Le sud de la Syrie est le théâtre d’une escalade inquiétante, alors que les tensions communautaires entre factions druzes et tribus arabes s’intensifient dans la province de Soueida, menaçant d’embraser toute la région. La province de Soueida, majoritairement habitée par la communauté druze, connaît une détérioration rapide de la situation sécuritaire, marquée par des affrontements violents entre factions armées druzes et groupes tribaux arabes dans plusieurs villages de l’ouest de la région. Selon des sources locales, ces combats, qui se sont étendus à diverses localités rurales, sont les plus intenses depuis des mois, laissant présager une spirale de violence aux conséquences régionales. Ce regain de tension découle de différends profonds entre groupes communautaires rivaux, exacerbés par l’absence d’un État fort et l’enlisement du conflit syrien. Dans un développement préoccupant, les tribus arabes de Deraa, province voisine au sud de la Syrie, ont annoncé la mobilisation générale. Par cet appel au « natif al- ‘āmm », elles entendent soutenir leurs membres présents à Soueida et faire face aux factions druzes, dans ce qui est désormais perçu comme un conflit ouvert entre deux composantes majeures du tissu social syrien dans le sud du pays. Cette mobilisation pourrait transformer des affrontements localisés en conflit tribal régional, ravivant des blessures communautaires déjà profondes, et rendant la pacification encore plus complexe. Ce climat de tension n’est pas resté cantonné aux zones rurales. À Alep, au nord du pays, des incidents graves ont été signalés au sein du campus universitaire. Des étudiants issus de la communauté druze (également appelés « mouwahhidoun ») ont été agressés dans les résidences universitaires, selon des témoignages recueillis par des sources étudiantes. Face à ces actes d’hostilité attisés par un discours sectaire virulent, les autorités universitaires ont procédé à l’évacuation préventive des étudiants druzes, qui ont été transférés vers les quartiers d’alAchrafiyé et de Cheikh Maqsoud, zones sous le contrôle des Forces démocratiques syriennes (FDS), dans une tentative de garantir leur sécurité. Les récents développements font craindre une extension rapide du conflit intercommunautaire dans un pays déjà fragmenté par plus de treize années de guerre. Le sud syrien, qui avait jusqu’ici été épargné par les grandes batailles des dernières années, semble à son tour plongé dans un cycle de revanche, d’alliances locales et de confrontations armées. Cette flambée survient dans un contexte national marqué par la paralysie politique, la crise économique aiguë, et l’effondrement des services publics, ce qui rend toute médiation d’autant plus difficile. Des voix appellent à l’urgence d’un dialogue intercommunautaire, et à l’intervention de figures religieuses et sociales pour désamorcer les tensions avant qu’elles ne dégénèrent en guerre civile locale. Mais en l’absence de volonté politique claire et dans une région livrée à elle-même, les perspectives de désescalade restent incertaines.
M. Seghilani