Le groupe État Islamique (EI) a revendiqué lundi, pour la première fois depuis le début de la campagne, l’assassinat d’un candidat aux législatives du 12 mai, dans son ancien bastion du nord de l’Irak, près de Mossoul.
Il y a six mois, Bagdad annonçait avoir vaincu l’EI et en avoir «fini» avec plus de trois années de combat contre les jihadistes. Mais ceux-ci, désormais terrés dans des zones désertiques ou organisés en cellules clandestines, ont déjà menacé les législatives de samedi, les premières dont l’approche n’était pas ensanglantée jusque-là par la violence. Dans un communiqué publié sur Telegram, l’EI a revendiqué l’assassinat de Farouq Zarzour al-Joubouri, 45 ans, candidat sunnite sur la liste emmenée par le vice-président Iyad Allawi, le traitant de «mécréant» car il concourt aux élections, honnies par l’EI. Ce titulaire d’un doctorat en agriculture a été tué par balles à son domicile situé dans la région de Mossoul –qui fut de 2014 à 2017 la «capitale» du «califat» autoproclamé de laEI en Irak–, a précisé à l’AFP un responsable administratif local. Assassiné «à l’aube», ce candidat figurait sur la liste «Alliance nationale», a indiqué Salah al-Joubouri, responsable local à Qayyarah, à 70 kilomètres au sud de Mossoul. «Ils l’ont abattu par balles après s’être introduits chez lui», a-t-il précisé. Des sources médicales ont confirmé avoir reçu le corps sans vie du candidat, qui se présentait pour la première fois à un scrutin parlementaire. Dans une vidéo postée la veille de sa mort sur Facebook, le candidat, son fils de six ans, Rayan, dans les bras, appelait les électeurs à se méfier «des candidats sortants et de ceux qui achètent les votes». «Dans quelques jours, si Dieu le veut, nous fêterons la victoire», disait-il alors, assis sur l’herbe dans le jardin de sa maison.
«La victoire, si Dieu le veut»
Il promettait «un gouvernement juste et fort qui s’occupera des pauvres, des familles de martyrs, de la reconstruction et des citoyens». Cette même page se couvre désormais de commentaires d’internautes déplorant la mort de M. Joubouri, qui apparaît sur de nombreuses photos, son visage au teint bistre barré d’un sourire. Dans son communiqué, l’EI le qualifie de «mécréant». Fin avril, ce groupe sunnite avait déjà menacé d’attaquer les bureaux de vote et de s’en prendre aux électeurs et candidats lors des législatives. L’organisation ultra-radicale avait en particulier menacé les sunnites, majoritaires dans la région de Mossoul mais minoritaires dans le pays, qui est aux deux-tiers chiite. Dans un message audio, le 23 avril, le porte-parole de l’EI, Aboulhassan al-Mouhajer, avait menacé d’attaquer les bureaux de vote et de s’en prendre aux électeurs. «Ô sunnites (…), nous savons que le gouvernement des rafida (terme péjoratif par lequel les salafistes désignent les chiites) est sur le point d’appeler à des élections. Notre jugement s’appliquera à ceux qui y appellent et y participent», avait affirmé le porte-parole de l’EI.
Les organisations extrémistes sunnites se sont toujours opposées aux élections depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, multipliant les attentats lors des scrutins. M. Joubouri n’est pas le seul candidat à avoir perdu la vie ces dernières semaines. Fin avril, Nejm al-Hasnoui, candidat de la liste de l’2tat de droit emmenée par l’autre vice-président, Nouri al-Maliki, avait été mortellement touché par des tirs alors qu’il tentait une médiation dans un conflit tribal à Bagdad. Près de 24,5 millions d’électeurs départageront le 12 mai près de 7 000 candidats qui s’affrontent pour 329 sièges au Parlement. 0 l’issue de ce scrutin mêlant proportionnelle et quotas imposés, les listes victorieuses devront s’allier pour former une coalition de gouvernement.