Accueil ACTUALITÉ L’AUTOGESTION : Socle fondateur de l’État social algérien

L’AUTOGESTION : Socle fondateur de l’État social algérien

0

Dans les premiers jours fiévreux de l’Indépendance, alors que les cicatrices de la guerre étaient encore vives et que l’économie héritée de la colonisation vacillait, un mot s’imposait dans le vocabulaire national : l’autogestion. Plus qu’un simple modèle économique, elle était une promesse – celle d’une Algérie reconstruite par ses propres mains, portée par la mobilisation populaire et un patriotisme ardent.

Mercredi à Alger, économistes, universitaires et anciens responsables se sont réunis sous l’égide de l’Institut national d’études de stratégie globale (INESG) et du Centre des archives nationales pour revisiter cette expérience singulière. Leur verdict est unanime : l’autogestion a été l’un des piliers sur lesquels s’est bâti l’État social algérien. Pour Djoudi Bouras, président du Conseil scientifique de l’INESG, ce système a marqué «le passage d’un paradigme révolutionnaire centré sur la libération nationale à un paradigme de reconstruction». Selon lui, l’autogestion n’a pas seulement relancé la production après les années de guerre, elle a posé les fondations d’un État solidaire, préparant le pays à se projeter comme un futur État émergent. Dans les champs et les usines abandonnés par les colons, la jeunesse et les travailleurs prenaient les commandes, parfois avec peu de moyens mais beaucoup de détermination. L’expert économique, Mustapha Bouroubi, se souvient de cette ferveur : «C’était un patriotisme économique concret. Le Fonds de solidarité nationale, les campagnes de volontariat agricole… tout cela reposait sur la mobilisation de chacun ». Aujourd’hui, il voit dans cette expérience une leçon à méditer face aux défis contemporains : « La souveraineté économique, qu’elle soit alimentaire ou énergétique, reste un enjeu mondial. Et le facteur humain demeure la clé». Pour Cherif Omari, universitaire et ancien ministre de l’Agriculture, l’autogestion a joué un rôle décisif dès les premières récoltes post-indépendance. La campagne 1962-1963, dit-il, « a été sauvée » avec 23,57 millions de quintaux de céréales, un résultat supérieur à la moyenne de la fin des années 1950. Et ce, dans un contexte marqué par le départ massif des encadreurs étrangers. La création, à peine une semaine après la proclamation de l’Indépendance, de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) illustre cette volonté d’organiser immédiatement la souveraineté alimentaire. En toile de fond, c’est tout un état d’esprit qui se dessinait : celui d’une Algérie décidée à se relever sans attendre, à structurer ses ressources et à s’appuyer sur la force de son peuple. Plus de soixante ans après, l’autogestion reste gravée dans la mémoire collective comme une période où la solidarité, la dignité et l’effort commun forgeaient l’avenir. Un héritage qui, à l’heure des incertitudes économiques mondiales, résonne comme un rappel : un pays ne se construit pas seulement avec des capitaux, mais avec l’engagement de ses citoyens.

M. Seghilani 

Article précédentCHU Dr Benzerdjeb d’Oran : Réalisation de la première opération de dialyse péritonéale
Article suivant3e Conférence de l’ONU sur PDSL : L’Algérie appelle à renforcer la coopération Sud-Sud