L’ancien président Hosni Moubarak, maître absolu de l’Egypte pendant 30 ans, balayé en 2011 par le Printemps arabe, emprisonné puis acquitté, est décédé mardi à l’âge de 91 ans, dans un hôpital militaire au Caire.
Abdel Fattah al-Sissi, président depuis 2014, a salué l’un des «héros de la guerre d’octobre 1973» contre Israël, durant laquelle Moubarak avait dirigé l’armée de l’air. Et quelques dirigeants étrangers –palestinien, israélien et émirati– lui ont rendu hommage. Depuis sa démission en février 2011 après 18 jours d’une révolte sans précédent contre son régime, la santé de l’ancien chef d’Etat avait fait l’objet de spéculations dans la presse et sur les réseaux sociaux. Dépression, cancer, problèmes cardiaques ou respiratoires avaient été évoqués pour l’ex-président, régulièrement hospitalisé en soins intensifs. Mardi, la nouvelle de son décès à l’hôpital al-Galaa (Est du Caire) a été confirmée par la famille et relayée par la télévision égyptienne, qui arbore depuis lors un ruban noir symbolique. Selon les médias égyptiens, des funérailles militaires seront organisées mercredi à la mosquée al-Mouchir Tantaoui, dans l’est du Caire. Et les autorités ont décrété une période de deuil national de trois jours à compter de mercredi. Au cimetière où il doit être enterré, dans l’est du Caire, des journalistes de l’AFP ont vu mardi plusieurs véhicules militaires garés près du tombeau familial, ainsi que des policiers en civil patrouillant dans le secteur.
Traduit en justice
Des hommages ont été rendus sur les réseaux sociaux, émanant même d’opposants à Moubarak. Mohamed el-Baradei, prix Nobel et figure de proue de l’opposition libérale à l’ancien autocrate, a présenté ses condoléances à la famille du défunt. Ayman Nour, opposant exilé en Turquie et ancien candidat à la présidentielle de 2012, a déclaré sur Twitter lui «pardonner». Toutes les réactions n’étaient cependant pas positives, notamment au sein des militants anti-Moubarak. «Il a vécu comme un criminel et un tyran et il est mort comme un criminel et un voleur», a ainsi tweeté Racha Azab, une journaliste et opposante de gauche, figure de la révolution dont la répression avait fait au moins 850 morts. L’ancien commandant en chef, à la tête pendant 30 ans d’un régime marqué par les abus policiers et la corruption, aura été le premier président du pays à être traduit en justice. Il a toutefois été blanchi de la plupart des accusations qui pesaient contre lui. Ses ennuis judiciaires ont été peu à peu éclipsés par l’arrivée au pouvoir des Frères musulmans en 2012 et la destitution en 2013 du président islamiste Mohamed Morsi par le général Sissi. Au fil des années, l’aversion des Egyptiens pour Moubarak s’est petit à petit muée en une sorte d’indifférence mêlée de nostalgie, son règne étant perçu comme une période de stabilité révolue. Le maintien contre vents et marées des accords de paix conclus en 1979 avec Israël et sa réputation de «modéré» au sein du monde arabe ont valu à son régime autocratique les faveurs de l’Occident, en particulier des Etats-Unis, dont il est resté un allié indéfectible. Israël a été parmi les premiers pays à réagir au décès de Moubarak, le Premier ministre Benjamin Netanyahu rendant hommage à un «ami personnel, un leader qui a conduit son peuple à la sécurité et à la paix avec Israël». Et le président palestinien Mahmoud Abbas a salué son engagement en faveur de la «liberté et de l’indépendance» du peuple palestinien, alors que l’Egypte de Moubarak a joué un rôle de médiateur de premier plan durant les périodes de haute tension entre Palestiniens et Israéliens.
«Conscience tranquille»
Le prince héritier d’Abou Dhabi, Mohammed ben Zayed al-Nahyane, a estimé sur Twitter que Moubarak avait «travaillé avec loyauté pour l’unité arabe et la stabilité, et s’était opposé fermement au terrorisme». Moubarak s’est montré un adversaire résolu des jihadistes d’Al-Qaïda et des Frères musulmans, sans pour autant parvenir à enrayer la montée de ces derniers. Chef d’Etat égyptien resté le plus longtemps au pouvoir depuis l’abolition de la monarchie en 1953, il a maintenu en permanence l’état d’urgence.
Lors de son règne, incontesté jusqu’en 2011, l’ouverture des dernières années a valu à l’Egypte une amorce de décollage économique, mais aussi une aggravation des inégalités, du mécontentement social et de la corruption.
«Alors que ma vie approche de son terme, grâce à Dieu j’ai la conscience tranquille et je suis content d’avoir passé (ma vie) à défendre l’Egypte», avait-il déclaré lors d’un de ses procès.