Le port de Casablanca, cœur économique du Maroc, devient une nouvelle fois l’épicentre d’un réseau international de trafic de drogue. La récente saisie de 3,6 tonnes de hashish révèle non seulement l’ampleur de la criminalité organisée mais aussi les défaillances d’un système censé assurer le contrôle des exportations. Cet événement s’inscrit dans un contexte global où le Maroc occupe, de par sa place de premier producteur de cannabis dans le monde, selon l’agence onusienne de lutte contre la drogue et protecteur de cette activité illégale est devenu, notamment ces dernières années un point névralgique incontournable dans le trafic de drogue de différents types, comme le montre la récente saisie au port brésilien, d’une tonne de cocaïne à bord d’un navire en partance vers le Maroc. L’opération qui a eu lieu récemment dans le port de Casablanca a mis à jour 3,6 tonnes de hashish, soigneusement dissimulées dans une cargaison de farine de poisson. Destinée à la Belgique, cette cargaison a été interceptée grâce à une action concertée des autorités locales. Cependant, ce coup de filet, bien que salué, soulève des interrogations. En effet, la drogue avait quitté un site de production officiellement validé, avec des procédures logistiques qui, apparemment, ne faisaient pas l’objet d’un contrôle suffisant. D’ailleurs, des sources locales évoquent la complicité interne d’acteurs ayant facilité le passage de cette marchandise à travers des systèmes censés en assurer la surveillance. L’implication d’une entreprise cotée en Bourse dans ce réseau trouble ne fait qu’accentuer l’ampleur du scandale. L’image du Maroc, déjà ternie par ces pratiques, se trouve à nouveau mise en cause, car un tel trafic ne pourrait se dérouler sans une forme de laxisme institutionnel. Ce phénomène, récurrent dans le royaume, pose la question de l’efficacité des mécanismes de contrôle et des institutions censées protéger les frontières économiques et commerciales du pays.
Les tentacules du réseau s’étendent jusqu’au Brésil
La saisie de 3,6 tonnes de hashish à Casablanca résonne d’autant plus fortement après la saisie d’une tonne de cocaïne dans le port brésilien d’Itapoa, samedi dernier. Cette drogue, cachée à bord d’un navire à destination du Maroc, a été interceptée grâce à des opérations de surveillance maritime menées par la police fédérale brésilienne. Le navire, battant pavillon libérien, était en route vers le Maroc, avant que la cargaison ne soit envoyée en Europe. Ce type de saisie n’est pas isolé. D’autres interceptions ont eu lieu ces derniers mois, notamment au port de Santos, où plus de 600 kilogrammes de cocaïne avaient été dissimulés parmi des fruits d’açaï destinés à la réexportation vers le Maroc. Cette tendance montre que le royaume est de plus en plus perçu comme un centre stratégique dans la chaîne mondiale de trafic de drogues, exploitant ses ports pour faciliter le transit vers l’Europe. Ces faits soulignent un problème persistant : des complicités internes, souvent liées à des réseaux puissants, permettent à ces cargaisons de transiter sous les radars des autorités.
Carrefour de la criminalité organisée
Le Maroc, en raison de sa position géographique privilégiée entre l’Europe et l’Afrique, occupe un rôle clé dans les circuits de trafic de drogue. Mais au-delà de sa production de hashish, le pays est devenu une porte d’entrée majeure pour des drogues en provenance d’Amérique du Sud, comme la cocaïne, acheminée par voie maritime. Des saisies de plus en plus fréquentes à travers l’Europe et l’Afrique du Nord montrent que le rôle stratégique du Maroc dans ce commerce mondial se renforce. Pourtant, la facilité avec laquelle les cargaisons passent par les ports marocains met en évidence des failles profondes dans le contrôle. Le port de Casablanca et d’autres infrastructures portuaires marocaines semblent être de plus en plus utilisés par des réseaux de criminalité organisée, grâce à des complicités internes qui permettent à des cargaisons de passer sans être détectées. Le Maroc, qui prétend lutter contre ce fléau, semble pris dans un double jeu : d’un côté, il s’efforce de maintenir une image de sérieux et de coopération internationale en matière de sécurité, mais de l’autre, des failles systématiques laissent prospérer des réseaux de trafic. Cette contradiction s’inscrit dans un contexte où des acteurs internes influents semblent capables de contourner les mesures mises en place, ce qui interroge sur l’efficacité réelle de l’État marocain à éradiquer ce fléau.
Lutte aux failles internes
Les saisies récentes, tant à Casablanca qu’au Brésil, pointent une lenteur et une inefficacité des systèmes de contrôle, renforcées par des complicités internes qui facilitent la circulation des drogues. Si le Maroc met en place des dispositifs de sécurité dans ses ports, ces derniers restent pourtant vulnérables aux manipulations. Ce n’est pas un hasard si les grandes quantités de drogue saisies à l’étranger, qu’il s’agisse de cocaïne ou de hashish, passent par des pays comme le Maroc, réputés pour leurs failles logistiques et leur laxisme institutionnel. Les autorités marocaines se retrouvent face à un défi de taille, et bien que des opérations comme celles de Casablanca montrent une forme de réactivité, la réalité du terrain suggère qu’il existe une certaine tolérance vis-à-vis de ces réseaux, souvent alimentée par des intérêts économiques et politiques bien plus puissants que ceux des simples fonctionnaires. Ce type de complaisance interne ne pourrait se développer que dans un contexte où la complicité de certains pouvoirs permet à ces réseaux de continuer à fonctionner sans véritable entrave.
Le Maroc face à ses contradictions
Le Maroc, une fois encore, est au centre d’un nouveau scandale de trafic de drogue. Les saisies au port de Casablanca et au Brésil montrent qu’un système complexe, appuyé par des complicités internes, reste bien ancré dans les rouages économiques et politiques du royaume. Tant que ces failles ne seront pas adressées de manière sérieuse, et tant que des intérêts puissants continueront à tirer profit de ce trafic, il est peu probable que le pays parvienne à endiguer ce fléau. Le Maroc doit maintenant faire face à une réalité implacable : son rôle de carrefour de la drogue ne pourra être effacée sans une remise en question profonde de ses structures de contrôle et de gouvernance.
Mohamed Amine Toumiat
Un rôle central dans un système opaque et dangereux
Le démantèlement récent d’un réseau criminel en Espagne met en évidence une réalité troublante : le Maroc joue un rôle clé dans le trafic de substances médicamenteuses prohibées. Ces médicaments, une fois acheminés sur le territoire marocain, sont transformés en « Karkoubi », une drogue bon marché mais destructrice. Ce phénomène, loin d’être isolé, s’inscrit dans un système où les failles institutionnelles et sécuritaires favorisent la prolifération de ces activités illicites. C’est dans la province espagnole de Jaén, au sud du pays, que les autorités ont démantelé une cellule criminelle impliquée dans le stockage et l’exportation de médicaments contenant des benzodiazépines. Cette substance, détournée de son usage médical, est destinée au Maroc, où elle est mélangée à du haschisch pour produire une drogue psychotrope connue localement sous le nom de « Karkoubi ». L’opération, baptisée « Rousita », a permis l’arrestation de neuf individus, parmi lesquels un médecin impliqué dans la fourniture de ces substances. Les autorités espagnoles ont saisi 2 160 comprimés et une somme d’argent liquide estimée à 18.000 euros. Cette enquête, amorcée après la découverte d’achats suspects dans une pharmacie, a mis en lumière les connexions transfrontalières entre le réseau criminel et le Maroc, un pays où ces substances trouvent un terrain fertile pour leur transformation et leur distribution.
« Karkoubi » : une crise sociale et sanitaire
Au Maroc, le « Karkoubi » s’est imposé comme l’une des drogues les plus accessibles, notamment auprès des jeunes issus des quartiers défavorisés. Mélange de médicaments prohibés et de haschisch, cette drogue est vendue à des prix dérisoires, rendant son accès facile même pour les populations les plus vulnérables. Mais son coût économique cache une facture bien plus lourde : celle de la destruction sociale et sanitaire. Le « Karkoubi » provoque des troubles mentaux graves, des excès de violence incontrôlée et des dommages physiques irréversibles. Sa consommation est souvent liée à des actes criminels, aggravant l’insécurité dans des zones déjà fragilisées. Si cette crise persiste, c’est aussi en raison d’un cadre institutionnel peu efficace dans la lutte contre ce fléau. Le manque de contrôle rigoureux sur les frontières et les réseaux de distribution internes permet à ces substances de proliférer. Cette situation alimente un cycle de désordre social qui fragilise encore davantage les fondements du pays.
Carrefour stratégique ou terre d’opportunités criminelles ?
La situation met en lumière un aspect crucial : la position géographique du Maroc en fait un carrefour stratégique pour le trafic de drogues. Situé entre l’Europe et l’Afrique, le pays constitue une plaque tournante pour les substances illicites. Mais cette position privilégiée est exploitée par des réseaux criminels qui profitent des failles locales pour leurs activités. En dépit des déclarations officielles sur la lutte contre le trafic de drogue, le problème persiste. Les connexions entre certains milieux influents et ces activités illicites sont souvent évoquées, sans que des mesures concrètes et durables ne soient prises. La corruption, omniprésente dans certains secteurs stratégiques, affaiblit considérablement les efforts pour freiner cette crise. L’impact du trafic de « Karkoubi » dépasse les frontières marocaines. En tant que principal récepteur de ces substances en provenance d’Espagne, le Maroc agit également comme un point de passage pour les drogues à destination de l’Europe et de l’Afrique. Ce rôle central ne fait qu’exacerber les tensions régionales liées au trafic de stupéfiants. Au niveau interne, les répercussions sont tout aussi graves. Le Maroc est confronté à une montée en puissance des réseaux de drogue, qui s’implantent durablement grâce à un cadre permissif. La propagation du « Karkoubi » aggrave les problèmes de santé publique, surchargeant des systèmes médicaux déjà sous pression. Par ailleurs, elle alimente une économie parallèle qui échappe aux autorités, renforçant le pouvoir des réseaux criminels au détriment du développement économique et social du pays.
Des mesures insuffisantes face à une crise structurelle
Malgré les annonces de lutte contre le trafic de drogue, le manque d’une volonté politique réelle et d’une coordination efficace entrave tout progrès. Les campagnes répressives ponctuelles n’attaquent pas les racines du problème, qui trouvent leur origine dans les inégalités sociales, les failles institutionnelles et l’absence de solutions durables pour la jeunesse marocaine. Cette crise met en lumière la responsabilité des autorités dans leur incapacité à offrir une réponse structurelle à ce phénomène. Les efforts de contrôle des frontières, souvent insuffisants ou détournés, permettent aux substances prohibées de continuer à entrer et à circuler librement.
Si rien n’est fait pour endiguer ce fléau, le Maroc risque de voir ses défis sociaux et économiques s’aggraver. La jeunesse marocaine, principale victime de ce trafic, est privée de perspectives d’avenir, piégée dans un cycle de dépendance et de marginalisation. La persistance de cette crise soulève une question fondamentale : le Maroc pourra-t-il un jour se libérer de cette position ambivalente de carrefour du trafic ? Cela nécessitera des réformes profondes, une volonté politique réelle et une véritable mobilisation contre la corruption qui gangrène les institutions.
M. A. T.