Des origines d’Obama au financement du 11 Septembre, le candidat républicain est un adepte des théories du complot, qu’il propage sans retenue. Florilège. Le mois dernier, Antonin Scalia, un juge de la Cour suprême très à droite, a été retrouvé mort dans son lit alors qu’il était en vacances au Texas avec un groupe d’amis. Il avait 79 ans et des problèmes de santé, et le médecin comme sa famille ont conclu à une mort naturelle. Ce qui n’empêche pas toutes sortes de théories du complot de proliférer sur l’Internet. Il aurait été assassiné par une prostituée payée par Barack Obama, Hillary Clinton, la famille Bush… Tout cela imaginé, car John Poindexter, le propriétaire de l’hôtel où séjournait le juge, a expliqué qu’il avait trouvé Scalia dans son lit, «un oreiller sur la tête», avant de préciser plus clairement que l’oreiller était sur sa tête et non pas sur son visage. Mais aussi, car le remplacement de ce sage de la Cour suprême pouvait bouleverser la donne pour les candidats républicains à la présidentielle. Lors d’une interview, Michel Savage un présentateur radio ultra-conservateur, demande à Donald Trump s’il est d’accord pour exiger une enquête et une autopsie pour faire la lumière sur la mort du juge Scalia. Au lieu de rejeter les spéculations, le magnat de l’immobilier répond : «Je viens d’atterrir et j’entends que l’on en parle beaucoup.» Puis ajoute, suspicieux: «On a dit qu’on l’avait trouvé avec un oreiller sur le visage, ce qui est un endroit plutôt inhabituel pour un oreiller.» Ce n’est pas la première fois que Donald Trump se fait l’écho d’histoires abracadabrantes. Le candidat républicain se délecte des rumeurs, des mythes urbains et des théories du complot en tout genre. Et ce n’est pas juste pour faire parler de lui dans les médias. C’est aussi par calcul politique. En 2011, alors qu’il caresse l’idée d’une candidature à la Maison-Blanche, il reprend une vieille polémique lancée au moment de l’élection de Barack Obama quatre ans plus tôt et la monte en épingle. Il accuse le président d’être né au Kenya et non pas à Hawai, ce qui le rendrait, selon lui, illégitime, et demande à cor et à cri qu’il publie son certificat de naissance. Trump se répand partout, annonce qu’il a dépêché des détectives à Hawai. «Ils n’arrivent pas à croire ce qu’ils ont trouvé», dit-il, même s’il ne révélera jamais leurs extraordinaires découvertes. Si l’on en croit les sondages, la campagne de Trump convainc un nombre croissant d’Américains, à tel point que Barack Obama a dû finir par publier l’intégralité de son certificat de naissance. Depuis, Trump a plus ou moins abandonné le sujet.
Vaccin, 11 Septembre et sang de cochon
Mais il en a trouvé d’autres. En septembre, lors d’un débat, il a déclaré qu’un enfant de sa connaissance était devenu autiste à la suite d’un vaccin. Un lien qui n’a pourtant jamais été prouvé par les scientifiques. Mais un sujet qui anime vivement la société américaine. «L’autre jour, un enfant de deux ans, deux ans et demi, un bel enfant est allé se faire vacciner et une semaine plus tard, il a eu une énorme fièvre, a été très très malade et est autiste maintenant», a assuré Trump.
Récemment, lors d’un meeting électoral, il a affirmé que s’il était élu, il donnerait les noms de ceux «qui ont vraiment fait tomber le World Trade Center», sous-entendant que l’on ne savait toujours pas qui avait financé les attentats. Après le 11 Septembre déjà, il avait assuré avoir vu à la télé des «milliers et des milliers» de musulmans qui célébraient à Jersey City la chute des tours. Qu’importe si aucun média n’a retrouvé trace de l’événement.
Il a aussi reçu le soutien de plusieurs auteurs de théories du complot dont Carl Gallups, un pasteur de Floride, qui a déclaré que le massacre de l’école élémentaire de Sandy Hook dans le Connecticut où 26 personnes ont été tuées était «un canular», et que le père d’un des enfants était «un acteur payé par l’administration Obama pour nous enlever nos armes». C’est un «grand honneur» de recevoir son soutien, a déclaré Donald Trump.
«Lancer le dialogue»
L’homme d’affaires a également pour spécialité de propager des histoires inventées de toutes pièces. Pour montrer que l’Amérique ne doit pas se laisser marcher sur les pieds par les terroristes, il a raconté récemment que le général Pershing, aux Philippines, avant la Première Guerre mondiale, avait exécuté une vingtaine d’insurgés musulmans avec une balle trempée dans du sang de cochon. De quoi ravir son public, même si ce n’est qu’une légende, selon les historiens. Il a retweetté également en novembre cette image accompagnée de statistiques à peu près toutes fausses. Dans la grande majorité, les Blancs tuent des Blancs et les Noirs des Noirs. Et le «Crime Statistics Bureau» n’existe pas. Mais quand on lui reproche de retweeter des inepties, il se défend en assurant notamment : «Nous lançons un dialogue et c’est très intéressant.» Peut-être que, comme le clame une autre théorie du complot, la campagne présidentielle de Trump n’est en fait qu’une machination diabolique conçue par les démocrates pour ridiculiser les républicains et saper le parti ?