Alors que la guerre d’extermination menée contre Ghaza entre dans sa deuxième année, la Cisjordanie occupée vit également sous une intensification brutale de la répression. Entre incursions militaires, destructions de maisons, attaques de colons et étranglement économique, la population palestinienne est confrontée à un climat de siège généralisé. Les forces d’occupation ont lancé de nouvelles opérations dans plusieurs villes, dont Ramallah, El Khalil et Tulkarem. Ces opérations se sont traduites par des arrestations, des expulsions et la transformation de quartiers résidentiels en véritables casernes militaires. À Tulkarem, le quartier est d’Abu Safia a été vidé de ses habitants sous la menace des armes, avant d’être converti en base fortifiée de l’armée sioniste. Les camps de réfugiés de Tulkarem et de Nour Shams demeurent soumis à un blocus total. Les entrées sont barricadées, empêchant tout mouvement des habitants. Des tireurs d’élite ont été postés dans les maisons réquisitionnées, et des tirs ont visé quiconque s’approchait des zones assiégées. Une explosion a même été entendue dans le camp de Nour Shams, sans qu’il soit possible d’en connaître l’origine à cause du siège. Selon Wafa, des renforts militaires affluent sans interruption dans la région, notamment par l’ouest de Tulkarem, bloquant les axes routiers et perturbant la circulation des civils. Le bilan humain est lourd : 14 Palestiniens ont été tués dans ces offensives récentes, dont un enfant et deux femmes, tandis que des dizaines d’autres ont été blessés ou arrêtés. Plus de 5 000 familles – soit 25 000 personnes – ont été déplacées de force, et des quartiers entiers se retrouvent vidés de leur population.
Des colons déchaînés
La violence ne se limite pas aux soldats. Les colons sionistes, protégés par l’armée, poursuivent leurs attaques contre les terres agricoles palestiniennes. À Saïr, au nord-est d’El Khalil, plus de 200 oliviers centenaires et une centaine d’amandiers ont été abattus à la tronçonneuse par des colons venus des colonies d’Asfar et de Kodofim. Le paysan Issa Shalalda, propriétaire des terres avec son frère, a témoigné d’un véritable saccage : « Ils ont exécuté tous nos champs et les ont transformés en ruines », a-t-il déclaré. Ces agressions ne sont pas isolées. Le mois dernier, les mêmes colons avaient incendié des dizaines de dunums de vignes, d’oliviers et d’amandiers, dans une stratégie systématique visant à expulser les habitants et à étendre les colonies. À Huwara, près de Naplouse, d’autres colons ont incendié des parties extérieures d’une maison palestinienne habitée. Bien que l’incendie ait été maîtrisé, il a provoqué d’importants dégâts matériels. La région connaît une multiplication d’attaques de ce type depuis l’installation récente d’une nouvelle colonie illégale. À Jenine, des unités spéciales sionistes ont fait irruption dans le centre-ville, ouvrant le feu à balles réelles et perturbant la vie quotidienne. Depuis janvier, la ville et son camp subissent une pression militaire constante, marquée par des incursions quasi quotidiennes. Dans la région de Tubas, le camp d’al-Far’a a été envahi par une force spéciale, suivie de colonnes blindées arrivées du checkpoint d’Hamra. Là encore, les arrestations et les affrontements se sont multipliés. Trois jeunes ont également été arrêtés à Tulkarem, alors qu’un autre a été interpellé dans le village de Jifna, au nord de Ramallah.
Étouffement économique
Au-delà des violences militaires et coloniales, l’occupation exerce une pression économique qui menace la viabilité d’un futur État palestinien. Dans un rapport publié mardi, l’agence Reuters décrit comment l’économie de Cisjordanie occupée est étranglée : confiscation des recettes fiscales palestiniennes par l’entité sioniste, blocage des salaires, effondrement des transferts financiers des travailleurs vers Ghaza et multiplication des barrages qui fragmentent les routes commerciales. La Banque mondiale a alerté sur un risque d’« effondrement financier » de l’Autorité palestinienne, déjà contrainte de réduire les salaires des fonctionnaires à 50 % et de suspendre des paiements aux prestataires. Les pénuries touchent aussi le secteur de la santé, où plus de 150 médicaments essentiels, dont 40 traitements vitaux pour le cancer, sont totalement absents des stocks. Le ministre palestinien de la Planification, Ishtafan Salameh, a reconnu que « toutes les solutions internes ont été épuisées » et que l’Autorité n’a plus de capacité d’emprunt. Pendant ce temps, le ministre des Finances sioniste, Bezalel Smotrich, poursuit le gel de près de 10 milliards de shekels de taxes palestiniennes, accentuant l’asphyxie budgétaire. La simultanéité des offensives militaires, des attaques de colons et du blocus économique dresse un tableau alarmant : une Cisjordanie occupée de plus en plus fragmentée, où les habitants sont déplacés de force, privés de leurs terres et étranglés financièrement. Si la communauté internationale multiplie les déclarations en faveur d’un État palestinien, la réalité sur le terrain révèle un processus inverse : le démantèlement progressif de toute viabilité économique, sociale et territoriale palestinienne.
M. S.













































