David Cameron a été «distrait» pas d’autres choses, Nicolas Sarkozy voulait se mettre en avant: le président américain Barack Obama, décoche dans une interview quelques critiques aux dirigeants ou ex-dirigeants européens sur l’intervention militaire en Libye de 2011.
Dans un entretien publié, jeudi, par le magazine The Atlantic, M. Obama revient sur les conditions dans lesquelles une coalition conduite par la France et la Grande-Bretagne -relayée par la suite par l’Otan- a mené en 2011 des raids aériens en Libye, qui ont conduit à la chute du régime de Mouammar Kadhafi. Depuis, l’Etat libyen s’est effondré, les milices rivales se disputent le pouvoir, et l’organisation Etat islamique (EI) a profité de la situation pour monter en puissance. «La Libye est plongée dans le chaos», constate le président américain. «Lorsque je me demande pourquoi cela a mal tourné, je réalise que j’étais convaincu que les Européens -étant donné la proximité de la Libye- seraient plus impliqués dans le suivi», affirme M. Obama. Le Premier ministre britannique David Cameron a ensuite été «distrait par d’autres choses», explique-t-il. Le président français Nicolas Sarkozy «voulait claironner ses succès dans la campagne aérienne, alors que nous avions détruit toutes les défenses anti-aériennes», dit-il encore.
Les djihadistes de l’EI ont étendu leur emprise
Les djihadistes de l’Etat islamique «ont nettement étendu leur contrôle sur le territoire» de la Libye, indique, jeudi, un rapport d’experts de l’ONU. Le groupe extrémiste «est actuellement l’acteur politique et militaire le plus important dans la région» de Syrte. Dans cette ville, la principale tête de pont en Libye de l’EI, le groupe «a recruté avec succès parmi les communautés marginalisées depuis le renversement du régime de Mouammar Kadhafi», poursuit le rapport. «La montée en puissance de l’EI à Syrte a été importante en 2015», note le document. La formation djihadiste a aussi «accru sa capacité opérationnelle à Tripoli et Sabrata» en recrutant des combattants locaux et étrangers. L’EI ne tire pas pour l’instant de revenus directs de l’exploitation pétrolière en Libye, mais «ses attaques contre les installations pétrolières compromettent gravement la stabilité économique du pays».
Maintenir l’embargo
Même si un gouvernement d’union nationale est finalement formé en Libye, «le risque de détournement et de mauvais usage de matériel (militaire) restera très élevé», affirment aussi les experts. Ils recommandent ainsi de «maintenir les dispositions actuelles de l’embargo» en vigueur, qui prévoit des exemptions pour les besoins du gouvernement internationalement reconnu. Celui-ci réclame depuis longtemps un assouplissement de cet embargo afin, dit-il, d’équiper l’armée régulière et de lui permettre de mieux combattre l’EI.
L’ONU s’efforce depuis de nombreux mois de favoriser la formation d’un gouvernement d’union en Libye, divisée entre deux gouvernements et deux parlements. Selon les experts, «le futur gouvernement d’union nationale devra mettre en place un canal unique pour les appels d’offres et des mesures de contrôle strictes et vérifiables pour éviter les détournements», en particulier un inventaire du matériel, «y compris des armes chimiques». Le rapport cite plusieurs cas de contournement de l’embargo, avec des équipements et des armes provenant d’Egypte, des Emirats arabes unis, de Turquie et du Soudan ou des munitions produites en Russie et en Chine.