Tous les usagers de la route en provenance de Beni-Abbès ,Kerzaz et Adrar sont formels .Si vous arrivez de nuit , juste à l’entrée de la ville ,un opaque nuage de fumée grise vous prend à la gorge, ce qui rend la respiration difficile, on suffoque même .Ce sont les ordures ménagères brulées qui dégagent ce voile nocif qu’on prendrait pour un brouillard. Les habitants des parages, plus précisément ceux de la commune de Béchar –Djedid, souffrent le martyre et souffrent en silence à cause aussi des concasseurs qui s’entassent dans le coin.
Durant la journée ,la poussière inhalée vous étouffe et peine perdue pour les ménagères qui s’activent afin de rendre leurs demeures rutilantes. La fine couche de poussière s’amoncelle et les meubles et le sol se couvrent rendant hystériques ces maitresses de maison, même en fermant bien les vitres. Les doléances de ces autochtones, bien que nombreuses, n’ont hélas ,pas eu d’écho et si dans la journée ,ils ont droit à un dessert de poussière, le soir ,comme plat de résistance ,c’est cette pollution qui vous agrippe en faisant de vous de véritables loques. Une fois ce’ barrage’ de fumée et de poussière dépassé ,un flux continu de voitures vous accueille ,rendant les cheveux hirsutes et les nerfs soumis à rude épreuve. Prétendre parvenir au centre-ville requiert de la patience, des coups de freins soumettant la boite de vitesses à un traitement qui nécessite une révision chez le mécanicien.
En effet ,une seule voie vous y conduit ,les taxis ,les particuliers ,les bus qui roulent à vive allure, s’engouffrent dans une cacophonie où le pare-chocs contre pare-chocs est à l’origine de nombreuses rixes .
L’ état des routes est lamentable, les nids – de – poules, omniprésents, sont autant de cauchemars qui s’ajoutent aux nombreuses failles qui vous guettent à chaque instant. Les gravats, synonyme de constructions comme le visage de l’actrice Catherine Deneuve (toujours en travaux) accaparent la chaussée ainsi que les devantures des magasins qui repoussent les passants à aller s’exposer devant ce flot de véhicules incessant qui risqueraient de les percuter à chaque moment : un véritable tohu-bohu dont les dessous insipides ,insidieux font d’eux (les passants) des proies livrées au champ de bataille. Malgré le passage régulier des éboueurs ,certains habitants n’hésitent pas à se débarrasser de leurs détritus à n’importe quelle heure. La grande – rue, jadis connue pour ses heures de gloire ,a fini par rendre l’ âme ,ses arbres éclaboussés par tant d’années de chaleur ,de froid ont montré leurs limites et personne n’a pensé à les remplacer. Quant à la fameuse place appelée place chameau, pour ne pas dire dromadaire, est une place sans âme où un cheval et un dromadaire utilisés par leur propriétaire à des fins commerciales (prise de photos) abandonnent les délices concoctés durant la journée sur le sol de la place. Partout des fuites d’eau, peut-être dues à des canalisations vétustes ou bricolées le jour de la pose .Des flaques d’eau offrent parfois des surprises aux automobilistes qui les appréhendent, de peur de tomber dans une crevasse.
Adieu le pactole de la journée pour les chauffeurs de taxis !
On essaie de colmater les brèches, créant ainsi des bouchons et des embouteillages dans des rues devenues soudainement trop étroites. Les feux de circulation en veilleuse depuis des lustres n’ont jamais été utiles ,ils sont souvent en panne. Des travaux timorés ont repris ces jours-ci avec en prime, un climatiseur pour chaque feu car entre le vert et le rouge, tout bouge ; Béchar est scindée en deux par un oued transformé jadis en petit lac qui permettait à quelques embarcations de voguer sous l’éclatant soleil. Aujourd’hui, ce cours d’eau est à l’abandon malgré les nombreuses tentatives et les énormes sommes dépensées pour des aménagements qui sont tombés en ruine.
Le train (ou T.V.R comme on le surnomme :train à vitesse réduite : 60 kms à l’heure) desservant Oran, traverse la ville et au passage protégé, les rails font subir aux véhicules un supplice entraînant irrémédiablement des anomalies aux amortisseurs et autres pièces maitresses. Les façades des maisons sont pratiquement nues et le parpaing gagne du terrain, pourvu que les constructions qui poussent tels des champignons, érigent afin de louer les garages, ce qui permet une rente conséquente. Le soir, le pain est vendu d’une manière anarchique, aux abords des marchés, à la merci de la poussière, de la fumée de voitures et autres agents polluants ; idem pour le poulet cuit dans ces fameuses rôtisseries dont l’hygiène douteuse vous repousse mais tant que les acheteurs potentiels sont là, autant les leur refourguer. Les plaques de signalisation (stop, interdiction de stationner) ne sont jamais respectées malgré la présence d’agents de l’ordre public, mais devant certains énergumènes qui n’ont font qu’à leurs têtes, la répression est de rigueur. Il faut reconnaitre que les services de sécurité, tous secteurs confondus, assurent de jour comme de nuit, un travail titanesque qui mérite d’être cité et signalé. Parler au téléphone en conduisant est devenu monnaie courante et souvent ces négligences, ce non-respect du code de la route, entrainent des situations dramatiques. Beaucoup de choses restent à faire et pour une ville comme Béchar qui se targue d’être la capitale de la Saoura, il en faut beaucoup plus pour lui redorer son blason.
SAFI A.T.