L’attentat a traumatisé l’Amérique, mais la ville meurtrie en 2001 s’active depuis à réhabiliter, reconstruire et regarder vers l’avenir.
Plus résiliente, plus opulente et plus diverse que jamais, New York commémore ce week-end les attentats du 11 Septembre survenus il y a quinze ans, un traumatisme gravé dans son ADN pour l’éternité. Ces attaques menées par Al-Qaïda ont constitué la première agression étrangère majeure sur le territoire des États-Unis en près de 200 ans, brisant au passage leur sentiment d’invulnérabilité et plongeant l’Occident dans des guerres qui perdurent.
Près de 3 000 personnes sont mortes quand deux avions commerciaux détournés ont percuté les tours jumelles du World Trade Center, symboles de richesse et de confiance fièrement plantés dans le sud de l’île de Manhattan. Quelque 75 000 personnes souffrent toujours aujourd’hui de troubles mentaux et physiques liés à ces attaques, dont de nombreux urgentistes ayant respiré des particules cancérigènes en tentant de sauver des vies.
Symbole de résilience
Depuis cette journée cauchemardesque, la plus grande ville des États-Unis s’emploie à trouver un juste équilibre entre préserver le souvenir des victimes du carnage et faire ce qu’elle fait de mieux : réhabiliter, reconstruire et regarder vers l’avenir. Le sud de Manhattan est désormais l’un des quartiers les plus en vue de New York, foisonnant d’hôtels luxueux, de boutiques branchées et de restaurants huppés.
Le site du World Trade Center a été totalement rebâti, remodelé, avec un mémorial et un musée ainsi que des immeubles de bureaux, la gare ferroviaire la plus chère du monde et un centre artistique. « Les gens viennent là du monde entier. C’est quelque chose qui symbolise désormais la résilience pour les gens », a relevé le maire Bill de Blasio.
World Trade Center One, surnommé « Freedom Tower » (tour de la liberté), toise la ville du haut de ses 1 776 pieds (date de l’indépendance américaine – 541 mètres). Plus grand gratte-ciel du continent américain, ses lumières sont visibles à des kilomètres. Autre merveille architecturale : le noeud de transport ferroviaire Oculus, entrelacs ovale de verre et de métal, conçu par l’Espagnol Santiago Calatrava. Il a coûté quatre milliards de dollars.
7 millions de visiteurs au mémorial de l’attentat
Fleurs et souvenirs sont visibles près des milliers de noms gravés dans les bordures des deux fontaines du 9/11 Memorial, construites sur chacune des empreintes des tours jumelles. Ouvert depuis quinze mois, le 9/11 Museum a accueilli près de sept millions de visiteurs. « Chaque personne qui vient à New York sent qu’elle doit passer par ici », note Vincenzo Nardone, New-Yorkais depuis 47 ans. Selon lui, après la tragédie, la ville est devenue plus amicale et plus ouverte. Mais pas seulement. Les contrôles de sécurité dans les bâtiments et les lieux touristiques sont inhérents à la vie new-yorkaise, tout comme les mises en garde et les incitations à signaler tout détail louche. La police de New York, la plus riche et la mieux équipée du pays, a annoncé l’an dernier le recrutement de 1 300 agents supplémentaires en partie pour renforcer la surveillance antiterroriste.
« Je pense que tout le monde est un peu plus sur ses gardes qu’avant, partout », souligne Hal Shane, un habitant de 68 ans, qui visite le mémorial pour la première fois. Il se souvient du flot de gens effrayés et débraillés remontant vers le nord de Manhattan. Le quartier près de chez lui, vers Central Park West, était devenu « une base militaire » avec des chars, des camions et des soldats, tandis que des avions de chasse survolaient la ville. « Nous sommes une famille de victimes, nous sommes désormais reliés à tous ces autres endroits qui ont souffert la même horreur », relève-t-il. Mais l’idée que les attentats puissent déjà appartenir à l’histoire inquiète des New-Yorkais pour lesquels ce drame fait encore largement partie de leur vie quotidienne. « Ce qui m’effraie vraiment, c’est que le 11 Septembre devient une note de bas de page », confie Scott Matty, 62 ans, qui souffre d’un cancer sanguin.
Selon les médecins, sa maladie est liée au fait qu’il avait repris son travail dans le sud de Manhattan quelques jours seulement après les attentats, lorsque l’atmosphère était encore chargée de poussières cancérigènes. « Le 11 Septembre n’est pas terminé », souligne-t-il. « Des gens tombent malades aujourd’hui, des gens meurent aujourd’hui à cause de ce qui s’est passé. »