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La gestion des devises dans la perspective d’une économie tournée vers l’exportation : entre frilosité et urgence

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La chute brutale et drastique des prix du pétrole, depuis le milieu de l’année 2014, n’en finit pas de secouer les sphères politiques et économiques du pays. Dans le bon sens, il faut le dire. Elle a, en effet, remis sur le tapis le vieux débat, jusque-là jamais suivi de mesures concrètes pour hâter sa concrétisation, sur l’incontournable nécessité d’aller vers une économie réellement diversifiée, non dépendante des hydrocarbures et tournée vers l’exportation ; en un mot, vers une économie performante.

Et, dans la foulée, de briser un des tabous qui a, jusqu’à récemment, toujours caractérisé la chose économique dans notre pays ; la gestion du stock de ses devises et la valeur de notre monnaie nationale par rapport aux principales devises étrangères. Notamment, les deux de référence pour une large partie des Algériens, particuliers comme opérateurs économiques, du moins, que sont le dollar et l’euro. Ce dernier sujet a, d’ailleurs, fait l’actualité ces derniers jours. à l’occasion de la présentation, la semaine écoulée, à l’APN, par le gouverneur de la Banque d’Algérie, Mohamed Laksaci, du rapport annuel de l’institution qu’il dirige sur « les évolutions des indicateurs économiques et monétaires en 2014 et durant les neuf premiers mois de 2015 ». Un rapport qui s’est articulé autour de deux éléments présentés comme inévitables après la baisse précitée des prix du pétrole et, son corollaire, celle des entrées en devises du pays : le refinancement, après plus d’une dizaine d’années « d’arrêt », par la Banque d’Algérie, des banques primaires ; et de meilleures captations des disponibilités en devises détenues par les Algériens, surtout par les non-résidents d’entre eux, et utilisation des stocks en devises détenues par les institutions bancaires du pays. Refinancement et captation qui, tous deux, s’inscrivent dans le cadre de la mise en place de cette économie performante qui constitue, aujourd’hui, l’un des rares sujets, avec la question sécuritaire, sur lesquels existe un consensus national certain. Et ce, même si des divergences, tout aussi certaines, sur les meilleures voies y menant, existent également.
C’est, à l’évidence, ce qui explique la virulence des critiques que le gouverneur de la Banque d’Algérie a subies, mardi dernier, lors de sa présentation devant les rares députés présents dudit rapport. Une virulence que des observateurs « connaisseurs » des « pratiques parlementaires nationales » imputent, toutefois, au fait que certains de ceux des députés qui s’y sont adonnés se soient déjà placés dans la perspective des Législatives de 2017. Si le premier élément (le refinancement des banques primaires) n’a pas soulevé de grosses vagues : les députés étant, à l’évidence, conscients de l’utilité de cette mesure dans la mise en place d’une économie performante et ce, de par la possibilité de financement d’activités créatrices d’emplois qu’elle en permettra, le second (la captation des devises), en revanche, a valu à Mohamed Laksaci l’essentiel des critiques subies.
Des critiques, au demeurant, partagées par des experts financiers et des économistes nationaux. Comme les députés, ceux-ci disent ne pas comprendre la frilosité avec laquelle ce dossier est géré par la Banque d’Algérie. Notamment, dans son volet relatif à l’ouverture de bureaux de change. Une frilosité qui fait, selon les déclarations même du gouverneur de la Banque d’Algérie faites devant les rares députés présents, mercredi dernier, à l’APN, que seuls six bureaux du genre activent présentement dans le pays ; le caractère dérisoire de ce nombre ressort surtout de l’ancienneté relative de l’autorisation de cette activité dans notre pays : celle-ci datant, en effet, de 1997.
Et que les autorités de la « mère des banques » semblent décidées à corriger : Mohamed Laksaci ayant rappelé l’édit le 6 du mois en cours « par le Conseil de la monnaie et du crédit d’un nouveau règlement qui modifiera, dans le sens d’’une meilleure précision et du cadre juridique gérant les bureaux de change et de la qualité (de ceux-ci), le règlement 07-95 » en vigueur jusque-là. Et annoncé, dès publication de ce nouveau règlement, celle, par la Banque d’Algérie, « d’une nouvelle instruction (augmentant) la marge bénéficiaire des bureaux de change ».
Une instruction qui, faut-il le préciser, corrigera une des raisons à l’origine du manque d’attractivité, aussi bien auprès des détenteurs de devises que de ceux souhaitant les acquérir, de ces derniers. C’est sur cette correction que compte à l’évidence le gouverneur de la Banque d’Algérie pour canaliser vers ces bureaux une bonne partie des devises détenues par les non-résidents et une bonne partie de l’argent de l’informel ; les détenteurs des premières et ceux du second préférant, jusqu’à présent, recourir aux « bourses informelles » qui, secret de Polichinelle, pullulent dans le pays, pour leurs besoins respectifs. Et à propos de ces « bourses informelles », nombre d’experts financiers sont d’avis que leur tarissement ne peut être obtenu par la seule ouverture d’un grand nombre de bureaux de change.
Convaincus qu’ils sont que le relèvement de l’allocation touristique – actuellement fixée à la somme dérisoire de 130 euros – peut également y contribuer et ce, par ce qu’il permet de « détournement » de ces bourses de tous ceux qui en bénéficient. Ce dont semble aujourd’hui conscient Mohamed Laksaci qui n’a pas écarté la possibilité que l’institution qu’il dirige procède, pour bientôt, à un tel relèvement…
Mourad Bendris

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