La sortie illégale et lunaire de Macron qui a soutenu, au mépris de la légalité internationale, le prétendu plan d’autonomie proposé par le Maroc pour le règlement du conflit du Sahara occidental, ne repose sur aucun fondement légal selon de nombreux analystes qui estiment que le président français n’a fait qu’assumer une position et une posture qu’il a toujours adoptée en mode « off the record ».
Le site espagnol d’information « descifrandolaguerra.es », a indiqué dans sa dernière édition et confirme cette hypothèse en affirmant que, « en appuyant le prétendu plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental, Paris a simplement officialisé son soutien à l’occupation de ce territoire par le Maroc. « D’une certaine manière, la France ne fait qu’officialiser ce qui était déjà sa position de facto dans le conflit sahraoui », a souligné le site dans un article consacré à la lettre adressée par le président Macron au roi du Maroc dans laquelle il affirme considérer que « le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine ». Rien que ça, Macron se permet d’offrir à autrui un territoire qui ne lui appartient pas et qui est placé sous le régime de territoire non autonome, donc à décoloniser par les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU et de l’Union Africaine et par les arrêts de la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour européenne de justice (CJUE).
Le site affirme que la position de Paris dépasse aujourd’hui le cadre des nations unies et se situe en marge de la légalité internationale, précisant que la France a toujours été le principal soutien de Rabat sur la scène internationale, et son soutien au plan d’autonomie était un fait connu et reconnu malgré ses tentatives de le cacher.
Il faut rappeler dans ce cadre la position du Gouvernement de le République arabe sahraouie démocratique, qui a critiqué « la sortie de Macron » tout en affirmant que Paris ne pourra plus être un partenaire fiable dans les initiatives de relancer le processus de mise en oeuvre du référendum pour l’autodétermination du peuple sahraoui.
Le site abonde dans ce sens en affirmant que, « en prenant ce tournant, Paris rompt avec sa position historique qui, comme l’essentiel de la communauté internationale, repose sur une résolution du conflit conformément aux résolutions des Nations unies, des résolutions qui reconnaissent, depuis 1966, le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, un principe souligné dans les accords de cessez-le-feu de 1991 et la création de la MINURSO».
Dans son analyse, descifrandolaguerra.es », rappelle que la France a toujours apporté un soutien important à l’occupation marocaine du Sahara occidental. Les entreprises et citoyens français ont été les premiers à arriver sur le territoire sahraoui après la marche verte, et le capital français est à l’origine de plusieurs projets économiques réalisés dans les territoires occupés. Pis encore, le site révèle que la France a également joué « un rôle clé » dans la fourniture d’armes lors de la première guerre au Sahara occidental (1975-1991), « intervenant même militairement pour sauver un Maroc dépassé par l’efficace résistance sahraouie ». Aujourd’hui, « ce soutien prend désormais la forme d’une déclaration institutionnelle mais qui ne modifiera ni le statut juridique du Sahara occidental qui reste un territoire non autonome en attente de décolonisation selon l’ONU, ni la guerre qui se déroule depuis novembre 2020 entre les deux pays ».
Le site estime par ailleurs que la décision française pourrait se traduire, sans aucun doute, par toutes sortes d’obstacles au mandat de la MINURSO (mission de l’ONU pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental) et à la résolution du conflit, déjà dans l’impasse. Le média espagnol souligne que les bouleversements politiques en Afrique, avec un nombre considérable de gouvernements qui ont tourné le dos à la France, expliquent la décision de soutien de Paris au plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental. Elle consolide ses relations avec son meilleur allié sur le continent à l’heure où elle est boutée des régions qu’elle considérait comme sa chasse gardée.
René Naba : « Macron a foulé aux pieds la légalité internationale »
Pour sa part l’écrivain et journaliste René Naba estime que la contestation par des élus français, qu’ils soient d’origine algérienne ou non, ainsi que par les partis de gauche (parti socialiste EELV PCF ), de la lettre du Président Macron dans laquelle il soutenait la marocanité du Maroc sur le Sahara occidental, repose sur des considérations de droit international, des résolutions de l’ONU, ainsi que sur des décisions de la Cour internationale de Justice (CIJ) et de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
Dans son argumentaire il cite un avis consultatif rendu par la Cour internationale de Justice le 16 octobre dans lequel elle concluait que bien que des liens historiques existent entre le Maroc et certaines tribus du Sahara occidental, ces liens ne justifient pas une revendication de souveraineté territoriale par le Maroc. La CIJ a affirmé que le peuple sahraoui a droit à l’autodétermination et que le processus de décolonisation doit respecter ce droit fondamental. La CIJ a estimé dans son rendu que le Sahara occidental n’était pas un territoire sans maître (terra nullius) au moment de la colonisation espagnole et qu’il était habité et organisé, rejetant ainsi l’idée qu’il s’agissait d’un territoire sans maître au moment de sa colonisation par l’Espagne.
Tout en reconnaissant des liens juridiques d’allégeance entre le sultan du Maroc et certaines tribus du Sahara occidental mais la CIJ rejetait tout lien de souveraineté territoriale entre le Sahara occidental et le Maroc. « En conséquence, ces liens n’ont pas été jugés suffisants pour justifier une revendication de souveraineté par le Maroc ». Partant de ces attendus, la CIJ a donc clairement affirmé que le peuple sahraoui avait droit à l’autodétermination, conformément à la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale des Nations unies.
René Naba rappelle également que la Cour de Justice européenne (CJUE) a rendu plusieurs arrêts confirmant que le Sahara occidental est considéré, en vertu du droit international, comme un territoire distinct et séparé du Maroc. Parmi ces décisions, l’arrêt du 21 décembre 2016 où elle a jugé que les accords d’association et de libéralisation entre l’Union européenne et le Maroc ne s’appliquaient pas au Sahara occidental. L’arrêt du 27 février 2018 dans lequel elle confirme que l’accord de pêche entre l’UE et le Maroc n’était pas applicable au Sahara occidental et aux eaux adjacentes. Plus récemment, le 29 septembre 2021, le Tribunal de l’Union européenne a annulé deux accords commerciaux entre l’UE et le Maroc, l’un concernant les produits agricoles et l’autre la pêche, en raison de leur application au Sahara occidental sans le consentement du peuple sahraoui. En mars 2024, l’avocate générale de la CJUE a rendu des conclusions soutenant l’annulation de l’accord de pêche entre l’UE et le Maroc, affirmant que cet accord ne respectait pas le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.
René Naba conclut en affirmant que ces positions juridiques et politiques montrent clairement que l’opposition des partis de gauche à la décision de Macron n’est pas motivée par une allégeance à l’Algérie, mais par un attachement au respect des principes du droit international et des décisions légales en vigueur. Il estime que les accusations portées contre ces élus de soutenir l’Algérie détournent l’attention de leur véritable engagement, qui est de défendre des principes universels et de respecter les résolutions de l’ONU, ainsi que les décisions de la CIJ et de la CJUE.
Slimane B.