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Le liquidateur de Khalifa Bank formel : «iI n’y a jamais eu de prospérité de l’entreprise»

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Moncef Badsi, le liquidateur de Khalifa Bank, a été appelé à la barre, jeudi dernier, pour apporter son témoignage sur la situation de Khalifa Bank, et de ses autres filiales, dont il a été chargé de liquider. Le président du tribunal criminel, près la Cour de Blida, Antar Menouar, lui demanda ce en quoi consistait sa mission, et le témoin expliqua qu’avant cela il se trouvait en mission à Skikda pour le compte de Sonatrach, en qualité de commissaire aux comptes quand il reçut un appel téléphonique d’Alger, lui demandant de rentrer, car il avait été désigné en qualité de liquidateur de Khalifa Bank. Badsi a demandé à son interlocuteur s’il pouvait refuser ce poste, mais ce dernier lui affirma que c’était capital et que, dans l’intérêt de tous, il était souhaitable d’accepter. Il rentra le jour-même et le lendemain, 29 mai 2003, il fut installé dans ses nouvelles fonctions et rencontra l’administrateur de Khalifa Bank, avec lequel il effectua une passation de consignes, et se vit remettre un dossier qu’il qualifia de complet. Il déclara au juge que : «Juste après ma prise de fonction, j’avais le sentiment d’accomplir un devoir fondamental, que je me trouvais devant un désastre au sens plein du terme, et que j’allais donc entrer dans un état de guerre contre plusieurs ennemis». Aussitôt, il entama un travail d’une nécessité absolue : la capitalisation des ressources sur le terrain pour tenter de limiter les dégâts. Il raconta au juge que ce qu’il a découvert, dès le début de sa mission, est une véritable catastrophe et enchaîna en affirmant : «Si au moins cela pouvait servir de leçon au pays à l’avenir, car ce qui s’est passé à Khalifa Bank démontre l’état de faiblesse et de précarité du pays». Concernant la mission d’administrateur de Djellab, le liquidateur de Khalifa Bank rappelle qu’elle consistait à déterminer si l’entreprise pouvait être sauvée et remise à flot ou, au contraire, être mise en liquidation. Et, devant l’ampleur des dégâts constatés, c’est la liquidation qui a été décidée. D’ailleurs, Badsi a continué son témoignage en précisant que : «Ce que j’ai trouvé ne reflétait pas tout ce qui a été dit au sujet de Khalifa Bank, c’était encore beaucoup plus grave». L’action qui devait suivre était tracée de prime abord : faire une capitalisation rapide et complète des ressources, afin de les préserver car : «entre le gel de l’agrément et l’installation de l’administrateur : «il s’est passé beaucoup de choses, des pillages ont été effectués», a précisé Badsi. Le manque d’organisation et de suivi constitua une difficulté supplémentaire qu’il devait surmonter s’il voulait sauver ce qui pouvait encore l’être, et préserver le patrimoine du Groupe. Le liquidateur se dit ne jamais pouvoir oublier les difficiles conditions dans lesquelles il a entamé son véritable travail, surtout pour rencontrer et écouter les contestataires, au milieu d’une quarantaine de policiers et de cailloux qui pleuvaient de partout, et au moment où tout le monde voulait être le permier servi. Quand le président du tribunal lui demanda de decrire ce qu’il a trouvé, Badsi annonce que Khalifa Bank disposait de quelque 70 agences dans des locaux, loués pour la plupart, et que les propriétaires voulaient récupérer de peur de les perdre définitivement. Il a aussi trouvé une communauté d’effectif qui attendaient de recevoir leurs droits et qui n’avaient pas encore quitté l’entreprise. En abordant la question des archives, le liquidateur précise qu’elles étaient dans un désordre complet, éparpillées dans des bureaux, et il lui fallait donc rapatrier tous les dossiers (plus d’un million deux cent mille), les classer et protéger les dossiers confidentiels ou sensibles. Badsi rend aussi hommage aux employés qui étaient encore là, car il l’avait beaucoup aidé pour la récupération des archives. Quand le président lui demanda de parler des comptes d’ordre, Badsi souligne que ce sont des comptes ébranlés et inexpressifs qui n’expriment nullement l’activité réelle et n’apportent aucune explication de relation : «les comptes d’ordre polluent toute possibilité de faire des analyses et génèrent donc des opérations en attente, contestables et douteuses qui constituent un terrain dangereux» a-t-il affirmé. Le liquidateur se tourne ensuite vers les EES (Écritures entre sièges), et se lance dans une explication pour dire que c’est une pièce comptable utilisée entre les différentes agences quand elles sont loin l’une de l’autre. À Khalifa Bank, il a découvert 3,3 millions d’EES, dont plus de 2 millions non encore débouclées. Interrogé sur les 11 EES de la caisse principale, il affirme que c’est un cas particulier, car la caisse avait sorti de l’argent sans mettre à jour sa comptabilité, puisqu’il n’y avait ni état des avoirs, ni brouillard de caisse, il n’y avait que des fiches. Comme ce qu’il y avait dans les caisses était différent de ce qu’il y avait dans les comptes, les responsables de la caisse principale ont misé sur ces 11 EES pour essayer de justifier cette différence. L’inexistence de comptes de correspondants (en devises), sauf en extra comptable, sur des fiches qui ne sont pas intégrées dans le processus de comptabilité constitue aussi un manquement grave aux règlements, et pouvait permettre une saignée de devises sans laisser de traces. D’ailleurs, Badsi rappelle qu’il a mis 12 ans à essayer de réparer les dégâts occasionnés par cette gestion «folklorique’ de la banque, et il ne compte terminer toute la liquidation que dans trois années, au plus, a-t-il estimé. Passant ensuite aux dettes cumulées de Khalifa Bank, Badsi annonce qu’elles ont atteint plus de 104 milliards de dinars. Les créances, quant à elles, ont atteint 119 milliards, dont seulement 10 milliards ont pu être récupérés. Donc, et toujours, selon le liquidateur, il reste encore 114 milliards de dinars de dettes pour Khalifa Bank, représentant les dépôts, aussi bien des entreprises publiques que celles des particuliers : «il n’y a jamais eu de prospérité de l’entreprise, comme cela a été annoncé», a-t-il affirmé encore. Revenant sur cette catastrophe, Badsi rappelle que: «Il s’agit d’un drame de nature nationale, car ce sont les dépôts des entreprises publiques et de particuliers qui ont été victimes d’un pillage, mais ce drame aurait pris une autre tournure, plus grave encore, une véritable catastrophe, si Sonatrach avait fait le dépôt de 400 milliards de dinars, comme c’était prévu». Il cite ensuite les unités de dessalement pour lesquelles la somme de 689 millions de dollars avait été transférée de manière contestable, puisque non conforme à la règlementation. Toujours concernant les trois unités de dessalement, Badsi a trouvé différentes factures portant des montants différents (81, 51 et 41 millions de dollars) à chaque fois, pour la même fourniture. En outre, et lorsqu’il a pris contact avec Abdelmoumène Khelifa, le liquidateur annonce que ce dernier lui a certifié que les trois unités de dessalement (deux ont coulé et sont irrécupérables) ont été payées entièrement, mais la société étrangère qui les a fournies continue de réclamer leur paiement. Enfin, Badsi annonce qu’il a clos la liquidation de toutes les filiales, sauf Khalifa Airways et Khalifa Bank, qu’il compte clôre d’ici trois années au plus.
Hadj Mansour

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