Le « Oui » ou le « Non » ? La campagne référendaire sur le projet d’amendement de la Constitution a débuté hier sous le slogan : « Novembre 1954 : la libération, Novembre 2020 : le changement ». Aujourd’hui, nous sommes à J – 19 (les partisans de OUI ou de NON ont 21 jours pour convaincre) avant la date du référendum populaire, le 1er novembre prochain. L e président de l’ANIE, Mohamed Charfi, a indiqué récemment que le corps électoral compte actuellement 24 111 081 électeurs, estimant qu’il enregistrera, après révision, entre 500 000 à 600 000 nouveaux inscrits, ajoutant que le nombre de citoyens enregistrés via la plate-forme numérique a atteint 58 628 inscrits, alors que 33 280 autres ont été radiés des listes électorales. Le projet de l’amendement de la Constitution, élaboré par un groupe d’experts en Droit constitutionnel, sur la base de 5 018 propositions d’amendement émanant de différentes franges de la société, de personnalités nationales et de forces politiques, a été adopté le 6 septembre en Conseil des ministres, avant de recevoir l’approbation des deux chambres du Parlement, successivement le 10 et le 12 du même mois. L’ANIE a annoncé, le 28 septembre dernier, le lancement d’une campagne de sensibilisation en prévision du référendum et publié un arrêté fixant les règles de la campagne référendaire, en application de la loi organique relative au régime électoral. Ces règles disposent, notamment, que la campagne sera animée par le staff gouvernemental, les partis politiques disposant d’un groupe parlementaire au niveau des deux chambres du Parlement ou de 10 sièges au sein des deux chambres du Parlement, ou des sièges au sein des Assemblées populaires locales dans au moins 25 wilayas. Le temps de parole réservé aux intervenants dans les médias audiovisuels publics a été défini par l’ANIE, en coordination avec l’Autorité de régulation de l’audio-visuel (ARAV).
L’ANIE MET LES BOUCHÉES DOUBLES
La campagne référendaire peut-être menée, aussi, par voie d’affichage, de distribution de dépliants, de correspondances et de tous les moyens écrits ou électroniques. À l’étranger, l’affichage se fait aux sièges des représentations diplomatiques et consulaires. L’opération de sensibilisation et la campagne référendaire, qu’il s’agisse de médias audiovisuels ou par affichage, les moyens écrits ou électroniques sont soumis à une habilitation préalable de l’ANIE étant chargée exclusivement de la préparation, l’organisation, la gestion et la supervision des élections et des référendums. A ce titre, « tous les intervenants de la campagne référendaire sont tenus de respecter les dispositions législatives et réglementaires en vigueur ». Ce lundi, Charfi a indiqué que les moyens matériels et logistiques nécessaires ont été mobilisés pour que le référendum se déroule « dans la sérénité et la régularité ». Il aussi précisé qu’un réseau de visioconférence a été mis en place à cette occasion et permettra une « plus grande réactivité et une prise en charge immédiate à d’éventuels problèmes qui peuvent se poser le jour du scrutin ». Il a souligné que les créneaux d’expression « seront ouverts à ceux qui sont pour et ceux qui sont contre le projet d’amendement de la Constitution », affirmant que cette démarche « reflète la nouvelle dynamique entamée depuis l’élection présidentielle du 12 décembre 2019 pour la consécration de « l’Algérie nouvelle qui est déjà en marche ». Le référendum, prévu par le décret présidentiel signé le 15 septembre dernier portant convocation du corps électoral, intervient pour répondre aux exigences de « l’édification de l’Etat moderne et les revendications du Hirak populaire authentique béni ». La nouvelle loi fondamentale du pays devrait, selon ses promoteurs, ouvrir une nouvelle ère dans l’Histoire de l’Algérie nouvelle, en rompant avec plusieurs décennies de corruption et de contrôle par des hommes d’affaires des affaires politiques et publiques des institutions de l’Etat. La nouveauté de cette échéance électorale est que le mouvement associatif sera autorisé pour la première fois à y prendre part, à travers l’animation de meetings populaires sur la sensibilisation des Algé- riens sur l’importance de participer et d’aller exprimer sa voix. Plus de 70 associations et organisations professionnelles, réunis sous la bannière de « Nouveau processus », ont salué et exprimé leur adhésion à l’initiative de la nouvelle Constitution initiée par le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune.
LES PARTISANS ET LES OPPOSANTS
Côté formations politiques, si les soutiens traditionnels du gouvernement comme le FLN, RND, TAJ et autres est déjà acquise avant même la divulgation de son contenu, les partis contre la nouvelle Constitution s’affichent timidement : en plus des partis dits « démocrates » et « laïcs » comme le FFS et le RCD,– qui font ou avaient fait partie de PAD (Pacte pour l’alternative démocratique), s’ajoute des formations islamistes comme le MSP et FJD d’Abdallah Djaballah, qui ont appelé à voter Non. Dans la rue, certains citoyens lambdas n’ont toujours pas fait leur choix, donnant l’impression d’être portés par d’autres préoccupations comme les problèmes des Transports publics dont beaucoup sont à l’arrêt et au service réduit, ou également par la situation sanitaire du Covid- 19. Sur les réseaux sociaux, seulement un axe de la Constitution a focalisé l’essentiel des débats : les échauffourées médiatiques et politiques entre Ahmed l
Laraba, président du Comité chargé de la rédaction de la Constitution, et les partis islamistes qui le critiquent pour avoir « réduit la place de la religion », ont donné lieu parfois à des mauvaises interprétations par les internautes, qui considèrent la nouvelle Constitution comme une attaque contre l’Islam. Les partis et associations de tendance islamiste tentent aussi de jouer sur la fibre de l’identité, en redirigeant leur animosité contre le statut intouchable qu’accorde la nouvelle constitution à Tamazight. D’autres internautes, par ailleurs, ont exprimé des craintes quant à une large abstention du fait que la nouvelle Constitution n’a pas été assez « médiatisée » et « expliquée » aux électeurs, regrettant que l’absence de sensibilisation poussera la population à se sentir pas concernée par le référendum, alors qu’il est censé ouvrir une nouvelle page dans le mode de gouvernance de pays. Beaucoup espèrent en effet que la décision de l’ANIE de permettre aux partisans et anti référendum de prendre part à la campagne donnera la possibilité aux électeurs d’y construire une opinion claire afin de faire leur choix.
Hamid Mecheri