Ni le renoncement au 5e mandat, ni le report de la Présidentielle, ni la feuille de route proposée par le pouvoir, ni les têtes sacrifiées en son sein jusque-là, et ni encore la sortie de Gaïd Salah appelant à l’application de l’article 102 sur le Président, ne sont parvenus à atténuer la mobilisation populaire et citoyenne des Algériens. Preuve en est, ils étaient encore des centaines de milliers à marcher à Alger, Oran, Constantine, Tizi-Ouzou, Annaba, Béjaïa, Jijel, Sétif, Skikda, Sidi Bel Abbès, Ain Témouchent, Saïda, Laghouat, Djelfa, Ghardaïa, Ouargla, El Oued…Tous pour dire, encore une fois, non à la dernière solution de sortie de crise proposée par le chef d’état-major de l’ANP.
Pour le sixième vendredi de suite, en effet, les marches nationales de contestation pacifique qui secouent le pays depuis le 22 février dernier, se poursuivent avec la même mobilisation qui va crescendo, la même intensité et la même détermination si ce n’est pour porter plus haut encore le niveau des revendications, comme celle de rejeter les dernières propositions de Gaïd Salah, chef d’état-major de l’ANP, appelant à l’application de l’article 102 de la Constitution pour destituer le président Bouteflika.
À Alger, comme partout dans les régions du pays, un mot d’ordre sort de la bouche et lu sur des pancartes qui dominent pour le vendredi d’hier: « Non à l’application de l’article 102 de la Constitution ! », » Prière de consulter l’article 7″ (NDLR: ‘’Le peuple est la source de tout pouvoir’’). Ou encore, « Non au prolongement du 4e mandat du président Bouteflika » et d’autres slogans hostiles au système ont été scandés et écrits sur des banderoles, hier, lors d’une mobilisation gigantesque des citoyens qui ont adressé un message « décrypté » au vice-ministre de la Défense nationale, chef d’état-major de l’ANP, Ahmed Gaïd Salah, qui a lancé, mardi dernier, un appel à l’application de l’article 102 de la Constitution. Rappelons que toutes les mesures qui ont été prises, jusque-là, par le chef d’État n’ont pas convaincu les Algériennes et Algériens qui retrouvent ainsi la rue à chaque fois pour réclamer son départ, le changement du régime et celui du système politique en place. « Le peuple est déterminé à aller vers un changement rationnel, synonyme d’un avenir meilleur pour l’Algérie », estime un jeune homme interrogé dans la foule, à la Place Maurice Audin, avant de poursuivre ses propos » Aujourd’hui, c’est le vendredi du refus de l’article 102. Quand nous avons réclamé l’application de cet article, personne n’a pris la peine de nous écouter, alors qu’aujourd’hui, ils veulent l’appliquer ! C’est trop tard ! Maintenant, nos revendications ont changé, et elles vont évoluer encore si le système politique reste en place », affirme notre interlocuteur.
Dans le même sillage, une dame rétorque : » l’article 102 ? Nous l’avons dépassé. On aurait pu l’appliquer il y a longtemps mais pas après un mois de contestation. Le peuple est au-dessus de toutes les lois. Il est le seul souverain comme le prévoit l’article 7 de la même Constitution. Ce n’est pas possible! Il n’y a aucun signe qui montre le départ du système et des têtes qui l’incarnent. Donc on va continuer le mouvement jusqu’au départ du pouvoir », a-t-elle soutenu.
Un ancien militaire, quant à lui, nous témoigne que » la situation se complique davantage pour les partis au pouvoir qui n’arrivent toujours pas à trouver une issue favorable à leur crise existentielle, puisqu’il s’agit de leur maintien ou de leur départ définitif. Ils ont échoué sur tous les plans, et le monde entier le sait. Nous ne voulons pas attendre le 20e vendredi pour qu’ils partent. C’est bon, le jeu est terminé. »
Entamée depuis la Place du 1er Mai, où un grand rassemblement populaire a tenu depuis la mi-matinée de la journée d’hier, une grandiose marche a pris forme depuis la rue Hassiba Benbouali et l’autre boulevard Didouche Mourad, pour converger vers la Grande-poste au cœur d’Alger. Dans l’après-midi, des jeunes manifestants portaient une grande banderole où il était écrit en arabe : “Vous êtes le passé, et c’est nous le futur’’. Des mots forts avec lesquels les jeunes ont exprimé leur refus catégorique du système politique en place.
Med Wali