attractivité » réalisée dans ce domaine auprès des jeunes compétences, et la « contribue à la création d’emplois et de richesse » qui en résulte. Dans son exposé, le président de la République a également souligné l’impact positif de la mise en relation entre la technologie et l’éducation, et la croissance économique basée sur la connaissance, soulignant que la « dynamique que connait le système de l’enseignement supérieur, vise à encourager les étudiants à créer leurs start-up », et appelant à « poursuivre la coordination à ce niveau ». Un acquis qui permettra à l’Algérie de se positionner comme un pôle incontournable en Afrique et dans la région, grâce notamment aux mécanismes d’action et d’incubation qu’elle a mis en place, à travers l’accompagnement des startups créatives et innovantes, par des réseaux de soutien, à même de diversifier le moteur de la croissance économique. Tebboune a déclaré dans ce sens que « le dossier des micro-entreprises devrait être soumis à nouveau au Conseil du gouvernement pour être exposé ensuite en Conseil des ministres pour trancher définitivement cette question ».
« Nos banques doivent en urgence se mettre à niveau pour mieux accompagner les investisseurs»
Une vision révélatrice et encourageante, mais discutable, selon l’intervenant Abdelmalek Serrai, et qui nécessite mûre réflexion, au vu des moyens financiers exigés, et dont les banques jouent un rôle décisif à cet effet. Pour Serrai, la lenteur dans l’étude des dossiers et la bureaucratie, font toujours office d’obstacle à ce concept. « Compte tenu du fait que c’est un sujet éminemment nouveau, et compte tenu de l’expérience de nos jeunes, qui ont une formation appréciable, ce sujet doit être abordé avec beaucoup de prudence, non seulement pour le qualifier, mais aussi pour le quantifier. Pour ce qui est de la qualité, de quelle manière nous allons prendre cela en charge, et pour la quantité, quelles sont les statistiques valables pour la création des petites et moyennes entreprises. Ceci dit, c’est une forme de modernité de l’entreprenariat, mais qui n’a pas les moyens des véritables entreprises, qu’elles soient publiques ou privées. Donc il y a un décalage au niveau des moyens. Il faudrait, en plus de ce qu’on leur a donné, leur donner plus de moyens financiers, parce que jusqu’à présent, le système bancaire n’évolue pas assez rapidement, et pour qu’il puisse bénéficier grandement à cette forme de gestation des startups, il faut que les banques soient en alerte, mieux qu’elles ne le soient maintenant, allusion faite à la lenteur et la bureaucratie », a expliqué le Pdg de « Algeria international consult ».
« L’Exécutif est très actif, mais il faut continuer »
L’expert reconnait, certes, que la compétence existe chez nos jeunes, mais cela ne doit pas se faire sans pour autant accorder la confiance nécessaire à ces jeunes porteurs de projets, même si l’orateur admet que le gouvernement s’est engagé de manière conséquente dans cette stratégie. « Beaucoup de startups vont mourir, à cause de cette attitude de prudence et la lenteur dans l’appréciation des dossiers, qui ne permet pas à la startup et à la dynamique de ces jeunes de s’exprimer rapidement et de s’accrocher sur le terrain. Voilà comment je vois la chose. Nous n’avons pas encore tous les ingrédients qui permettront aux startups de se développer rapidement et d’influencer sur l’économie nationale. Comme je disais, les banques ne suivent pas, par moment, quand on voit un jeune, on ne lui fait pas tout à fait confiance. Maintenant, si nous changeons cette attitude-là, si nous faisons davantage confiance aux jeunes, notamment ceux qui sont formés et ceux qui ont bénéficié de recyclage, la startup pourrait s’accrocher, et pourrait être un modèle moderne contribuant à l’économie nationale, de 3 à 5 %, dans un premier stade. On est encore très loin. Il y a un gouvernement qui est très actif, mais il faut continuer, ça ne suffit pas. »
« Les banques ne jouent pas le rôle à 100 % »
Pour finir, le consultant international souligne, qu’en dépit de la présence d’incubateurs comme accompagnateurs de ces nouveaux projets et investissements, cette procédure nécessitera beaucoup de moyens, ce qui obligera les institutions bancaires à jouer le jeu d’une manière rationnelle et cohérente. « J’ai donné une conférence mais j’ai vu que ça se recherche encore. Pour arriver à créer un projet et surtout le développer, ce n’est pas facile, parce qu’il faut être à leur côté, les orienter et surtout les aider matériellement parlant, par des équipements modernes, un financement rapide et l’assistance des banques, ce qui n’est pas le cas tout à fait. Pour l’instant, les banques ne jouent pas le rôle à 100 % dans ces cas-là. Donc il faut être prudent. Oui aux startups, il faut les encourager et les orienter, mais il faut leur donner les moyens et améliorer l’environnement financier qui puisse permettre à ces startups de se développer rapidement »
Propos recueillis par Hamid Si Ahmed