Décidément, les menaces du ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Nourredine Bedoui, à l’égard des enseignants contractuels, en grève de la faim depuis dix jours, à Boudouaou, commencent à se «concrétiser» sur le terrain. En effet, la tension à la place dans laquelle les contractuels observent une grève de la faim, depuis dix jours, est montée d’un cran à l’arrivée des renforts des forces de sécurité.
Lors d’une virée qui nous a emmenés, hier dans la matinée, sur les lieux du rassemblement, nous avons pu constater un renfort impressionnant des services de sécurité. L’accès au lieu du rassemblement était interdit. Les services de sécurité « plus nombreux que les protestataires », ont encerclé la place et ont interdit tout accès aux passants et aux journalistes. Ces derniers avaient du mal à couvrir l’évènement, se plaignant du resserrement de l’étau contre les protestataires. Même la nourriture et l’eau ont été interdites d’accès, ce qui s’est dégradé sur la santé des contractuels, dont, on pouvait clairement voir les traces de l’épuisement et de la peur.
« Les policiers se montrent virulents à notre égard. Ils nous ont demandé de plier nos affaires et de quitter les lieux illico presto, avant que les choses ne dégénèrent. Ce sont les prémices d’une évacuation par la force, mais nous n’allons pas céder », s’est écrié un contractuel en s’adressant aux journalistes présents sur place. Les policiers l’ont vite éloigné, pour l’empêcher de communiquer avec la presse. Les manifestants qui ont l’habitude d’user des toilettes des habitations limitrophes, ou s’y rendant pour de quelconques utilités quotidiennes, n’ont pas pu le faire, hier, car les habitants sont plus réticents depuis qu’ils ont reçu des «orientations» de ne plus accorder des aides ou des facilités de quelque nature que ce soit aux contestataires, affirment certaines voix présentent sur place. Chose qui a encore ajouté plus de peine et de douleur morale aux contractuels, mais cela n’a guère brisé leur volonté et leur détermination à aller jusqu’au bout dans leur mouvement de contestation. Une détermination qui fait craindre le pire, selon des avis largement partagés.
Même si le climat était plutôt calme, on pouvait constater que les contractuels avaient peur d’une intervention musclée. Pour eux, il est évident que c’est « le soleil avant l’orage ». Après de longues journée d’attente, le Premier ministre Abdelmalek Sellal a, enfin, réagi quant aux doléances des contractuels et à ce « conflit », qui perdure depuis le 27 mars dernier. En effet, alors que les syndicalistes s’attendaient à une décision politique, leurs espérances sont vites tombées à l’eau. Ainsi, au moment ou le climat était « tendu » à Boudaouou, le chef de l’exécutif a préféré appeler les contractuels à prévaloir la sagesse dans l’affaire des enseignants contractuels contestataires. En marge de sa visite de travail et d’inspection dans la wilaya de Constantine, Sellal a souligné que l’Algérie est un « État de droit et qu’il était impératif de « respecter les lois ». Il a souligné, dans ce sens, que la loi exige de passer par un concours de recrutement obéissant à la nécessité d’assurer l’égalité des chances pour tous, rappelant, dans le même contexte, la volonté du gouvernement à « donner la priorité à ces enseignants ». Le Premier ministre, appelant à « ne pas politiser » la grogne des enseignants contractuels contestataires, a soutenu que ces enseignants ont «toutes les compétences et les chances de réussir à l’examen de recrutement ».
En attente d’une solution au dossier, politique ou répressive, les contractuels semblent déterminés à aller de l’avant dans leur combat. Et à l’approche de la date du concours, les officiels tentent de trouver un terrain d’entente. Une tache difficile devant l’entêtement des syndicats dont les solutions de la tutelle ne semblent guère les convaincre. Notons, enfin, que le nombre de candidats inscrits au concours national de recrutement des enseignants a dépassé les 971.000 à quelques heures de la fermeture, jeudi à minuit, du site électronique de l’Office national des examens et concours (ONEC), a fait savoir le ministère de l’Education nationale. Plus de 11.000 enseignants contractuels répartis sur 21 wilayas se sont inscrits au concours, a ajouté la même source indiquant que le chiffre est appelé à augmenter après le décompte des candidats des autres wilayas. Ces chiffres sont remis en cause par les syndicalistes qui parlent de « guerre de données ».
Lamia Boufassa