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RÉTROSPECTIVE POLITIQUE : Quand la pandémie remet en question le rôle des partis

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En passant en revue les évènements politiques sur la scène nationale en 2020, on est vite frappé par l’absence des acteurs politiques les plus en vue. Et ce n’est pas faute d’évènements ou de grandes échéances électorales impliquant la mobilisation des forces vives du pays.
Crise sanitaire, référendum sur la Constitution, situation socioéconomique des plus rudes avec des grandes entreprises publiques et privées en difficultés financières, menant à des licenciements massifs de travailleurs, auxquels s’ajoutent d’autres préoccupations de l’opinion publique. D’ailleurs, l’une des conséquences de cette désertation du terrain est le fort taux d’absentéisme lors du dernier scrutin référendaire, commentent les observateurs qui s’accordent à dire que la classe politique s’est confinée littéralement avant l’heure. Cela pose la question du renouvellement de la scène politique et le changement de ses acteurs avec de nouvelles têtes et de nouvelles visions.

Des acteurs retardataires
À force de subir et de se contenter de déclarations et réactions tardives, la classe politique nationale s’est distinguée, cette année, par son absence beaucoup plus que pas ses fortes déclarations ou positions. Plus de dix mois de mesures de confinement et de crise sanitaire sans qu’aucun acteur ne songe à s’interférer dans la recherche de pistes et d’issues à la crise. Certes, on ne leur demande pas de faire des recherches scientifiques, mais au minimum d’êtres à la première ligne dans l’assistance à une population démunie et précaire et de se solidariser avec beaucoup de familles qui ont perdu leurs sources de survie. Aucun parti politique n’a mobilisé ses militants pour organiser des campagnes de solidarité et récolter des fonds pour approvisionner en denrées alimentaires ou matériels médicaux des hôpitaux qui font face à un déficit criard. point de tout cela, sauf cet égoïsme narquois : des chefs de partis qui distribuent de petites quantités de nourriture ou de masques à des citoyens en prenant bien sûr le soin de se faire entourer des caméras ou publier leurs images sur les réseaux sociaux.
Il y a lieu de relever quelques exceptions quand, même, comme la proposition du président de Jil Jadid, Soufiane Djilali, qui était le premier à appeler à l’installation d’hôpitaux de campagne pour pallier le manque de lits dans les hôpitaux. Face à une marginalisation sociale, les citoyens subissent aussi la marginalisation de leur élite politique. Les islamistes du MSP, réputés si prompts à réagir aux évènements nationaux n’ont pas fait exception. En été dernier, alors que la pandémie est à son apogée et que les structures hospitalières font face à une saturation des lits et au manque en médecins et infirmiers, Abderrazak Makri, médecin de formation, a déclaré qu’il se mettra au service de secteur de la Santé pour assister les patients du Covid-19.
Ces déclarations ont été tournées ensuite en dérision après que, quelques jours plus tard, interrogé par des journalistes s’il comptait vraiment retrouver sa blouse de médecin, il a affirmé qu’il ne peut pas faire partie du personnel médical car il n’a jamais exercé ! Dans le courant nationaliste, dont des partis comme le FLN et RND de la défunte Alliance présidentielle ont pourtant tout fait pour s’offrir une nouvelle virginité et se faire pardonner contre la colère citoyenne, les choses n’ont pas évolué comme il le faut. Dans le cas du FLN, ses déboires avec la Justice – deux SG emprisonnés – et les querelles de zaïmisme interne l’ont effacé de la scène si ce n’est ces quelques communiqués laconiques sur le « soutien indéfectible » qu’il exprime mécaniquement à l’occasion de chaque annonce gouvernementale. Quid du courant dit démocrate et laïc ? La politique de la « chaise vide » et de « tout dénoncer » a prouvé ses limites: ces partis continuent à tirer sur toute démarche entreprise par le gouvernement sans proposer d’alternative.

Comment les politiques ont raté le train 2020
L’élection présidentielle de 12 décembre 2019 est censée apporter de grands changements et chamboulements dans la vie politique, car intervenant suite à un mouvement populaire (Hirak) s’opposant frontalement au statu quo politique actuel. Cependant, une année après cette élection, on remarque que ce sont toujours les mêmes visages, les mêmes formations politiques et les mêmes discours. C’est dans ce même contexte politique que les prochaines élections législatives et locales auront lieu. Ce qui fait craindre aux commentateurs de la scène politique que ces conditions politiques ne feront que renforcer l’immobilisme ambiant et favoriser le retour des forces politiques ayant concouru à la crise multidimensionnelle d’avant le 12 décembre 2019. Un constat renforcé par le fait que l’année qui s’achève n’a aucunement permis l’émergence de nouvelles forces politiques représentatives au sein de la société.
La crise sanitaire provoquée par la pandémie a bien plombé la scène nationale et empêché de nouvelles forces de se structurer et de jouer pleinement leur rôle dans cette conjoncture particulièrement difficile et sensible. Le résultat est que la classe politique a raté son train, une occasion en or pour se montrer plus entreprenant et prendre de nouvelles couleurs pour aborder l’ère de l’Algérie nouvelle qui est un espoir formulé par les milliers de manifestants du Hirak. D’aucuns y voient mal comment des gens qui ont servi des décennies durant le système déchu et été derrière la gabegie et les malheurs subis, d’être aujourd’hui un acteur de changement pour remettre l’Algérie de nouveau sur les rails.

Des élections législatives et locales
Les rendez-vous électoraux sont les seuls – et rares occasions – où les partis politiques vont à la rencontre des électeurs, ce qui veut dire que l’existence même de ces partis (notamment les FLN, RND et autres) est beaucoup plus liée aux agendas électoraux que de répondre aux revendications et attentes de peuple. Les prochaines élections législatives apporteront-elle du nouveau ? Force est de constater que la dissolution de la chambre basse du Parlement en tenant de nouvelles élections législatives a été toujours sur les langues juste après l’élection de Tebboune. En cette perspective, on remarque que beaucoup de députés qui, depuis leur élection en 2017, n’ont fait jamais entendre aucune voix, qui sortent aujourd’hui à la dernière minute pour se faire remarquer par des discours populistes et critiques envers le gouvernement. C’est dire que la course à la députation a commencé non pas sur la base de programmes politiques, mais comme se fait traditionnellement en recourant au populisme et des discours de conjoncture. On craint ainsi, à l’occasion de ces législatives, le retour des phénomènes de « chkara » ou d’achat des sièges de la députation par l’argent sale, même si le président Tebboune s’est engagé clairement à œuvrer à moraliser la vie politique et lutter contre les pratiques malsaines.
Il y a tout de même un phénomène qui mérite contemplation : cette toute nouvelle formation appelée « Al Massar El Djadid » née en plein Hirak, que nombre d’observateurs prédestinaient à son jeune leader de jouer un grand rôle dans la future carte politique nationale, au vu de la grande médiatisation dont il bénéficie. On peut dire que ce parti est la seule force qui a émergé actuellement. Il y a aussi la grande question : le président Tebboune qui a toujours dit ne pas appartenir à une formation politique, optera-t-il pour une coalition de forces politiques – une alliance présidentielle – pour bénéficier d’un appui à sa politique et ses réformes vu les enjeux qui attendent le pays ? 2021 nous réserve la réponse !
Hamid Mecheri

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