Robert Smith (The Cure), le rappeur anglais Skepta, ou encore la musicienne malienne Fatoumata Diawara: voilà un petit aperçu du générique insensé du dernier Gorillaz, laboratoire d’un Damon Albarn toujours plus ambitieux.
Quand le single «Strange Timez» a été lâché en éclaireur du nouvel album, «Song machine», qui sort ce vendredi (chez Warner), le timbre reconnaissable du chanteur de Cure a fait le buzz. «Je suis un fan de Robert Smith depuis l’enfance. J’ai toujours adoré The Cure et spécialement Robert. Robert est un être humain incroyable et passionnant», confie à l’AFP Damon Albarn. «C’est l’une de ces choses qui s’est faite après des doutes, des conversations et emails… puis sur un coup de tête, en une nuit et le lendemain matin, on avait écrit la chanson», ajoute-t-il, «fier du résultat». L’ex-leader sautillant de Blur, un des groupes phares de la britpop des années 1990 – opposé par la presse à Oasis – invite de nombreuses figures de la pop dans cet opus pour leur rendre hommage. On y trouve ainsi des glorieux aînés – Robert Smith, Elton John, Peter Hook, ex-bassiste de Joy Division et New Order – ou certains pairs d’Albarn comme Beck. Mais pas seulement. Sont également conviées des signatures de la musique africaine d’hier et d’aujourd’hui, comme le pilier de l’afro-beat, récemment décédé, Tony Allen, Fatoumata Diawara ou encore la Sud-Africaine Moonchild Sanelly. Des rappeurs comme Skepta ou 6lack, pointure d’Atlanta, participent également à l’entreprise.
«Vrai dialogue musical»
Soit tout le spectre musical d’Albarn, qui a rapidement montré qu’il était bien plus que le beau gosse derrière le micro de Blur. La richesse de son bagage musical a pointé dès l’apparition de Gorillaz au début des années 2000. Le secret a été rapidement éventé: c’est bien lui qui était derrière cette formation virtuelle et conceptuelle, dissimulée derrière des visuels signés de Jamie Hewlett, dessinateur de la BD culte «Tank Girl». Trip-hop et hip-hop étaient donc aussi dans ses radars. «Potentiellement, il aurait pu être les frères Gallagher (ex-piliers d’Oasis) à lui tout seul, continuer à faire de la britpop. Mais Gorillaz a été la première concrétisation de son éclectisme musical», commente pour l’AFP Olivier Cachin, journaliste à Rock&Folk et auteur de plusieurs ouvrages sur les musiques actuelles. Puis il y a eu l’album «Mali music», basé sur des échanges avec des artistes maliens, également à l’aube des années 2000.
«Une place à part»
«Avec cet album, Albarn a abordé l’Afrique dans un vrai dialogue musical, loin des concerts caritatifs où des artistes européens parlaient de ce continent sous l’angle humanitaire», poursuit Olivier Cachin. Mais là encore, Albarn ne s’est jamais laissé enfermer dans la case musique du monde. Comme quand il enrôle Tony Allen, feu batteur iconique nigérian, dans un super-groupe, The Good, The Bad and The Queen, qui réunit aussi l’ex-bassiste de The Clash, Paul Simonon et l’ancien guitariste de The Verve, Simon Tong. «Là, c’est un projet qui n’est pas du tout +africaniste+, Tony Allen était là bien loin de l’afro-beat, il amenait une touche particulière à un projet proche de la pop anglaise. Albarn occupe une place à part», décrypte encore Olivier Cachin.
Et à partir du milieu des années 2000, celui qui avait déjà touché à des B.O. de films, a également posé sa griffe sur opéra et comédie musicale. Pour sa dernière incursion dans le monde de l’opéra, «Le Vol du Boli», au Théâtre du Châtelet à Paris en octobre, il s’est associé à l’un des plus célèbres réalisateurs africains, le Mauritanien Abderrahmane Sissako («Timbuktu»). Et le chœur féminin est mené par Fatoumata Diawara, toujours dans la boucle. Comme Albarn et sa bande aiment la France, Gorillaz a d’ores et déjà annoncé un show exceptionnel le 3 juin 2021 dans le cadre des 10 ans du festival francilien We Love Green.