Le forum d’El-Moudjahid a reçu, hier, les représentants de l’Association nationale des hémophiles algériens. La présidente de l’Association, Lamhane, a ouvert la séance en mettant en exergue le rôle primordial que joue l’Association pour sensibiliser l’opinion publique sur la circoncision des enfants hémophiles et les risques qu’elle peut engendrer quand elle n’est pas contrôlée.
La présidente a affirmé que le nombre d’hémophiles enregistré en Algérie jusqu’à 2014 est de 2 435. Elle a aussi exhorté les médias à jouer pleinement leur rôle dans cette campagne de sensibilisation. Deux femmes médecins, le docteur Bensadok, spécialiste de l’hémophilie et le Dr Karima Chennoukh biologiste et responsable du diagnostic des maladies hémorragiques à l’Hôpital de Béni-Messous ont pris chacune la parole pour expliquer les conséquences graves de cette pathologie qui touche beaucoup d’enfants dans le monde. Selon ces médecins spécialistes, cette maladie génétique se manifeste par l’absence ou la diminution d’un des facteurs de la coagulation habituellement présent dans le sang. Dans cette pathologie, les malades ne sont pas tous atteints de la même façon et l’on distingue trois types selon leur degré de gravité. Il y a l’hémophilie sévère, l’hémophilie modérée et l’hémophilie mineure. Dans l’hémophilie sévère, la maladie se manifeste par des accidents hémorragiques avant l’âge d’un (1) an. (Vaccinations, plaie hémorragique, hématomes au moment de la marche) et qui sont très fréquents tout au long de la vie d’un hémophile. Ce cas est parfois sans cause apparente (saignements spontanés). Mais en dépit de la gravité de la situation, il est souvent évident de faire le diagnostic chez un hémophile sévère que chez un hémophile modéré ou mineur. De ce point de vue, la maladie est découverte un peu plus tard et parfois même à l’âge adulte lors d’une intervention chirurgicale (qui peut conduire le sujet à la mort). Les hémorragies chez les hémophiles peuvent être externes donc visibles à l’œil nu et internes tel que les hématomes et hémarthroses (très invalidante à long terme). Toutes deux nécessitent un traitement précoce, des consultations en urgence, voire les hospitalisations dans la plupart des cas. Quelle que soit la nature du saignement, il est important de se transfuser rapidement pour arrêter les hémorragies et éviter les douleurs ainsi que toute autre complication, ce qui revient moins cher en termes de coût. En dépit de la marche progressive de la science, et l’existence de traitement de substitution, de nos jours, certains actes chirurgicaux tels que les circoncisions peuvent être mortels. Ces actes, souvent banalisés sont pour la plupart responsables de la survenance des décès chez les hémophiles.
Ceci dénote l’ignorance de la maladie ou absence d’antécédents familiaux, d’une part, et de surcroît l’absence de bilan préopératoire systématique, d’autre part (en l’occurrence le bilan d’hémostase). La circoncision est un acte important dans notre société (obligation sociale plus qu’un acte de foi). Étant mal préparée, elle peut avoir des conséquences dramatiques pour le malade. Les circoncisions collectives représentent un danger mortel pour les enfants d’une manière générale. À cet effet, il a été évoqué l’affaire de la circoncision collective d’El-Khroub à Constantine en 2005 le 27e jour du Ramadhan qui a causé des dégâts jugés irréversibles chez plusieurs enfants. D’autre part, il est à rappeler qu’un nombre important d’hémophiles adultes ont été circoncis entre 2007 et 2015. Par ailleurs, il y a lieu d’évoquer les complications sociales de la circoncision chez les hémophiles. De ce fait, il faut noter la difficulté d’accès dans certaines régions du pays. Reconnaître l’acte chirurgical et le cadrer avec des textes de lois en définissant l’âge moyen d’accès à la circoncision (2 à 3 ans) sauf pour des raisons médicales. Il est recommandé de la faire pratiquer par des chirurgiens entraînés, avec surveillance pendant 6 à 8 heures.
La nécessité de réaliser des tests d’hémostase préopératoires. Interdire sinon contrôler les circoncisions collectives. La mise en place d’un protocole adapté afin de rendre possible la circoncision pour tous les hémophiles. Par conséquent, la présidente de l’Association a déclaré que certains médecins refusent d’effectuer des circoncisions au profit des enfants hémophiles. Aussi, il a été rappelé que dans les régions isolées, le manque de médicaments et les moyens matériels sont flagrants. Aussi, ces régions sont confrontées constamment au problème de distribution de produits pharmaceutiques. Il faut savoir que les régions enclavées ont toujours été relégués dans l’oubli par nos gouvernants. Mais, quand il s’agit de vies humaines, faut-il, par manque de conscience professionnelle ou par mépris, laisser ces malades mourir dans l’indifférence la plus totale ? La négligence et l’incompétence caractérisées de certains responsables médicaux constituent-elles aussi un danger mortel pour ces enfants hémophiles ? Là, est la question.
Lazreg Aounallah
