Au moins 28 personnes, des civils pour la plupart, ont péri et des dizaines de personnes ont été blessées mardi dans le pire attentat perpétré par les talibans cette année à Kaboul, une semaine après le début de l’»offensive de printemps» des insurgés.
L’attentat suicide au camion piégé, qui visait un bâtiment gouvernemental, s’est produit en pleine heure de pointe matinale, à l’heure où les employés se rendaient au travail. Des journalistes de l’AFP ont senti les maisons vibrer, des vitres ont volé en éclats, une colonne de fumée s’est élevée dans le ciel et des sirènes de police et d’ambulances retentissaient dans toute la ville, plusieurs heures après l’attentat.
Selon le chef de la police de la capitale afghane, Abdul Rahman Rahimi, «un assaillant a garé un camion de chantier bourré d’explosifs sur le parking attenant au bâtiment» et l’a fait exploser. Vingt-huit personnes, en majorité des civils, ont été tuées dans l’explosion et 183 ont été blessées, d’après lui. Le ministère de la Santé a recensé quant à lui 327 blessés, surtout des civils, dont beaucoup sont «dans un état grave».
Le président afghan, Ashraf Ghani, a évoqué «de nombreux morts et blessés» au cours de ce qui est d’ores et déjà l’attaque la plus sanglante dans la capitale afghane depuis le début de l’année. Les talibans mènent régulièrement des attentats suicides contre les forces afghanes dans l’insurrection qu’ils mènent depuis la chute de leur régime fin 2001.
L’attentat visait un bâtiment appartenant au gouvernement afghan que le NDS, les services de renseignement, dit avoir occupé par le passé. De même source, le complexe serait aujourd’hui utilisé par la présidence. La déflagration, entendue à plusieurs kilomètres à la ronde, a été suivie d’une intense fusillade entre les forces de sécurité et «un insurgé» qui a été abattu «au bout de 30 minutes», d’après M. Rahimi.
Revendiquant l’attaque, le porte-parole habituel des talibans Zabiullah Moudjahid, connu pour exaggérer les bilans des attaques des insurgés, a assuré que des combattants étaient parvenus à entrer dans le complexe.
Dans le quartier touché, de nombreux véhicules ont été déchiquetés par l’explosion et des dizaines de devantures de magasins ont été soufflées. «L’explosion était énorme. Comme il y avait beaucoup de gens dans les rues, il doit y avoir de nombreuses victimes. Nous en avons assez de ces attaques», a expliqué Sediqullah, un témoin, à l’AFP.
«Attaques de grande envergure»
Les talibans ont annoncé il y a une semaine, le début de leur «offensive de printemps», «l’Opération Omari», en mémoire du mollah Omar, le défunt fondateur de leur mouvement. Ils disent vouloir mener des «attaques de grande envergure» dans tout le pays, notamment contre les 13.000 soldats de l’Otan et les forces de sécurité afghanes. Les insurgés ont ainsi lancé, vendredi, un assaut contre Kunduz, la grande ville du Nord, qu’ils étaient parvenus à envahir et à tenir pendant quelques jours à l’automne dernier. L’armée afghane, seule en première ligne depuis la fin de la mission de combat de l’Otan fin 2014, a toutefois réussi à repousser cette nouvelle offensive sur Kunduz. Sans l’appui des troupes étrangères sur le terrain, les forces de sécurité ont toutes les peines du monde à contenir l’insurrection talibane, à laquelle s’ajoute, depuis un peu plus d’un an, la campagne des combattants du groupe Etat islamique, notamment dans l’Est afghan.
D’après l’Otan, «environ 5.500» soldats et policiers sont morts au front l’an dernier, mais les civils payent un lourd tribut aux violences. L’année 2015 a été la plus sanglante pour la population civile depuis que l’ONU a commencé en 2009 à compter le nombre d’Afghans tués ou blessés dans le conflit, avec 11.002 victimes civiles, dont 3.545 morts, l’an dernier. Pour tenter de mettre fin au conflit, le gouvernement afghan tente de relancer les pourparlers de paix amorcés à l’été dernier, en suspens depuis l’annonce de la mort du mollah Omar. Afghans, Pakistanais, Chinois et Américains cherchent à ramener les insurgés à la table des négociations depuis janvier, en vain. Ces derniers posent notamment le départ des troupes étrangères comme pré-condition à toute reprise du dialogue.