Dans une semaine exactement, le 15 du mois en cours, pour être précis, l’affaire dite «ministère de la Communication-Rebrab» dont a été saisi, en référé, le tribunal administratif de Bir Mourad Raïs, connaîtra son épilogue. Avec le prononcé attendu du verdict.
C’est le juge Mohamed Bendahmane, qui a présidé la séance d’hier, qui l’a annoncé, dans l’après-midi d’hier, après les plaidoiries des avocats des deux parties y impliquées. Cet épilogue, qui viendra après quatre reports successifs, est d’autant plus attendu qu’il ne manquera pas de jeter un éclairage instructif sur la réalité du rapport de forces existant présentement sur la scène politique nationale : les dessous politiques de cette affaire relevant, en effet, pour nombre d’observateurs du secret de Polichinelle. Ce qui transparaissait assez nettement, d’ailleurs, des plaidoiries des avocats ; surtout, de ceux de Ness-Prod la filiale du groupe Cevital qui a racheté la plus grosse partie des actions du groupe médiatique El Khabar. Une transaction que le ministère de la Communication avait rejetée au prétexte qu’elle était illégale ; d’où son action en référé pour l’annuler. Dans sa plaidoirie, l’avocat du ministère de la Communication, Maître Nadjib Bitam, a, en effet, rappelé les éléments attestant de l’illégalité de la transaction réalisée, sur lesquels la partie plaignante qu’il représente a basé son action en justice. A savoir, que celle-ci était contraire aux dispositions de l’Article 25 de la loi organique sur l’Information, promulguée en janvier 2012, interdisant la possession par un seul propriétaire de plusieurs titres de presse. Et, en l’occasion, répondu aux critiques de la défense de la partie adverse sur le caractère infondé juridiquement des deux requêtes additives qu’il a introduites après la saisine du tribunal administratif. Pour rappel, la première porte sur l’implication, dans l’affaire, des actionnaires d’El Khabar. Et la seconde, sur « le gel des mesures prises (par le nouveau propriétaire) en conséquence de la transaction réalisée ». Dans son intervention, Maître Nadjib Bitam a également défendu la compétence en cette affaire, remise en cause par les avocats de la partie adverse, du tribunal administratif. Dans leurs plaidoiries, Maîtres Khaled Berghal et Abdelkader Feddag, ont, en effet, dénié au ministre de la Communication toute habilitation à intervenir dans une transaction commerciale entre une entité de presse et un opérateur économique. Et ce, au prétexte que cela « relevait des attributions de l’Autorité de régulation de la presse écrite » dont l’instauration est prévue par la loi organique sur l’information précitée. Un prétexte que l’avocat de la partie plaignante a rejeté en rappelant, dans un premier temps, que « la législation en vigueur permet, en l’absence d’une telle autorité de régulation, au ministère de tutelle de s’arroger toutes ses prérogatives ». Et, dans un second, « que le tribunal administratif était seul compétent dans les affaires du genre où l’État est impliqué ».
Dans la foulée, et en réponse aux allégations des avocats de la filiale de Cevital sur le caractère obscur de la requête additive demandant « le gel des mesures prises par le nouveau propriétaire », qu’il a introduite, Maître Bitam en a défendu le bien-fondé en se basant sur la décision, « annoncée par Rebrab, sur le plateau d’une chaîne de télévision française, a-t-il tenu à le souligner, « d’introduire El Khabar en bourse ». Une annonce que l’avocat du ministère de la Communication a qualifié « de claire reconnaissance, par Rebrab lui-même, du caractère contradictoire de la transaction réalisée avec l’article 25 de la loi organique sur l’information susmentionnée, interdisant à un même propriétaire la possession de deux titres (de presse) ». Sauf que les avocats de la partie adverse ont renié tout caractère de preuve à de telles déclarations ; celles de Rebrab, s’entend: pour eux, les seules preuves recevables par un tribunal sont matérielles.
Revenant, dans un point de presse qu’il a animé après la levée de séance prononcée par son président, sur le double argument avancé par ces derniers sur la non habilitation du ministère à saisir la justice dans une affaire pareille, au prétexte que cela relevait des prérogatives de l’Autorité de régulation, et sur la primauté de la loi organique sur l’information de 2012 sur le décret exécutif 11-216 qui précise les attributions du ministre en charge du secteur, Maître Bitam s’est interrogé sur « le non-respect par Ness Prod de la disposition dudit décret enjoignant à toute entité médiatique amenée à introduire des changements dans ses statuts à en aviser la tutelle, alors que depuis 2013, 150 périodiques l’ont fait ». Et de répondre : « C’est parce que ses responsables savaient, qu’en rachetant le groupe El Khabar, ils faisaient une action illégale… » Une opinion que sont loin de partager ses « adversaires du jour » qui ne désespèrent pas de voir le tribunal administratif de Bir Mourad Raïs se déclarait incompétent…
Mourad Bendris