Troisième Premier ministre britannique en deux mois, Rishi Sunak a reconduit mardi les principales figures du gouvernement conservateur, optant pour la stabilité et promettant de réparer les « erreurs » commises par l’éphémère Liz Truss.
L’ex-banquier et ministre des Finances de 42 ans est entré à Downing Street à peine cinq jours après l’annonce de la démission de Liz Truss, au pouvoir pendant seulement 49 jours, énième coup de théâtre dans un pays en proie à de vives turbulences économiques et politiques. « J’unirai notre pays non avec des mots, mais des actes », a assuré M. Sunak sur le perron de sa résidence officielle, après s’être vu demander par le roi Charles III de former un nouveau gouvernement. Il a promis de « réparer » les « erreurs » commises sous Liz Truss. « Je placerai stabilité économique et confiance au cœur de l’agenda de ce gouvernement ». Le nouveau Premier ministre, le premier originaire d’une ex-colonie britannique et le plus jeune depuis le 19e siècle, prend les rênes d’un pays confronté à une grave crise économique et sociale. L’inflation dépasse les 10%. Le risque d’une récession plane. Les grèves se multiplient face à la chute du pouvoir d’achat. Contrainte à partir après la tempête provoquée par son plan massif de baisses d’impôts, Liz Truss a précédé Rishi Sunak mardi au palais de Buckingham pour présenter au roi sa démission, après un mandat d’une brièveté record. Elle a souhaité « tous les succès » possibles à son successeur, « pour le bien de notre pays », et réaffirmé son plaidoyer pour l’audace au pouvoir.
Ministres reconduits
Rishi Sunak a commencé aussitôt à former un gouvernement avec un double défi: donner des gages aux marchés, à fleur de peau depuis les annonces budgétaires de septembre, et rassembler une majorité très divisée après douze ans de pouvoir. Sur le plan économique, il a opté pour la stabilité en confirmant Jeremy Hunt, 55 ans, au ministère des Finances. Depuis sa nomination en catastrophe mi-octobre, ce dernier a ramené un semblant de calme sur les marchés en annulant presque toutes les baisses d’impôts annoncées trois semaines plus tôt et averti de mesures difficiles à venir, faisant craindre un retour de l’austérité. Il doit présenter de nouvelles mesures budgétaires le 31 octobre. En temps de guerre en Ukraine, Rishi Sunak a également confirmé James Cleverly aux Affaires étrangères et Ben Wallace à la Défense. Gage pour l’aile droite : l’ultraconservatrice Suella Braverman est renommée à l’Intérieur, moins d’une semaine après sa démission de ce poste qui avait contribué à la chute de Liz Truss. Si cette dernière avait formé un cabinet très loyal, Rishi Sunak semble montrer une volonté d’ouverture aux différents courants de la majorité. Il a néanmoins rappelé au gouvernement son allié Dominic Raab qui retrouve les postes de ministre de la Justice et de vice-Premier ministre. Sur la BBC, le député Huw Merriman a expliqué que Rishi Sunak voulait apporter « une impression de calme et de stabilité » en dirigeant le gouvernement « comme un chef d’entreprise »: « Nous ne voulons plus de turbulences ». Le gouvernement « reflète un parti unifié et un cabinet avec de l’expérience, assurant en des temps incertains une continuité au sein du gouvernement », a souligné une source à Downing Street.
Appels à l’étranger
Pour son premier appel à un dirigeant étranger, Rishi Sunak s’est entretenu mardi soir avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky et lui a assuré du « soutien inébranlable » du Royaume-Uni alors que le départ de Boris Johnson avait suscité des inquiétudes à Kiev. M. Zelensky a de son côté affirmé qu’il espérait un « renforcement » des relations de son pays avec Londres. M. Sunak s’est également entretenu au téléphone avec le président américain Joe Biden. Sur la scène locale, le nouveau Premier ministre s’est dit « conscient » du travail à effectuer pour « rétablir la confiance », allusion aux scandales sous Boris Johnson auquel il a exprimé sa « gratitude ». A la tête d’un parti extrêmement divisé, Rishi Sunak exclut des élections anticipées, réclamées par l’opposition. Selon un sondage Ipsos publié lundi, 62% des électeurs souhaitent un tel scrutin avant la fin 2022. Brexiter de la première heure, qui passe pour un pragmatique, bourreau de travail, Rishi Sunak est pressé de détailler ses projets, après s’être imposé sans programme ni vote des adhérents. Il était le seul candidat à avoir obtenu les soutiens nécessaires des députés de son parti. Face à l’ampleur de la tâche, il a assuré dans son premier discours ne pas être « intimidé ». Il fera face mercredi à l’opposition travailliste au Parlement pour la traditionnelle séance de questions au Premier ministre, souvent très animée.