Accueil LA CHRONIQUE DU JEUDI UN REPORTER DANS LA FOULE : Le 8 mai 45 vu autrement

UN REPORTER DANS LA FOULE : Le 8 mai 45 vu autrement

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Aujourd’hui n’est pas un jour comme les autres. Il y a 80 ans, jour pour jour, un évènement destiné à asservir un peuple aura, contre toute attente, produit l’effet inverse.
C’était le 8 mai 1945 et pendant que la France, grâce aux armées russe et américano-britannique, était libérée de l’occupation allemande, son armée coloniale en Algérie, dans une réaction d’une extrême lâcheté, a massacré durant sept semaines, avec une barbarie inouïe, un peuple sans défense. Bilan : 45.000 morts parmi les vieux, les femmes et les enfants. Les régions les plus touchées par cet innommable déferlement de haine ont été Sétif, Guelma, Kherrata. Le motif ? Les Algériens avaient « osé » manifester pacifiquement pour leur liberté. Comme toutes les manifestations qui ont eu lieu, ce jour-là, à travers le monde pour marquer la fin de la seconde guerre mondiale. Y compris en France. Pourquoi un tel déferlement de violence contre une population civile par une armée lourdement armée ? Cela faisait partie de la politique de la terreur qui était censée soumettre les Algériens. Cet esprit de suffisance et cette arrogance ne pouvait que brouiller la vision des dirigeants français. Car les massacres de ce jour-là ont produit un phénomène inattendu par la petite cervelle des colonialistes. Phénomène que résume très bien, 60 ans après, le mensuel français « Le Monde Diplomatique » daté du mois de mai 2005. Il avait titré : « La guerre d’Algérie a commencé à Sétif ». En effet et pendant que la France et les Français chantaient et dansaient dans les rues pour fêter de manière grandiose le centenaire de l’occupation de l’Algérie, des Algériens comme Messali Hadj ont tiré les leçons des limites des révoltes locales pour se diriger vers un mouvement nationaliste axé sur le combat politique. C’est ainsi qu’en 1926 était fondé « l’Etoile Nord-Africaine » (ENA), qui après son interdiction a été remplacé, en 1937, par « Le parti du Peuple Algérien » (PPA) qui fut, à son tour, dissous et laissé place, en 1946, au « Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques » (MTLD). D’autres partis algériens ont également vu le jour tels «l’Association des oulémas musulmans algériens» créé en 1931 par Abdelhamid Ben Badis et « l’Union démocratique du manifeste algérien » qui a vu le jour en 1946 et était dirigé par Ferhat Abbas. Ainsi donc le mouvement nationaliste qui était embryonnaire s’est consolidé et s’est même multiplié après les massacres du 8 mai 1945. Et ce que n’avait prévu aucun dirigeant de la France coloniale, une année après sa création, le MTLD, convaincu par les massacres du 8 mai 1945 que la lutte politique ne suffira pas pour obtenir l’indépendance, donna naissance, en 1947, à son « Organisation Spéciale » (OS) qui était une structure militaire secrète. En 1950, la France découvrit l’existence de l’OS et a mis tous ses moyens pour étouffer ses actions. Ne baissant pas les bras et déterminés à libérer l’Algérie par les armes, une poignée d’Algériens œuvraient dans l’ombre à la mise au point de cet objectif. Ils étaient 22 jeunes algériens à avoir fondé, en 1954, le « Comité Révolutionnaire d’Unité et d’Action » (CRUA). Ils ont tenu leur réunion le 23 juin 1954 au cours de laquelle ils se sont mis d’accord « pour la révolution illimitée jusqu’à l’indépendance totale ». Pour ce faire, ils ont désigné six d’entre eux, Larbi Ben M’Hidi, Didouche Mourad, Mostefa Ben Boulaïd, Mohamed Boudiaf, krim Belkacem et Rabah Bitat, pour diriger la lutte armée sous l’égide du Front de Libération National (FLN) créé à cet effet. Tous avaient vécu l’enfer du 8 mai 1945. Le 1er Novembre 1954, les premiers faits d’armes ont eu lieu. Ils figuraient dans le message-programme annonçant l’indispensable recours à l’option armée et dans lequel ils savaient que « la lutte sera longue mais l’issue certaine… Quant à nous, résolus à poursuivre la lutte, sûrs de tes sentiments anti-impérialistes, nous donnons le meilleur de nous-mêmes à la patrie » ont-ils déclaré conscients de la gravité de leur décision. La moitié d’entre eux ne vivra pas le jour de l’indépendance. En effet, la guerre de libération nationale en Algérie a duré huit longues années. Elle nous a coûté un million et demi de martyrs. Mais au bout, l’occupant a été chassé et notre indépendance acquise. C’est le résultat auquel a abouti la politique de la terreur pratiquée par la colonisation par ses massacres. « À quelque chose malheur est bon » dit le proverbe. Les Algériens peuvent en témoigner pour l’avoir vécu dans leur chair. Dans son aveuglement raciste et sa cruauté, la France coloniale n’avait pas prévu l’engagement et le sacrifice d’un peuple prêt à tout pour briser les chaînes de la domination et de la spoliation !
Zouhir Mebarki
zoume600@gmail.com

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