Certes pas de la même ampleur que des images vues en juillet dernier, de longues files d’attente se sont formées devant les bureaux de Poste d’Hussein-Dey et d’Alger-centre, comme nous l’avons constaté, hier. une période où les pensions de retraites, les salaires et autres prestations postales pouvaient être accomplies au niveau des guichets.
Cela en dépit des mesures annoncées cette semaine par le ministre de la Poste et des Télécommunications, Brahim Boumzar, d’assurer la liquidité pour palier à de tels problèmes, dont la prolongation de la période de neuf jours consacrée au retrait des pesions de retraite. Hier, samedi, c’était aussi le deuxième jour du week-end que la plupart des Algériens préfèrent en profiter pour régler leurs factures d’électricité, d’eau et de téléphone. Selon nos constatations, la mesure exceptionnelle prise récemment par le ministère de tutelle n’a pas permis de résorber le flux de clients, pourtant le premier objectif est d’éviter la constitution de foules, attitude dangereuse en ces temps de pandémie.
Au niveau des bureaux de poste que nous avons visités, la liquidité était disponible, nous a-t-on rassuré sur place, mais la colère de la longue durée d’attente et la frustration ont été partagées par la majorité des clients que nous avons interrogés. Le respect des mesures d’hygiène a été aléatoire. Des dizaines de personnes, dont la majorité est âgée, les uns derrière les autres, certains avec des masques, d’autres profitant de la période d’attente pour se regrouper et «remplir» le temps avec des discussions, telles étaient les images devant les bureaux de poste visités. Même les distributeurs automatiques n’échappent pas à cette réalité. « J’attend depuis plus d’une heure, rien. J’ai un ticket portant le numéro “144”, et jusqu’à maintenant le préposé chargé d’organiser la file d’attente vient seulement d’appeler le numéro “90”. Mais qu’est-ce qu’on va faire, à part de prendre son mal en patience ! », nous a expliqué un sexagénaire rencontré au environ de 11H devant le bureau de poste d’Hussein-Dey.
Les personnes âgées incommodées
La majorité des clients était des personnes âgées venues s’assurer que l’argent de leurs pensions, allocations ou aides sociales a été versé sur leurs comptes, et de le retirer. Les clients sont tenus d’attendre à l’extérieur du bureau de poste, sans qu’il y ait des marquages sur le sol ou des agents pour faire respecter une distance de sécurité entre chaque client.
À l’entrée du bureau de poste, deux agents contrôlent les flux et font entrer les personnes au compte-gouttes. L’entrée est limitée à seulement 8 clients à l’intérieur, afin d’éviter un grand regroupement et un débordement de la situation. Des tickets sont distribués à tous les clients attendant à l’extérieur, et dès qu’une vague de 8 personnes en sort, un agent fait l’appel de 8 autres pour entrer. Même ceux venant pour d’autres prestations (payer des factures d’électricité, eau et téléphone, déposer un mandat postale, acheter des timbres) sont tenus de faire la queue à l’extérieur et d’attendre avec les autres, nous explique-t-on au niveau de la Poste. Ce qui suscite des incompréhensions et de la confusion chez une partie des clients.
Un jeune venu payer sa facture de téléphone est surpris de voir autant de monde : « Je suis venu pour payer ma facture de téléphonie fixe, on m’a demandé de prendre un ticket et de faire la queue. Je crois que je vais devoir repasser une autre fois, peut-être que j’aurais plus de chance ». Étant donné que la quasi-totalité des clients sont des personnes âgées, le préposé prononce les numéros oralement, sans aucun affichage électronique pour ceux qui entendent mal. Au milieu de la confusion, la scène vire parfois au ridicule : il est 10H40, quand l’agent prononce le numéro “120”, un quinquagénaire répète à son entourage en s’amusant : « le “120”, où est le détenteur du “120” ? Ah ! Il est là ! Félicitations vous avez gagné la loterie ! » Les présents ne manquant pas d’éclater de rire.
Même topo à la plus « Grande-poste » d’Algérie
Même situation à la Grande Poste où, lors de notre passage, nous croisons un vieux au bord des nerfs, s’emportant de la longue durée d’attente. « Je viens de Rouiba, les Postes y sont confrontées quotidiennement à un rush de clients et à chaque fois quand notre tour arrive on nous dit que le réseau est en panne, donc il faut revenir le lendemain. On attend pour attendre. Alors, je suis venu ici », a-t-il témoigné, un peu désemparé face à la crainte de retourner bredouille. Quelques mètres devant lui, son voisin de file d’attente, qui attend depuis une heure, s’interroge : « Je ne m’attendais pas à ce que ce soit si long. Les retraités ont pourtant tout le temps pour encaisser leur argent. Je ne comprends pas pourquoi tout cet empressement ». Face à une mauvaise organisation de la file d’attente à l’extérieur, des clients prennent l’initiative, de temps en temps, pour sensibiliser les autres clients quant à la nécessité d’observer la distanciation physique et de ne pas trop se rapprocher les uns des autres. « Laissez des espaces vides entre vous, SVP ! Il se peut que vous soyez entourés de gens potentiellement contaminés. Prenez vos dispositions ! Protégez-vous ! », crie un client, rencontré dans la matinée d’hier devant la Grande Poste. Depuis la dure tension sur la liquidité de juillet dernier, les autorités ont encouragé les clients à utiliser les guichets automatiques bancaires (GAB), ainsi que le recours aux services du é-paiement d’Algérie Poste et le télépaiement des factures. Or, ceux qui n’ont pas de cartes « Eddahabya » ou de cartes bancaires, n’ont d’autres solutions que de faire la queue et attendre leur tour. Hier, faut-il le rappeler, nous avons constaté que des files d’attente se sont formées devant les distributeurs automatiques d’Algérie Poste, avec des dizaines qui attendent pour pouvoir y glisser leurs cartes et retirer de l’argent.
Hamid Mecheri
